Vous souvenez-vous de Tchernobyl ?
Allain Louisfert
Allain Louisfert Vous souvenez-vous de Tchernobyl ? Roman © 2014 Tous droits réservés. ISBN 978-2-9544483-1-2
Avant-propos Œuvre de fiction, toute ressemblance, etc.
Les Français sont « mauvais » en géographie Vous vous en souvenez bien sûr de la terrible catastrophe qui s'est produite en Russie ( ?), en URSS ( ?) en quelle année ? voyons, en 1995 (hum …) plus sûr de rien ? Eh bien, pour l'URSS vous êtes dans le vrai. Tchernobyl c'est bien en Russie ? Eh non, on en parle souvent en ce moment (printemps 2014) de ce pays : c'est en Ukraine ! Il faut que je vous souffle tout ! Pour beaucoup de nos compatriotes, Russie = URSS ou l'inverse. Et pour l'année c'était en …1986.
Partout en France depuis cette date ou quelques années plus tard, on a accueilli des enfants de Tchernobyl (russes et ukrainiens, à la date de la catastrophe on n'était pas sectaire comme maintenant). En Alsace, il y a, encore de nos jours, l'association « Les enfants de Tchernobyl », nous pourrions en citer d'autres. Cette association (mais elle ne fut pas la seule) reçut de nombreuses petites filles et de nombreux petits garçons, bien sûr, afin de leur permettre de s'échapper pour un temps, souvent pendant les vacances d'été, de leur quotidien. Il y en eut des Anna (prénom russe et ukrainien), Hanna (prénom ukrainien), Klara, Ilona pour les filles, Yuriy, Anton, Filipp, Petro, Fiodor, Iaroslav pour les garçons. Evidemment, j'ai ma petite idée, je voudrais vous raconter l'histoire d'une petite Anna qui avait quelques mois de moins que moi et avec qui j'ai souvent partagé, et mes jeux et mes pensées. Je crois que c'est en 1993 que les Ukrainiens arrivèrent pour la première fois dans notre petit village d'Alsace : Ribeauvillé, Rappschwihr en alsacien, nous disions les « Russes » ou les « Tchernobyl » ! A cette époque Anna et moi avions autour de dix ans. Moi je m'appelle Michel Thur, j'ai vécu tout le temps de mon enfance dans ce petit village d'Alsace.
Beaucoup de temps a passé.
Nous nous sommes installés à Simféropol, en Crimée en 2010. Nos deux garçons, Anton, six ans, né à Kiev et Alexandr, quatre ans, né en Crimée ont déjà tous leurs repères ici. Je suis OPL – officier pilote de ligne – c'est à dire copilote sur le plus gros avion du monde : l'An-225 (Antonov) Mriya pour la compagnie ukrainienne Antonov-Airlines, dont le siège est à Kiev ; cet énorme avion hexa réacteur, peut emporter deux cent quarante tonnes, son poids total est de six cent cinquante tonnes maxi au décollage.
Dernière minute, sur 5 TV : « Ce 24 mai, le professeur Vladimir Protkine a été assassiné chez lui, dans sa riche propriété, à Simféropol, Crimée. Il a été atteint par trois balles dont une en pleine tête ! Le meurtre remonte à quelques heures seulement, c'est son assistante qui, ne le voyant pas arriver à son cabinet pour ses consultations, a donné l'alerte.» Quelque temps plus tard : « ce spécialiste du cancer, sosie de Vladimir Poutine, très connu pour ses recherches sur les effets de la catastrophe de Tchernobyl était un pro-russe convaincu qui n'avait pas que des amis parmi nos compatriotes ». J'eus une pensée pour le professeur qui soignait Anna, que j'avais rencontré très récemment et avec qui j'avais eu quelques mots, j'eus un frisson dans le dos en apprenant cette terrible nouvelle.
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Presque chaque été Anna eut la chance, si l'on peut dire, de venir passer deux ou trois semaines en Alsace, l'arrivée de l'avion nous comblait d'aise, moi surtout ! Anna était presque aussi grande que moi, la petite blonde du début laissa tout doucement la place à une enfant à la chevelure plutôt châtain avec des reflets auburn, je la trouvai toujours plus belle avec ses petites taches de rousseur, ses yeux qui restaient bleu ciel, une jolie bouche dont une dent était – très – légèrement décalée, un nez fin. Elle était plutôt introvertie, elle est restée un tout petit peu timide ce qui ne veut pas dire qu'elle se laisse « marcher sur les pieds ! ». Elle est svelte, ce qui n'est pas mon cas. Moi je me trouve « pas mal », seuls mes sourcils un peu épais étonnaient un peu quand j'étais enfant pour quelqu'un de type, disons germanique (blond tirant sur le roux avec les années), je n'étais pas du genre très raffiné, me disait-on mais ça ne me touchait pas outre mesure, je n'avais pas (et n'ai toujours pas) une allure très sportive ! Je suis – encore – légèrement timide mais je sais ce que je veux. Je suis de grande taille maintenant.
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Tchernobyl, pour nous les enfants des environs de Ribeauvillé, c'est loin, enfin je veux parler de la catastrophe, bien sûr les plus jeunes d'entre nous n'en ont plus un souvenir bien précis, voire plus aucun, c'est surtout nos parents qui ont été profondément marqués par ce ballet incessant d'hélicoptères MI-6 dont les pilotes et opérateurs chargés de jeter des centaines de tonnes de plomb sur le réacteur incontrôlable seraient voués à une mort certaine. La catastrophe de la centrale nucléaire coûta plusieurs milliers de vies, les autorités soviétiques – tout au moins au début – minimisèrent l'accident mais durent accepter l'évidence et « déporter » si l'on ose dire des milliers d'habitants de Tchernobyl et environs dans des villes qui se trouvaient à des dizaines de kilomètres. N'oublions pas que la Biélorussie et la Russie elle-même furent touchées. La famille d'Anna emménagea à Kiev, ulitsa (rue) Irininskaya. Nous étions trois enfants à la maison, ma sœur aînée Laura, mon frère Théo de deux ans mon cadet et moi. Les premiers jours, en 1993, Anna était complètement perdue parmi nous, ne connaissant pas un traître mot mais les enfants ayant une faculté d'accommodation bien supérieure à celle des adultes, après quelque temps elle faisait déjà partie du groupe. Notre père est employé à l'Office des Eaux et Forêts et lorsqu'il a un peu de temps libre – ça arrive quelquefois – il s'occupe de notre vigne, à l'écart du village, sur la route des vins. Maman est enseignante, elle a beaucoup de travail pour s'occuper de nous trois mais elle est aidée quelquefois par Laura de trois ans mon aînée (avec le temps moi aussi je participe).
L'été suivant, Anna ne put venir, j'en souffris beaucoup, heureusement nous nous écrivions, mes parents ne trouvaient rien à « redire ». La langue ukrainienne ne passe pas pour être une langue facile, je faisais quelques progrès, je me mettais au Russe aussi, très utilisé là-bas, c'est bien différent de l'ukrainien. L'année suivante je l'attendais de pied ferme, elle faillit ne pas venir encore une fois, pour des « problèmes de papiers » mais cela s'arrangea, ouf.
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Le départ
Comme vous ne manquez pas de le savoir, depuis le mois de mars 2014, la Crimée a rejoint le giron de la Russie dont elle avait déjà fait partie. Ce fut un déchirement pour nous, encore plus pour Anna car c'était une partie de sa terre qu'on lui arrachait. Il fallut bien se résoudre au départ vers la mère patrie, Anton avait déjà ses habitudes à l'école élémentaire où il allait terminer sa première année, Alexandr était en maternelle. L'appareil était remisé dans un immense hangar de l'aérodrome de Simféropol ; nous commencions souvent nos missions de transport de fret depuis cette ville, Antonov-Airlines avait une représentation en Crimée. Nous sentions depuis plusieurs semaines que nous n'étions plus les bienvenus, nous les Ukrainiens dans cette république autonome. C'était la fin de l'Ukraine ici. J'ai reçu ce matin un appel de Petro Gorchkov, le CDB (commandant de bord de l'Antonov) qui me dit que nous avions l'ordre de rejoindre Kiev sous quarante-huit heures. Nous avions un logement de fonction ici à Simféropol, nous partirions donc avec nos valises seulement et quelques malles, nos deux voitures seront chargées au maximum ; nous ne nous étions pas préparés à un départ si précipité. L'état de santé de ma chère Anna ne lui permettrait pas de s'investir beaucoup dans nos préparatifs de départ, heureusement nous aurions une aide efficace de la part de notre voisine, Ilona, ukrainienne comme nous, enfin comme Anna. Le grand jour arriva, nous eûmes le cœur serré au moment d'embrasser notre voisine avec qui nous étions très liés (Anna surtout), Ilona ne cacha pas son envie de rentrer chez elle comme nous, son départ était envisagé dans les prochains mois. Chacun au volant de sa voiture nous gagnâmes la zone de fret où nous attendait l'appareil, les membres d'équipage et une partie des employés (qui se sentaient suffisamment ukrainiens pour partir). Il fallut arrimer nos voitures ainsi que celles du commandant et son épouse, tout fut fait en un temps record. L'An-225 n'est pas un avion de ligne, il sert uniquement pour le fret, au transport de très lourdes charges, exemple : des chars ! Comme ceux que nous avons transportés au Mali pour le compte de mon pays de cœur. Le « confort » pour des passagers est un grand mot ! Il ne faut qu'une heure et quinze minutes pour rallier Kiev, heureusement.
- Simféropol airport UR-82060 Antonov-Airlines pour un vol vers Kyiv Boryspil demande autorisation (en ukrainien) - …UR-82060 En russe s'il vous plait !
- I prefer English ! UR-82060
- UR-82060 If you prefer.
- Ask for autorisation (la suite en anglais…)
- La piste en service est la 27, le vent du 260 dix nœuds, rappelez avant entrée de piste.
- Bien compris, UR-82060. Nous quittons le parking à petite vitesse, le commandant Gorchkov est en fonction. A l'entrée de piste :
- UR-82060 pour autorisation de décollage.
- Stand by (attendez), avion en approche.
- Bien compris (plusieurs appareils en approche nous obligent à attendre).
- UR-82060 c'est à vous, (puis un temps…) désolé ! (Il sait que nous partons pour de bon, désolé peut-être mais pas autant que nous). (Nous allons quitter la Crimée, ce 28 mai 2014, il est 17H30, émotion).
Les trois cent cinquante-cinq tonnes de l'Antonov avalent la piste rapidement, il est relativement léger aujourd'hui. Pendant la montée, je scrute l'écran radar par habitude. Soudain deux petits points en arrière sur notre gauche (à 7 heures), je n'y prête pas trop attention mais ce qui m'étonne c'est leur vitesse par rapport à nous (nous sommes à deux cent cinquante nœuds – quatre cent quatre-vingts Km/h environ, c'est sa vitesse de montée), « ils» se rapprochent très vite (plus de cinq cents noeuds). Ils arrivent à notre hauteur, sur la gauche, le commandant les voit mieux que moi, ce sont des Mig 29 (leur silhouette nous est familière). Que nous veulent-ils ? Je ressens comme un malaise, les enfants assis sur des sièges strapontins derrière nous ne sont pas inquiets du tout eux, ils trouvent que ça pimente le vol ! Anna a l'air inquiet aussi. Ce sont des Russes évidemment. Ils ralentissent, se stabilisent à notre vitesse, l'un derrière l'autre, le second plus bas, battent des ailes, ils veulent nous faire passer un message, semble-t-il. Le pilote de l'avion qui est plus proche de nous fait des gestes que nous ne comprenons pas, (le Russe est relativement loin de notre cockpit du fait de la grande envergure), il semblerait qu'il y ait un problème de fréquence radio puis il arrive à nous joindre sur la nôtre et nous n'en croyons pas nos oreilles : on nous enjoint de faire demi-tour sur Simféropol ! Les premières secondes d'étonnement passées, le commandant demande la raison, ensuite il essaie, pour gagner du temps, de faire comprendre qu'il n'entend plus. L'espace aérien ukrainien n'est plus qu'à deux minutes, on nous dit que si nous n'obtempérons pas nous allons être abattus ! (Je ne croyais pas vivre cela un jour) Puis les deux chasseurs s'éloignent en accélérant rapidement vers l'Ukraine, on les voit au loin faire demi-tour et …revenir en fonçant droit sur nous ! A ce moment nous sommes « tétanisés », nous nous rapprochons à plus de huit cents nœuds à la même hauteur, nous n'avons plus le temps d'entreprendre une manœuvre quelconque (eux aussi vont « y rester » s'ils ne changent pas de trajectoire), en fait tout se passe très vite dans notre tête, nous n'avons pas le temps de nous dire grand-chose, vont-ils entamer une ressource (montée brutale) dans les dernières centaines de mètres ? Après avoir tiré une rafale, peut-être ne vont-ils pas tirer ? Puis ce fut une masse de métal énorme qui se jeta littéralement sur nous et nous évita sans que nous ayons compris comment elle y réussit, nous tremblions tous plusieurs minutes après. Nous ne les revîmes plus, nous arrivions sur l'Ukraine. Longtemps nous ferons des cauchemars, le commandant avait été « sonné » comme nous le fûmes, ma femme et moi, les enfants avaient eu leur « dose » d'animation !
A l'arrivée nous ne manquâmes pas de déposer un « air miss » ; l'affaire ne sera pas close pour autant… Nous n'avons nulle part où habiter à Kiev, ce sont encore les parents d'Anna qui acceptent de nous héberger en attendant.
Sur 5 TV, le bandeau en boucle : « urgent, le professeur Protkine assassiné à Simféropol, un pilote d'Antonov-Airlines est suspecté ». Une bombe ! Le père d'Anna me fixe avec insistance, se pourrait-il que je sois le coupable ? Quant à Anna elle n'a aucun doute sur mon innocence, j'en suis certain. Je ne me suis jamais caché d'avoir dit au docteur Protkine ce que je pensais de lui et de ses méthodes, toute ma famille ukrainienne sait que j'ai encore eu dernièrement une altercation au sujet du favoritisme évident que ce spécialiste affichait envers ses malades pro-russes, au détriment des Ukrainiens de cœur. Je comprends soudain : les Mig !
Je suis le suspect n° 1
La chaîne ukrainienne de Crimée (devenue russe) 1+1 affiche en bandeau : « Michel Thur, copilote pour le compte d'Antonov Airlines fait figure de suspect `privilégié' dans l'affaire de la mort du Pr Protkine, sa fuite vers Kiev en fin d'après-midi en fait un coupable idéal ». Et pourtant je sais que je n'ai aucune responsabilité dans cette affaire (mais d'autres ne l'entendent pas ainsi), même aux yeux de ma propre famille ukrainienne, de ma chère Anna peut-être ? Il va falloir que je m'explique (expliquer quoi ?) quant à mes parents, bien sûr ils n'ont aucun doute et me soutiendront. Comment prouver ma bonne foi ? Les apparences sont contre moi, mais pour ce qui est de la fuite supposée, cela ne tient pas puisque nous n'avons fait que répondre aux ordres de notre compagnie qui nous a enjoint de rejoindre Kiev, le commandant ne manquera pas, je le sais, ainsi qu'Antonov-Airlines d'en témoigner. Il est évident que les pro-russes de Crimée ne manqueront pas de saisir toutes les occasions dans le bras de fer qui nous oppose à Poutine, pour nous discréditer. Pour ce soir, après un bon repas, nous nous disons que l'essentiel est d'être entre nous, de nous être retrouvés sains et saufs. Demain nous aviserons.
Tchernobyl a laissé des traces indélébiles chez les soviétiques de la région redevenus après la chute de l'URSS en 1991 Biélorusses, Russes, Ukrainiens ; ma petite Anna, comme il me plait souvent de la qualifier n'a pas échappé ni sa maman, aux retombées, dans tous les sens du terme, dévastatrices due à l'incurie des hommes. Néanmoins mon épouse a réussi à devenir professeure d'ukrainien et de russe ; avant notre départ pour la Crimée, elle a d'ailleurs enseigné ici à Kiev, aux enfants de l'école élémentaire Mykoly Hrinchenka. Son état de santé s'est détérioré pendant notre séjour à Simféropol sans que cela prenne des proportions catastrophiques. Elle se plaignait quelquefois de fatigue en fin de journée, c'est ce qui l'avait amenée à consulter un spécialiste : le professeur Protkine qui avait diagnostiqué une atteinte à la glande tyroïde. C'est ce qui avait conduit Anna à cesser toute activité professionnelle en Crimée quelque temps après notre installation, elle avait enseigné environ un an.
Le lendemain 5TV, chaîne ukrainienne reprend en titre : « Michel Thur, notre compatriote d'origine française, pilote chez Antonov, accusé d'un meurtre par les Russes de Crimée. Ce dernier rentré à Kiev hier nie toute implication dans l'affaire de la mort du professeur Protkine et entend bien prouver son innocence ». Le commandant intervient à la télévision en démentant les allégations faites par les Russes de Crimée qui m'ont accusé de fuite alors que nous n'avions fait qu'obéir à notre employeur de Kiev en revenant ici. Le pouvoir russe de Simféropol me désigne comme coupable et je suis persuadé qu'il ment par pure mauvaise foi, ça fait partie de la guéguerre qui se joue entre les deux antagonistes pro ukrainien et pro-russe : je suis une victime, rien d'autre mais les Russes (cela ira jusqu'à l'échelon le plus élevé du pouvoir) se moquent bien de faire condamner un innocent. J'apprends qu'un mandat d'arrêt international est délivré contre moi, le pouvoir ukrainien (nous avons un nouveau président depuis ce 25 mai) n'en tient pas compte mais en dehors de l'Ukraine, qu'en sera-t-il ? Je suis sûr qu'Anna me croit et qu'elle ne doute pas de mon honnêteté, le fait que son propre père n'est pas entièrement convaincu de mon innocence la fait beaucoup souffrir psychologiquement.
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Nous avons un contrat de transport à honorer envers l'armée de mon pays d'origine : trois automitrailleuses et deux petits chars à transporter en Centrafrique. Nous devons nous rendre à l'aéroport militaire de Villacoublay au sud-ouest de Paris. Nous embarquons, les pilotes, les mécaniciens navigants au complet, en plus des arrimeurs, ce matin du lundi 2 juin, avec une charge de kérosène suffisante pour le vol mais nous devrons compléter les pleins en France. Le départ pour le continent africain est prévu pour le lendemain. Le vol s'effectue sans histoire –RAS- Nous atterrissons à la base militaire de Villacoublay à 11H45, heure française. La visibilité est bonne sur Paris, nous arrivons par l'est de l'aérodrome, juste avant de nous poser je reconnais le parc de Sceaux dans lequel je me suis souvent promené lorsque j'étais enfant et que je venais en vacances chez ma tante Eléonore qui habite cette ville, j'ai l'impression que nous sommes un peu bas (impression trompeuse car nous suivons l'ILS scrupuleusement), c'est moi le pilote en fonction (applique-toi !)
Le colonel commandant la base aérienne 104 vient à notre rencontre en bas de la passerelle, apparemment il sait que l'un des pilotes est français d'origine. Nous sommes, ainsi que tout l'équipage, invités à prendre notre repas de midi avec lui, au mess des officiers. En nous y rendant, le colonel me prend en aparté et me dit que puisque nous sommes membres de la famille aéronautique (et que je suis français de surcroît) chez qui la solidarité n'est pas un vain mot, il croit bon de m'avertir que quelque chose d'important est en train de se tramer contre moi. Je comprends à son air embarrassé qu'il fait allusion au fameux mandat d'arrêt international. Je lui fis part de mon étonnement quant à la dimension internationale, justement, que prenaient les choses. Donc, un différend entre la Russie et l'Ukraine dont l'origine – dans l'affaire qui me concernait en tout cas – relevait plutôt du fait divers, sur fond de règlement de comptes politique certes, était donné en pâture aux pays occidentaux ! (Je me dis que c'était m'accorder beaucoup d'importance). Notre hôte m'affirma qu'il comprenait très bien ma position, il n'y avait pas de doute que l'affaire à laquelle je me trouvais mêlé, malgré moi, était d'origine politique ce qui devait m'inciter à me tenir sur mes gardes. Nous remplîmes notre mission sans encombre et rentrâmes en Ukraine dès le jeudi.
Vendredi 6 juin Poutine serait l'invité de François Hollande pour fêter les soixante-dix ans du débarquement des alliés en Normandie. Le président français sera à l'origine d'un début de rapprochement entre le président de l'Ukraine Pétro Porochenko, nouvellement élu et Vladimir Poutine.
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Jusqu'à présent la particularité du professeur Protkine n'avait pas intéressé particulièrement les médias. On apprend qu'il aimait `un peu trop' les femmes et qu'il avait une tendance manifeste à les forcer quand il n'obtenait pas ce qu'il désirait par la voie du bon sens. Anna insista pour que je mette mes intérêts entre les mains d'un avocat, plus précisément d'une avocate de sa connaissance, qu'elle sait être profondément intègre, c'est une ancienne camarade de l'école élémentaire de Tchernobyl qu'elle n'a jamais complètement perdue de vue, Olga Terechkova. Je me souvins vaguement d'elle après qu'Anna me l'eut décrite un peu plus : dans sa prime jeunesse, elle avait fait le voyage de Ribeauvillé !
Anna m'aide beaucoup dans mon plan de défense : elle est bien placée pour savoir que le professeur a (avait) une réputation bien établie de « brute » voire violeur. - Que veux-tu dire ? Tu m'en dis trop ou pas assez ! - Que vas-tu t'imaginer ? Je veux dire que j'en sais assez sur lui pour avoir à cœur de te soutenir dans l'épreuve que tu traverses. Tu sais, nous les femmes parlons beaucoup entre nous de ces choses-là. Anna veut-elle dire que le docteur Protkine aurait pu être victime d'une femme malmenée qui aurait voulu se venger ? Ce professeur, spécialiste éminent du cancer dans toute l'Ukraine, avait une clientèle composée de patients issus de tous les milieux sociaux mais les personnes d'un `certain milieu' y étaient peut-être un peu plus représentées. Le fait qu'il était un pro-russe est presque anecdotique, en réalité il n'appliquait pas de différence sensible de considération entre ses clients. Recherchait-il davantage une clientèle féminine ? Il est encore trop tôt pour répondre.
Maître Olga Terechkova, en faisant jouer ses connaissances, eut l'idée de s'adresser au ministère des Affaires Etrangères où elle connaissait quelqu'un bien placé et lui demanda s'il lui serait possible de contacter l'ambassadeur de Russie à Kiev au sujet de l'affaire qui avait fait les gros titres des journaux et de la TV ces derniers jours, ceci pour le prier d'essayer d'influencer les autorités judiciaires de Crimée (devenue russe comme chacun sait). Il n'y avait aucune certitude que cela aboutisse avait-il été répondu à Me Terechkova, son interlocutrice néanmoins reconnaissait le bien-fondé de cette demande. Elle avait comme tout le monde, ici à Kiev, entendu parler de ce fait divers tragique. L'ambassade de Russie « tourne au ralenti » si je puis m'exprimer ainsi, dit madame Patrochenka car il n'y a plus d'ambassadeur de Russie ici mais Poutine, suite aux bonnes relations qu'avaient liées les deux présidents : le Russe et Porochenko au château de Bérouville ou Bénouville ? en France, envisage d'envoyer un ambassadeur russe en Ukraine. Madame Patrochenka invita Me Olga Terechkova à patienter un peu jusqu'à l'arrivée du nouvel ambassadeur russe.
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Revenons au professeur Protkine qui a perdu la vie tout récemment victime d'un règlement de comptes peut-être politique mais plus vraisemblablement lié à ses pratiques douteuses envers ses clientes. Les langues se délient à Simféropol et dans toute la Crimée, on en rajoute sûrement un peu. Avec le temps ce n'est plus dans les médias qu'on s'étale le plus sur ses « exploits » ou prétendus tels mais c'est plutôt la rumeur qui prend le relais. Anna s'entretient presque chaque jour avec Ilona restée en Crimée (plus pour longtemps). Cette même jeune (et belle) femme a déjà rencontré ce docteur ; comme beaucoup de personnes exposées au nuage radioactif, elle a consulté plus par inquiétude que par absolue nécessité. Ilona a utilisé le terme «attouchements » avec Anna, le monsieur n'a pas persisté, notre amie ne lui en a pas offert la possibilité, il est vrai, elle consulte maintenant un autre spécialiste tout aussi réputé dans sa partie et uniquement focalisé sur sa spécialité !
Mon avocate m'a appelé ce matin pour me dire où en est mon affaire, madame Patrochenka du ministère des affaires étrangères a pu s'entretenir avec l'ambassadeur de Russie en personne (elle avait pris soin d'enregistrer la conversation ce qui est à la limite de l'irrégularité) et Monsieur l'ambassadeur lui a tenu ces propos : « nous avons de bonnes raisons de penser que ce n'est pas Michel Thur l'assassin du professeur, mes compatriotes de Crimée ont seulement voulu donner une leçon à ce jeune monsieur en le dénonçant comme meurtrier car ils ont estimé qu'il s'était comporté d'une manière inappropriée envers une sommité du monde médical en l'apostrophant comme il l'a fait ». Son assistante avait témoigné avait-on appris par la suite. L'ambassadeur ajouta que nous ne pourrions pas apporter la preuve de ce qu'il avait déclaré. Là il se trompait lourdement ! Maître Terechkova jubilait et moi aussi… Le lendemain la presse faisait ses « choux gras » de cette information.
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N'avions-nous pas crié victoire trop tôt ? La réponse de Crimée ne se fit pas attendre, les Russes pas contents du tout vont demander aux instances judiciaires d'Ukraine, à Kiev, de lancer une procédure de perquisition chez nous ce qui semblait être en contradiction avec les propos de l'ambassadeur. Quel étonnement lorsque nous vîmes débarquer les policiers qui nous surprirent au saut du lit un samedi très tôt en exhibant un mandat de perquisition. Ils se contentèrent de me demander mon arme et me dirent que si je coopérais cela leur éviterait de tout retourner dans la maison (je tombe des nues). Comment avaient-ils obtenu mon adresse ? Tout est un peu en désordre dans notre logement provisoire chez les parents d'Anna, je ne manque pas de dire aux policiers que nous sommes dans un logement de dépannage et qu'il faut que je cherche un peu ou est mon pistolet (arme de petit calibre que mon père m'avait laissée en me disant que je pourrais peut-être en avoir besoin un jour « avec le métier que tu exerces »). Enfin, Anna le trouve dans une caisse, ils s'en emparent aussitôt, extraient le chargeur et là : surprise ! Il manque quatre balles, je ne me souviens pas l'avoir utilisé un jour, je suis plutôt mal, je regarde autour de moi, Anna n'a pas son air des meilleurs jours. - Avez-vous une autre arme ? - Non Ils ne seront pas restés très longtemps, une demi-heure plus tard ils repartent (après m'avoir délivré un reçu !) Ils ne manquent pas d'ajouter que nous devons rester à la disposition des autorités. J'ai appelé Olga Terechkova aussitôt après leur départ. Mon avocate m'assure qu'elle ne savait rien de cette décision de perquisition.
On m'en veut. Une chose m'étonne, pourquoi m'ont-ils demandé si j'ai une autre arme ? Il ne se passe pas un jour sans une nouvelle révélation sur l'affaire Protkine. Ilona nous rapporte que le professeur avait une vie sexuelle mouvementée, on saura tout sur ses travers, on n'hésite plus à déballer : il était bisexuel (dans nos pays de l'est tout ce qui n'est pas dans la norme est décrié). C'est un quadragénaire, bel homme, célibataire, c'est un « tombeur » de femmes mais il ne dédaigne pas les hommes, c'est une surprise ! On dit qu'il s'en passait des choses chez le professeur Vladimir Protkine, nombre de ses patientes et patients venaient consulter pour de toutes autres raisons que celles qu'on s'attendrait à trouver lorsqu'on pénètre dans le cabinet d'un cancérologue. Les langues se lâchèrent : les jaloux, les refoulés, les nationalistes ukrainiens s'en donnèrent à cœur joie après son décès (jamais celles ou ceux qui avaient bénéficié de services particuliers, cela va de soi). Et de préciser : vous savez, ces petits bruits étouffés, pas toujours d'ailleurs, qui faisaient penser à une activité toute autre que celle qu'il est d'usage d'imaginer, « vous voyez ce que je veux dire » au cas où l'on n'aurait pas compris ! J'achète la presse aussi bien « russe » qu'ukrainienne, celle de Kiev et celle de Crimée, jusqu'à ces derniers jours je m'étais abstenu de le faire mais maintenant il faut que je suive l'affaire du Pr Protkine qui est aussi un peu la mienne.
Maître Terechkova m'incite à lui donner un maximum de détails sur mon pistolet 6,35 et ses aventures car apparemment ces temps-ci il a changé de mains. Elle propose que nous ayons tous les trois un entretien constructif ; Anna n'a pas de craintes à avoir, elles sont d'anciennes camarades de classe.
Le 16 juin 2014 dans son cabinet Me Terechkova s'adressant à Anna : - Les Russes de Simféropol ont déclaré que c'est l'arme de ton mari qui a servi au meurtre
Anna : - Je ne vois pas comment ils peuvent affirmer cela, bien sûr le fait qu'il manque quatre balles dans le chargeur n'est pas à notre avantage…c'est vrai que j'ai prêté cette arme à une amie qui m'a dit avoir été violentée lors d'une consultation chez ce …comment, ce monsieur, ce porc, je n'ai eu aucune peine à la croire puisque j'ai moi-même subi des comment dirais-je, attouchements.
Moi : - Tu ne m'en as jamais rien dit. (je découvre)
Anna : - Il y a des choses que nous préférons taire nous autres pour la, disons le mot, la paix. Pour les balles manquantes, elles auraient pu être tirées pour s'exercer par exemple.
Moi - Il n'a eu que ce qu'il méritait !
Me Terechkova : - Je suis de votre avis mais il va falloir que nous préparions notre défense. Donc tu as prêté ce pistolet dis-tu, as-tu eu l'envie de t'en servir toi-même ? Ce n'est pas un interrogatoire de police mais il faut que j'essaie de comprendre.
- Je l'ai prêté car l'idée de m'en servir moi-même n'a fait qu'effleurer mon esprit, j'ai tout de suite rejeté cette éventualité. La personne à qui je l'ai confié ne l'a peut-être pas utilisé, en réalité c'est ce que je souhaite…Je n'arrive pas à comprendre comment ils peuvent étayer une accusation. - L'arme va être examinée je suppose (je ne suis pas du tout une spécialiste des armes, ajouta l'avocate) Il paraît qu'on compare les douilles retrouvées sur les lieux du crime, si on en retrouve, avec celles tirées lors de l'examen.
- A qui l'as-tu prêtée ?
- Tu ne la connais pas, je m'en veux de ne pas t'en avoir parlé avant. - Les résultats d'analyse du pistolet devraient m'être adressés, combien de temps cela va-il demander ? La police nationale les recevra avant moi bien sûr, je ne sais pas quelle tournure cela va prendre, j'avoue que c'est la première fois que j'ai à défendre une affaire criminelle, même si vous n'êtes pas concernés. Il faudra que tu m'en dises un peu plus ajouta-t-elle à l'intention d'Anna, notamment sur la personnalité de la dame dont tu parles, je te rappellerai dans deux ou trois jours, avant de contacter les enquêteurs de Simféropol. J'ajoute ceci avant que nous nous séparions : « puisque la Crimée est maintenant un territoire étranger, en quoi sommes-nous tenus d'obtempérer aux ordres de la Russie ? » (bonne question). Olga me répond que nous avons tout intérêt à nous montrer coopératifs, nous ne manquerons pas d'exploiter l'enregistrement de l'ambassadeur au cas où. En fait nous ne sommes pas si mal pris que cela car si on se réfère à ce qu'il a dit on peut considérer qu'ils n'auront certainement pas beaucoup de charges contre nous.
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Protkine était le sosie de Poutine, cela lui a amené quelques désagréments. Notamment lors d'un meeting politique dans les rues de Sébastopol, le port de la Mer Noire, en Crimée, qui était déjà pratiquement russe avant l'intégration (ou réintégration) à la Russie au mois de mars dernier. C'est là que la flotte russe de la Mer Noire possède la plus grande base navale orientée au sud. Protkine, donc, en appelait au retour de la Crimée au sein de la mère patrie russe, c'étaient ses propres mots, il avait été pris à partie par des Ukrainiens nationalistes. Le fait d'être la réplique de Poutine aurait-il pu être à l'origine de son décès ? Il y eut un double meurtre dans cette affaire car il s'agit bien de la même : celui du docteur Protkine et celui de Victor CKBopono qui n'est autre que le mari d'Ilona, on sait que Victor (qui est ukrainien comme sa femme) était un sous-officier de la base russe de Sébastopol, il n'y a rien d'étonnant à cela, c'est un « reste » de l'Union soviétique. Victor avait une dizaine d'années de plus qu'Ilona ; son retour vers Kiev était envisagé dans les mois à venir mais son destin sera tout autre. C'est plus d'une fois que nous entendîmes des scènes de ménage chez nos voisins Ilona et Victor, l'ambiance du foyer n'était pas au beau fixe. Une expression revenait quelquefois dans la bouche d'Ilona : « j'aime les hommes, les vrais ! »
Ici en Ukraine l'affaire Protkine ne fait plus la une, quelquefois un entrefilet de quelques lignes, le dernier titre en date : Protkine était un bi ! La presse de Crimée, que nous avons de plus en plus de mal à nous procurer à Kiev, est plus prolixe : « le Pr Protkine et la base navale » en titre, où l'on peut lire que des sous-officiers pour la plupart mais aussi des officiers ne dédaignaient pas les séances de soins de ce spécialiste émérite… Quelques jours plus tard, toujours dans la même presse : « des révélations sur l'assassinat » où l'on apprend que Victor CKBopono serait le meurtrier et qu'ainsi Michel Thur l'Ukrainien rentré précipitamment à Kiev serait mis hors de cause. Je reçois cette nouvelle, vous vous l'imaginez aisément, avec soulagement (enfin on reconnaît mon innocence !) Le journaliste ajoute qu'Ilona avait mis fin aux jours de son mari le 26 mai, ceci par jalousie, c'est ce qu'elle déclara aux enquêteurs car elle était amoureuse du docteur ; elle ne fit pas mystère que son mari aimait plus les hommes que les femmes et que la jalousie morbide de Victor envers le médecin l'avait conduit à commettre l'irréparable : il l'avait tué. Me Olga Terechkova m'apprit ce que je savais déjà : que je n'étais plus le coupable car les balles de mon 6,35 avait été tirées par Ilona sur son mari parce qu'il avait tué Protkine, avait-elle encore dit. Les balles qui avaient tué le professeur provenaient d'un pistolet 7,65. Je comprends maintenant pourquoi les flics m'avaient demandé si je possédais une autre arme.
Les nombreuses déclarations contradictoires d'Ilona précipitèrent sa mise en accusation : elle avait d'abord dit qu'un officier russe (bisexuel aussi) avait tué Protkine par jalousie puis son mari pour la même raison ! Anna se vit bien obligée d'avouer que c'était à Ilona qu'elle avait prêté le pistolet. Il y a fort à parier qu'Ilona restera encore longtemps en Crimée. Il ne faut pas être un fin limier pour comprendre que c'est elle qui a prévenu les autorités juste avant (ou après) notre départ de Simféropol. C'est encore elle qui a fourni notre adresse aux policiers. Nous aurions pu faire, Anna ou moi, un coupable idéal. Donc ce n'est pas Victor qui a tué le professeur mais un autre militaire, un « vrai » russe celui-là, officier de la base de Sébastopol (on fit état d'un amant jaloux !) Là l'enquête ne fait que démarrer et nous ne sommes plus concernés.
Ilona avait eu peu de temps pour tuer son mari, la seule arme dont elle disposait était mon pistolet prêté par Anna et il fallait que nous repartions avec le 6,35 dans nos bagages, il était hors de question que le pistolet reste à Simféropol, (Ilona le glissa dans une caisse en aidant à nos préparatifs de déménagement). Elle savait qu'elle ne pouvait pas utiliser le pistolet de son mari car ce dernier n'avait pas d'arme à disposition en dehors de la base navale, rappelez-vous : il était sous-officier, seul un officier pouvait « sortir » son arme de service ; Ilona ne l'ignorait pas comme elle n'ignorait pas que Victor était innocent de la mort de Protkine. Notre « amie » n'a pas hésité à nous désigner comme coupables (l'un ou l'autre aurait pu faire l'affaire) de la mort du professeur Protkine car il manquait quatre balles à mon pistolet 6,35, (elle savait que j'avais eu une altercation avec le professeur) elle a saisi cette opportunité, c'est tout. L'assassinat de son mari, selon elle, pouvait être un crime parfait mais elle avait un côté « simpliste » qui ne lui avait pas permis de saisir la différence entre les effets d'un tir de 6,35 et d'un tir de 7,65.
En 2010, jdans un cadre professionnel, 'ai visité un Antonov 124-100 "Rouslan, code OTAN Condor", le 2ème avion plus grand porteur qui a effectué un transport spécial pour la société qui m'emploie.
· Il y a plus de 10 ans ·J'ai été étonnée de la liberté de photographier tout ce qui m'intéressait ... avion vraiment impressionnant
akhesa
Merci d'avoir lu mon texte, en effet ces Antonov sont vraiment impressionnants.
· Il y a plus de 10 ans ·Allain Louisfert