WAITING IN VAIN

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     Dans un monde dans lequel tout va particulièrement vite – fast food, fast-pressing, fast and furious, fast-baise,…- on est désappointé voire carrément énervé quand on attend plus de 10 minutes à la Poste (ah non pardon, mauvais exemple !). On vous livre des préservatifs sur mesure en moins de 24h, et une pizza tiède en moins de 45min. D’un autre côté, on savoure d’avantage la réception de notre recommandé made in la banque que la « dégustation » de notre hot-dog. A priori, vous vous dites que je me goure complètement, mais comparez un peu le temps que vous mettrez à vous remettre de l’un, et de l’autre… vous voyez! Néanmoins, il ne s’agit là que de choses matérielles. Qu’en est-il pour les sentiments ? On se dit parfois qu’on aurait mieux fait d’attendre pour montrer notre pleine lune si l’inverse permettait de décrocher la lune de miel. Et que serait une relation sans ses interminables stagnations devant le téléphone ! En amour, doit-on carburer ou adopter une conduite moins nerveuse ? L’attente est-elle le moteur d’une relation ?

     Lundi soir, au Beuret (et non pas « beurré » ou « bourré », je vous en prie !), un sympathique bar d’habitués, où je retrouve mes trois copines M., J. et V. On se raconte nos folies du week-end, on organise nos sorties de la semaine et découpe des brochettes de mectons à la marinade d’herbe. J. irradiait notre table (et même peut être celle de derrière !) de son bonheur parfait avec T. Et nous autres, pauvres mortelles privées de la compagnie d’un dieu d’1m90, à la voix graves et aux manières chevaleresques d’un autre temps (venir jusqu’à Montparnasse avec un bouquet de fleur pour s’excuser d’avoir eu la gueule de bois, quand on habite à Montreuil, c’est digne d’un Ulysse traversant la Méditerranée pour vérifier les travaux d’aiguilles de sa belle !) menions toujours bataille.

   On en vient à parler de mon nouveau coup de cœur émotionnel : M., 26 ans, gentleman (pas encore fucker à l’heure où je vous parle),  un physique de rugbyman, enfin handballeur, pour être exacte, mais les faits et les cuissots durs comme ….une balle de hand( !) sont là ! Nous étions sortis deux fois ensemble, et au deuxième rendez-vous, après un dîner au cidre et des regards langoureux à la lueur du briquet, j’acceptais de passer la nuit chez lui. Et là…ça a fait des Chocapics ! Plaidoirie défendable, me direz-vous, mais pas pour mes trois juges. Le verdict tombe : j’ai fauté gravement ! Jamais au grand jamais on n’accepte de mettre du chocolat dans du papier d’alu si vite avec quelqu’un qui vous plaît ! Cette règle, vous la connaissez bien. Elle descend en droite ligne du sacro-saint « on-ne-couche-pas-avant-le-mariage ! » hérité de vos aïeux (et aussi un peu peut-être de la religion catholique). Mais à y bien regarder, les enjeux sont-ils vraiment les mêmes ? Que peut-on réellement espérer d’un tel sacrifice (et oui, ça en est un ! Ne faites pas votre Sainte-Nitouche !) L’espoir fait vivre ! Et quand on vient de passer 12h d’affilée, les yeux rivés sur l’écran 40 000 couleurs de notre téléphone dernier cri- qui doit d’ailleurs, c’est certain, présenter un problème de réception pour les appels et les SMS- on se dit qu’il nous fait même frôler la folie. Pour J., qui avait attendu une semaine pour embrasser T., il était clair que la méthode faisait ses preuves. Cela dit, dans sont cas, c’est d’abord T. qui a fait sa cour, dans l’espoir de récolter un peu plus que des billes œil-de-chat. Dans le cas de M., sa plus longue histoire avait également commencée par une approche « en douceur », à coup de roses, de smacks, et de discussion à quatre sur un lit. Cela dit, dans le cas d’un duo, et non d’un quatuor, on peut se demander si la mélodie n’aurait pas été tout autre…

   D’un côté, on nous dit que l’attente ne fait que renforcer l’envie et les sentiments, de l’autre que la spontanéité est la base de toute relation amoureuse. Une tension se rompt avec le trempage des céréales dans le lait, tout se ramollit… Mais se créer alors quelque chose de nouveau : du lait au chocolat ! Et puis il faut bien tester la marchandise ! Confère le nombre de paquet de muësli entamés et abandonnés entre deux paquets de Jordan’s aux pépites de chocolat. Pour plagier les membres des sites de rencontre, il semble qu’il s’agisse bien d’une « question de feeling », non de « timing ». And you know what ? M. m’a envoyé un texto ce matin ! Pour me demander ce que je faisais, à 7h33, alors que je suis en vacances. C’est-y pas mignon ?

     Et puis de toute façon nous, ce qu’on préfère, c’est la surprise bien cachée au fon du paquet de Chocopop’s…. Encore le dragon cracheur de feu, ou le prince charmant avec épée magique intégrée ?

    

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