Zoé en veut un Max ! Chap 4

Chapitre 4

Steve le gentleman du barreau a réglé l'adition. C'est très gentil à lui, mais toujours un peu gênant je trouve…Je ne voudrais pas qu'il pense que je profite et je ne voudrais pas non plus me sentir obligée de lui exprimer toute ma gratitude sous la couette…Ceci dit, restaurant payé ou pas, lui j'en ferai bien mon dessert quoi qu'il en soit !

En attendant, on marche tranquillement, Boulevard Haussmann ; la nuit est tombée depuis un bon moment, le vent se lève doucement. Steve me parle…J'aime les hommes qui ont de la conversation et j'adore le son de sa voix…

Il n'empêche que je ne l'écoute déjà plus…Chaque pas nous rapproche de l'appartement de mon frère Eric, qui Dieu merci est absent pour quelques jours…et j'ai le double des clés, je suis chargée d'arroser les plantes pendant son séjour aux iles Grenadines, ça tombe bien…Mais je panique un peu tout de même. Et surtout, je me sens honteuse et mal à l'aise lorsque je repense à toutes ces sottises que j'ai racontées tout à l'heure ! Mince, pour notre première rencontre ! Ce sera certainement la dernière, et pour une fois ce ne sera pas ma demande… ☹

Non mais moi, une infirmière qui vit Boulevard Haussmann, qui fait un 38 en se nourrissant de façon équilibrée et BIO et qui adore porter des jeans décontractes !!!!!

Moi, la nana au QI médical plus élevé que Wilson le « véritable » médecin, et d'ailleurs même chef de service tant qu'à faire…J'en reviens pas de ce que j'ai pu lui dire !

Moi, la fille super bien dans sa peau qui adore s'acheter des robes élégantes et hors de prix pour ses sorties à l'opéra…Pffff dans mes rêves oui !

J'ai tout de même un sacré train de vie pour une simple infirmière, non ? Mais bon, c'est vrai, j'oubliais que je suis la fille d'un riche homme qui travaillait dans la finance et que mon appartement situé à quelques pas n'est autre qu'un cadeau d'anniversaire familial pour mes 30ans…. Qu'est-ce qu'il y a de pire ? D'avoir menti aussi sur mes origines ou de lui faire croire que j'ai 30 ans ?

Ha mais s'il parle de moi à Ambre elle croira que j'ai envoyé une autre fille à ce rendez-vous !! Elle lui expliquera que non, Zoé est au chômage, Clos des Noyers, à Noisy-Le-Grand, chez maman-papa, accroc aux fringues taille 40 et frustrée de ne pouvoir se permettre ses achats rêvés, gourmande à souhait……..et menteuse à présent ! Bon sang mais dans quel pétrin je me suis fourrée ??? Je suis foutue, tout simplement foutue…

Nous y voilà ; 100 boulevard Haussmann.

Splendide architecture comme le souligne très justement Steve.

Je me sens seule au monde et ne sais pas comment me débarrasser de lui sur le palier de la porte, d'autant plus que je n'ai aucune envie qu'il s'en aille….

De toute façon il propose de me raccompagner vraiment jusque dans mon appartement et pourquoi pas boire un dernier verre ensemble…

Le gaillard en costume me sous-estime certainement dans ma naïveté…Mais ça fait partie du jeu de séduction….Laissons-donc aux Mâles leur place de mâle et laissons-les croire qu'ils maitrisent la situation ! OK pour un dernier verre…De toute façon, moi ça fait 3 bonnes heures que je ne maitrise vraiment plus rien !

Nous montons donc jusqu'à l'appart de mon frère, mais pour ce soir et uniquement ce soir, cet appartement est officiellement le mien !

Après tout, pourquoi j'angoisse ??

De 2 choses l'une :

soit ce mec je ne le reverrai plus jamais de ma vie, j'aurai donc simplement passé une belle soirée en charmante compagnie, à savourer un succulent repas dans un cadre agréable et à me sentir revivre et être quelqu'un pour quelques heures…autant en profiter encore un peu dans ce cas…

soit on va vivre une histoire ensemble et j'aurai tout le temps de vite me trouver un appart bien à moi et mettre Ambre dans la combine ! Peut-être même qu'Eric me prêtera son domicile quelques fois, en attendant ?? Je pourrai tout à fait me fâcher avec Papa qui sera désireux de me retirer ce beau cadeau immobilier et me couper les vivres ! D'ailleurs comme un malheur n'arrive jamais seul, je serai licenciée….Ben oui, la jalousie de Wilson aura eu raison de ma carrière et la pauvre Zoé se retrouvera sans un sous, sans un toit…Steve sera si amoureux de moi qu'il ne prêtera aucune attention à mon rang social, il sera même touché par mes misères et m'aidera même dans mes recherches au Pôle Emploi !

Triste de ces épreuves familiales, financières et professionnelles, je me serai rabattue sur la nourriture, en passant du coup d'un 38 de top model à un 40 de femme voluptueuse et toujours tout aussi charmante ! Facile en fait !

 Mes amis me surnomment souvent le « chat noir » en référence à mes poisses légendaires…En attendant, tel ce félin, je peux toujours retomber sur mes pattes d'une manière ou d'une autre ! Carpe Diem…

 Dernière possibilité, tout bien réfléchi : cet homme est le bon ! Dans ce cas là, son amour sera inconditionnel et je pourrai donc tout lui avouer prochainement et ne plus faire semblant !

Non seulement il ne m'en voudra pas, mais en plus il sera touché de savoir que j'ai agi ainsi pour lui plaire… Nous en rirons tous les deux enlacés tendrement dans les bras l'un de l'autre.

 En attendant, retour à la réalité ! Je suis bel et bien sur la pallier avec ce beau brun. Nous entrons. Steve est émerveillé devant la splendeur de l'appartement ; il faut dire que mon frère a beaucoup de gout…Enfin sa copine Sarah surtout est très soigneuse et douée pour la décoration et le rangement : on dirait un appartement témoin !

Avec sa cuisine spatieuse et moderne, son couloir étroit mais raffiné, et sa salle de bain en marbre beige…Le parquet du séjour craque sous nos pas, tandis que Steve reste ébahi devant tant de belles choses : tapis persan, vases de Murano, fauteuils en cuir, rideaux de soie, il parait…

Je me sens chez Eric comme chez moi en quelques secondes à peine ! Enfin sauf quand Steve me réclame à nouveau son dernier verre et que je ne retrouve pas tout du 1^er coup dans les placards ! La honte !

« J'ai emmenagé récemment, et je change souvent les choses de place en attendant d'être sûre de trouver la bonne !! » lui dis-je, avec un ton le plus naturel possible.

 Steve regarde partout, sur le buffet trône une photo de famille, Eric et moi avec nos parents.

« Qui est-ce ?  m'interroge-t-il.

Oh, mes parents. Et Eric, mon grand frère (et sans mentir !)

C'est bien d'avoir une photo de famille ! c'est important la famille. Le reste de la déco est splendide aussi, je vois que tu apprécies Claude Monet toi aussi, dit-il en regardant le tableau à sa gauche….

 Ouhaou je ne savais même pas que c'était une reproduction de Monet ce truc au mur…Et je viens d'ailleurs d'apprendre que Monet se prénommait Claude…

« Le bassin aux Nymphéas » ! S'exclame-t-il, toujours fasciné devant l'œuvre gigantesque du salon… 

« - J'adore…Le pont japonais au dessus des jardins méditerranéens…Simplement magnifique. Quel talent ! Sais-tu Zoé qu'il est exposé au Musée d'Orsay. Mais sans doute y étais-tu déjà voir l'original ? !

- Evidemment ! Tu prends des glaçons ? » 

Nous passons ainsi encore une heure agréable dans l'appartement à discuter.

Il me récite la biographie de Monet, de son véritable prénom Oscar…Et les nymphéas par ci, et Les Peupliers par là…Sa naissance à Paris, sa vie au Havre, la pétition qu'il a signé au côté de Zola dans l'affaire Dreyfus….Je pourrais l'écouter des heures !

Il rit seul d'une confusion faite par l'un de ses confrères, qui, en parlant du fameux peintre, l'a appelé Edouard et non Claude…De toute évidence, nous n'avons pas l'humour en commun !

Il enchaîne sur ses loisirs, ses vacances au ski et ses goûts en matière de restaurant, ou des anecdotes d'étudiants lorsqu'il était en fac de droit avec Ambre…

Comment rebondir ? En lui racontant le jour où les Assedics se sont trompées dans mon dossier ou en lui montrant les photos de mon téléphone sur lesquelles je suis en camping avec les copines ?

Alors du coup, de mon côté je m'entends encore lui raconter des anecdotes du travail, comme celle avec ce pauvre enfant en larmes avec un bras cassé que j'ai soigné le matin, ou cette pauvre mamie que j'ai accompagnée lors de son dernier voyage au bout de la vie. Je me plains gentiment de ces horaires difficiles d'infirmière ! Je me fais halluciner moi-même. Bienvenue dans la vie imaginaire et théâtrale de Zoé : du grand n'importe quoi ! Mais je me plais bien dans ce rôle finalement et je suis plutôt douée pour l'improvisation je trouve…

« _ Un dernier café avant de partir ? Je lui demande.

Non merci, mais plutôt un premier baiser… » me répond-il en s'approchant doucement de moi.

Hmm, aussi chaud et excitant que le café ! Ce fût un moment extraordinaire, ce premier baiser. Tendre, ferme et romantique à souhait ! C'est comme si le temps s'était arrêté et nous n'étions plus que nous 2 sur Terre…La douceur de ses lèvres, la fermeté de ses mains sur mon visage, et son parfum sensuel….

Je n'ai cessé de me remémorer cet instant magique pendant un long moment après qu'il soit parti, en véritable gentleman, comme promis.

Et depuis je n'arrête pas de penser à cet homme, son charisme, son parfum, son baiser…Je l'adore déjà !

On doit se revoir demain au déjeuner, dans une brasserie : « La Maison Blanche ». 

Pratique pour ma pause repas, puisque située non loin de l'hôpital où « je travaille » évidemment…

Ce n'est pas le moment de me soucier du lendemain…Il est tard et je suis fatiguée.

Une bonne douche et lit bien douillet m'attendent ! J'ai décidé de rester dans l'appartement du frangin : la chambre d'amis m'y est souvent consacrée !

J'y passe une nuit agréable, bercée par ses beaux souvenirs et ces désirs de vie normale avec un beau métier et un chez-moi magnifique…Nuit agréable mais vite écourtée par la sonnerie de mon portable : zut, Maman !

« Allo ? Maman ?

- allo ma chérie, mais où est tu, papa et moi nous faisons un sang d'encre !

- euh, je dors chez Eric, dans son appartement, j'ai les clés, je suis venue…arroser les plantes…et puis je suis restée…oui je vais bien, rassurez-vous…désolée…j'aurai dû vous prévenir…je sais…excusez-moi…tout va bien je te l'ai dit…mais Maman…mais … ok bonne nuit…oui à demain…enfin à tout à l'heure, j'ai bien compris… »

J'adore ma mère mais pour tout vous dire elle me gonfle bien souvent et me materne beaucoup trop ! Elle est angoissée de nature et s'inquiète encore dès que je découche, à mon âge ! J'ai 30ans rappelons-le…et une bonne trentaine de mois…

Vivement mon travail, mon salaire et mon appartement ! Mais il faut bien avouer que la conjoncture actuelle, la crise, le travail précaire, les bas salaires, l'inflation, le prix de l'immobilier…whaou, je prie tous les soirs pour que le miracle se produise…mais comment font les gens ?? Ils achètent de grandes maisons, partent en vacances avec leurs 2enfants et leur chien, et moi et bien moi je n'ai même pas de quoi le nourrir ce chien !

Pauvre de moi, je ferai mieux de me rendormir, il faut que je sois fraiche et dispo pour mon RDV avec Steve à la brasserie de la maison blanche tout à l'heure.

Et me revoilà partie au pays de Morphée, où tout n'est que repos et songes ; où l'on rêve sa vie au lieu de vivre ses rêves…me voilà endormie profondément pour quelques petites heures…