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Trois jours s'étaient écoulés depuis que Liam l'avait rejoint chez elle. Trois jours à se retrouver chez elle chaque soir. Tous les deux allaient travailler, chacun de son côté, et se retrouvaient le soir dans l'appartement de la jeune femme. Elle avait même commencé à glisser une clé sous le tapis de l'entrée ; afin d'éviter que Liam soit, un soir, coincé devant la porte parce qu'elle-même avait fait une course avant de rentrer.
Trois jours qu'elle se réveillait aux côtés de Liam chaque matin, et ça ne faisait que la rendre plus heureuse encore. Ils avaient largement eu le temps de s'habituer à la présence de l'autre, malgré les jours qu'ils avaient dû passer à distance à cause de la charge de travail de chacun.
Ce matin-là, elle se réveilla d'elle-même, lorsque son corps avait terminé de récupérer des folies de la veille. Et peut-être un peu à cause de Liam, qui créait de dessins invisibles sur sa peau du bout des doigts. Elle frissonna et tira davantage sur la couverture pour la remonter jusque dans son cou. De ce fait, elle avait recouvert toutes les parties de son corps sur lesquelles Liam pourrait « dessiner ».
Adèle gardait les yeux fermés ; elle voulait profiter de ce moment encore un peu. Les trois derniers matins, ils avaient dû se dépêcher de partir travailler, et rester en boule dans le lit n'était donc pas possible. Aujourd'hui, néanmoins, elle avait envie de profiter d'un moment au chaud avec Liam, et dans le calme.
- Bonjour, chuchota-t-il, en glissant un bras par-dessus son ventre.
Elle ouvrit un œil, puis l'autre et s'étira un petit peu. Elle fit en sorte de ne pas découvrir ses membres tout en les tendant aussi fort qu'elle le pouvait. Elle sentait le regard de Liam sur elle et roula sur le côté pour lui faire face.
Même si elle se trouvait encore à une certaine distance de lui, elle sentait son corps irradier de chaleur. Elle qui avait toujours froid, se réveiller à côté d'une bouillotte lui faisait un bien fou. Il y avait, en général, toujours un moment dans la nuit où elle commençait à avoir froid, mais pas ces trois dernières nuits. Liam avait partagé sa chaleur avec elle, sous la couette, et elle n'avait donc pas eu besoin de s'enrouler dedans.
- Bonjour.
Elle frotta son nez froid contre son cou et il l'attrapa dans ses bras pour la coller contre lui. Elle se laissa faire, trop heureuse de le serrer contre elle, d'être immergée dans son odeur et sa chaleur. A chaque fois qu'elle se trouvait contre lui, elle se demandait comment elle avait pu se passer de cette sensation jusqu'à présent. Elle aimait sentir son cœur battre sous sa tête et sa peau frémir sous ses doigts.
- Quel est le programme aujourd'hui ? Demanda-t-il, le visage dans ses cheveux.
- Aucun. Les programmes c'est bon pour les jours travaillés ; les dimanches, eux, sont là pour changer de la routine. Qu'est-ce que tu as envie de faire ?
Il leva la tête pour réfléchir et elle leva elle aussi son visage pour le voir faire. Elle aimait voir son visage se transformer au fur et à mesure de ses réflexions et sa bouche se tordre quand il hésitait entre plusieurs choix. A cette pensée, elle se dit qu'elle avait dû beaucoup l'observer pour reconnaitre aussi aisément le cheminement de ses pensées.
Adèle quitta ses bras et s'extirpa avec difficultés du lit. Sous la couette, il faisait chaud alors qu'au dehors, l'atmosphère était pratiquement glaciale. Elle s'étira amplement et s'emmitoufla dans des vêtements chauds. Liam la regardait, encore allongé, et il se demandait comment il avait pu vivre si près d'elle pendant si longtemps, sans jamais la rencontrer.
- Pour commencer, un bon petit déjeuner !
Elle disparut dans la pièce d'à côté pendant que Liam prenait le temps de sortir du lit.
Ils n'avaient pas fait de courses particulières le jour d'avant, alors le petit déjeuner fut rapidement choisi : du pain grillé, de la pate à tartiner ou du miel, et du jus de fruit en bouteille. Elle fixa son butin avec un air désespéré ; le jour où elle avait passé la nuit chez Liam, il avait de quoi préparer un petit-déjeuner de haut niveau. Malheureusement, ils devraient se contenter de ce qu'elle avait dans ses placards.
Lorsqu'il la rejoignit dans la cuisine, elle lui adressa une moue désolée et lui expliqua qu'elle ne pourrait pas lui préparer un petit-déjeuner de prince. Mais, malgré le peu d'ingrédients qu'elle avait dans ses placards, il réussit à rendre le repas plus joyeux.
Ils engloutirent rapidement leurs tartines en regardant un dessin animé, avachis sur le canapé. Le dimanche, elle aimait rester devant la télé jusqu'à tard dans la matinée et ensuite seulement elle commençait à se préparer pour la journée. Paradoxal, puisque la moitié de sa journée était passée devant la télé.
Elle rassembla rapidement leur petit-déjeuner et laissa Liam quelques minutes seul. Il observa plus attentivement la décoration du salon, qu'il avait très peu pu voir dans la lumière du jour. Le matin, ils devaient partir assez rapidement pour éviter d'être en retard, et le soir, il faisait déjà nuit quand il rentrait. Il n'avait jamais remarqué que les murs recelaient beaucoup de petites suspensions. Il les fit tourner entre ses doigts et reconnu les décorations qu'Adèle vendait dans sa boutique.
Il attendit qu'elle revienne pour lui en parler.
- J'ai déjà vu ces objets dans ta boutique. Tu te gardes souvent un exemplaire pour toi ? Faut dire que c'est très joli, ajouta-t-il, en faisant tourner la figurine sur elle-même.
- En général, non… Mais là, c'est un peu particulier.
Liam se tourna vers elle avec un sourire, et la découvrit pas très loin de lui. Elle semblait plutôt mal à l'aise, limite rougissante ; et il n'arrivait pas bien à comprendre ce qui pouvait la mettre dans cet état. A y réfléchir, peut-être qu'il n'avait pas été très délicat en disant cela, et qu'elle pensait qu'il lui reprochait de garder une création rien que pour elle. Alors qu'il ne pensait pas du tout cela de cette manière, bien au contraire. Eux aussi, à la librairie, gardaient des livres pour eux, avant même qu'ils ne soient mis dans les rayons ; ça semblait normal à ses yeux.
- En fait, c'est moi qui fais ces décorations.
Après sa phrase, le silence tomba lourdement entre eux. Adèle n'osait regarder Liam tant elle se sentait gênée. Pratiquement personne n'était au courant qu'elle vendait ses propres créations dans la boutique ; il n'y avait qu'Annie et Simon à le savoir. C'était une partie de son jardin secret qu'elle lui ouvrait, mais elle ne pouvait pas prévenir à l'avance quelle serait sa réaction.
Si elle avait pris le temps de le regardait, elle aurait vu de l'admiration naitre dans ses yeux et un sourire pointer sur ses lèvres. Lui qui n'avait pas une grande imagination, il trouvait cela incroyable qu'on puisse inventer de si jolies choses.
- Est-ce que tu accepterais d'en faire un personnalisé pour mon appartement ?
- Quoi ? Tu veux l'une de mes suspensions ?
- Ne dis pas ça comme ça. On dirait que c'est un travail affreux et que c'est vraiment étonnant que ça puisse me plaire. Alors que c'est très joli, et que ça te représente vraiment bien. Alors ? Tu acceptes ?
Elle s'approcha de lui et entoura sa taille de ses bras. Elle était tout juste assez grande pour mettre le menton sur son épaule, si elle se mettait sur la pointe des pieds. Elle embrassa sa joue, pendant qu'il continuait de faire tourner la figurine en bois. Depuis qu'il lui avait avoué aimer ses créations, elle sentait son cœur plus rapide dans sa poitrine, un peu comme si elle commençait à se sentir mal. Mais ce n'était que les sentiments qu'elle ressentait pour lui qui se multipliaient et prenaient toute la place dans sa poitrine.
Il tourna sa tête vers elle et embrassa ses lèvres comme il le put. Il sentait une énorme fierté gonfler son cœur et son sourire. Elle ne le dirait jamais en ces termes, mais il vivait avec une artiste.
- Viens avec moi, on va voir ce que j'ai en réserve.
Elle le libéra de son étreinte mais attrapa sa main pour le guider jusqu'à son bureau aménagé dans ce qui était censé être le garde-manger. Quand elle ouvrit la porte, ils échangèrent un regard et une énergie créatrice se diffusa entre eux, qui présageait du bon travail.
Ils s'installèrent au sol, entre les différentes boites de matériel et les recherches débutèrent.