18 Juin

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Ce jeudi 18 juin 2020

Ma lettre de seize heures cinquante-huit

   ... Je vous parlais de chipolatas dans ma lettre de ce matin, je n'en ai plus le motif à l'esprit, ah oui, je me moquais, vous recommandant de surveiller leur cuisson pressentant, considérant l'heure, que vous popotiez,

   ... alors chipolatas chipolatas, je vais vous dire ... Je n'aime pas les chipolatas, parce que je n'aime pas le mot chipolata, il me renvoie aux barbecues et le barbecue me renvoie aux réunions de copains et copines plus que d'amis et d'amies, il me renvoie dans les jardinets au coeur des lotissements, ou dans les courettes des immeubles de ville, où dès les premières tiédeurs printanières l'on se retrouve, l'on se regroupe, où l'on braille, l'on graille, l'on grassouille, où l'on rit non pas à grands éclats mais à gorges déployées et avinées jusqu'à cinq heures du matin permettant aux voisins de passer un somptueuse nuit blanche au son du heavy metal dans les relents de ces saucisses longues se trémoussant et jouissant dans leurs jus d'huiles métissées... 

   ... Je n'aime pas l'esprit chipolata, ni l'esprit barbecue ni les dix-huit juin qui n'est qu'une date symbolique que récupère honteusement une génération qui n'a vécu ni de près ni de loin ce moment de l'Histoire

   ... et sachant que ce dix-huit juin, celui-ci ce Dix-huit juin mille neuf-cent quarante, les aspirants et élèves officiers de réserve de l'École de cavalerie de Saumur furent le premier honneur de la France. 

   Du 18 au 21 juin 1940, pendant trois jours, quelque 2.500 soldats français - des jeunes gens de 20 ans pour la plupart puisqu'ils n'étaient qu'élèves aspirants de réserve ont lutté pied à pied pour empêcher plus de 40.000 Allemands de passer la Loire vers le sud .

    A l'un de ses élèves soudainement devenu combattant et qui, recevant ses ordres, lui dit « Mais c'est à la mort que vous nous envoyez, mon lieutenant! » le lieutenant de Galbert, futur gouverneur des Invalides, répondra du tac au tac :

   « Je vous fais cet honneur ».

    Eh bien oui chère âme, je vous sens et vois effarée par ce mélange incongru des genres, mais telles sont les divagations de l'esprit qui passent du coq à l'âne, qui saute du trivial à l'âme,

   ... une lettre est une lettre elle suit les circonvolutions du coeur, et voyez-vous le coeur, l'âme et l'esprit pas simple à gérer tous ces machins là,

   ... et les vertus d'une lettre sont dans sa capacité à laisser filer les mots, les pensées et les humeurs comme elles viennent, d'ailleurs, d'ailleurs si je censurais mes lettres et si j'altérais leur vérité, donc leur naturel je fais le pari que le Conseil constitutionnel me censurerait me faisant valoir que je porte atteinte à leur liberté d'expression. ....

    S'il est un jour où il faut qu'un être se proclame libre, oui c'est bien aujourd'hui...

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