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Une nouvelle journée de neige était annoncée depuis plusieurs jours et lorsqu'Adèle osa se lever de son lit, elle remarqua que les flocons recouvraient déjà le rebord de sa fenêtre. L'atmosphère de son appartement était froide et son pyjama chaud la protégeait de frissons.

Quelques jours s'étaient écoulés depuis le diner chez Annie et Simon et ils n'avaient pas reparlé du jeune inconnu. Mais ça n'avait pas empêché Adèle d'y penser, souvent.

Elle se prépara rapidement un chocolat chaud qu'elle bu avec son bol de céréales. Toujours à sa place habituelle, soit devant la fenêtre. Elle adorait s'installer au bord de son canapé et regarder les fenêtres des maisons s'allumer au fil des réveils. Elle avait l'habitude de se lever assez tôt, pour avoir tout le temps de profiter de la journée à venir. En hiver, c'était plus compliqué que durant les autres saisons, mais elle était habituée et elle aimait beaucoup ce rituel. Ça lui laissait le temps de faire beaucoup de choses, de remplir sa journée de toutes les choses qu'elle aimait faire. En gros, lire, sortir se promener, faire quelques achats de Noël et, bien sûr, aller travailler.

Elle vérifia l'heure sur sa montre et s'obligea à terminer de se préparer. Elle prenait toujours son petit-déjeuner en pyjama ; une vieille habitude instaurée avec ses parents.

En fermant la porte de son appartement, elle se sentait prête à affronter une nouvelle journée, même si elle sentait déjà le froid traverser son pantalon.

En sortant dans la rue, une rafale de vent lui souffla des flocons au visage et elle perdit toute motivation. Elle détestait le froid et se voyait déjà claquer des dents avant même d'arriver derrière son bureau. Elle avait beau adorer Noël, l'hiver n'était pas sa saison favorite.

Adèle traversa la place au milieu de laquelle elle était tombée, quelques jours auparavant. Cette fois elle garda les yeux rivés au sol pour éviter de réitérer cette chute, qui lui laissait une énorme ecchymose sur la fesse. Malgré ses bottines, elle dut se stabiliser plusieurs fois pour ne pas tomber. Les dalles de la place accrochaient le gèle dès que l'hiver arrivait et aucune semelle n'était capable d'y résister.

Un petit peu plus loin, elle entendit même un petit cri contenu. Elle eut envie de rire ; non pas parce qu'elle se moquait, mais parce qu'elle repensait à sa propre chute et au même cri qu'elle avait poussé.

Elle releva la tête quelques secondes pour s'orienter et savoir où se trouvait la personne qui venait de chuter. Cette fois-ci, c'est elle qui allait être l'inconnue mystère. Elle repéra rapidement le manteau brun au sol, pas si loin d'elle. En quelques enjambées elle fut à ses côtés.

- Est-ce que vous allez bien ?

Ils échangèrent un regard puis un sourire surgit sur leurs lèvres. Adèle eut du mal à croire ce que lui montrait ses yeux, elle n'avait pas imaginé revoir ce mystérieux homme. Lui aussi semblait troublé, certainement qu'il pensait à la même chose qu'elle. Tout était fait pour qu'ils ne se rencontrent qu'une fois, et pourtant…

- C'est ma réplique, ça.

- Et ça, ajouta-t-elle en le montrant du doigt, c'est ma chute.

Elle lui tendit ses mains, comme il avait pu le faire pour elle. Tout semblait coïncider, sauf que les rôles étaient inversés. Il se releva rapidement mais ses mains restèrent encore quelques secondes de plus dans celles d'Adèle. Ils n'avaient pas encore réussi à détourner les yeux du regard de l'autre.

Liam se rendit rapidement compte que sa réaction était déplacée, qu'il aurait dû se reculer bien plus vite que cela, et la remercier, en prime. Il sauta pratiquement en arrière et glissa ses mains dans ses poches, mais ses yeux restèrent fixés sur ceux d'Adèle. C'était comme si le temps venait de s'arrêter, les flocons continuaient pourtant de tomber sur leurs épaules, même s'ils avaient ralentit leur chute.

- Comment allez-vous ? lui demanda-t-il, avec un petit sourire aux lèvres.

- Mon bleu est toujours douloureux, mais j'imagine que le vôtre bien plus.

Elle pinça les lèvres pour s'empêcher de rire. La situation lui semblait tellement absurde qu'elle devait se forcer à ravaler ce rire rauque qui lui creusait la poitrine. Pourtant, ses yeux la trahirent car un scintillement amusé recouvrit le regard de Liam et un sourire rieur commença à étirer davantage ses lèvres.

Il était tombé, tout comme elle, et chacun avait pris le rôle de « l'inconnu sauveur » alors même qu'Adèle ne savait pas de qui il s'agissait. Le destin créait de fantastiques coïncidences. Ou peut-être s'agissait-il d'un signe qu'il leur envoyait.

Adèle secoua légèrement la tête, moyen inefficace pour écarter ses pensées. En ces temps enneigés, on pouvait au moins croire qu'elle essayait de retirer les flocons de ses cheveux sans les toucher.

On leur envoyait un signe et elle ne savait pas si elle serait assez courageuse pour s'emparer de cette occasion. Elle avait longuement pensé à lui, se demandant si elle aurait une autre chance de le voir et si elle en avait vraiment envie. Aujourd'hui, il était devant elle, recouvert d'un manteau de flocons et elle ne savait toujours pas ce qu'elle avait envie de faire.

- Vous êtes peut-être pressé, mais… Un café, ça vous dirait ?

- Je ne vois que ça pour fêter cette nouvelle chute.

Il ouvrit les bras, comme pour laisser la place au regard d'Adèle pour voir comme il était fait. Elle rit un tout petit peu en baissant la tête et se mordit la lèvre inférieure. C'était son habitude à chaque fois qu'elle se sentait un tant soit peu mal à l'aise et tout le monde finissait par le remarquer.

Il lui indiqua un café tranquille, où quelques personnes se bousculaient pour commander un café avant de partir au travail. Elle le suivie, serrant un peu plus fort son sac à main contre elle. Ça faisait longtemps qu'elle n'avait pas discuté en tête à tête avec un être humain qu'elle ne connaissait pas, et cela commençait à lui donner des frissons.

Liam lui tint la porte pendant qu'elle entrait et il la dirigea même vers une table, un petit peu à l'écart. A cet endroit ils étaient au calme, loin de l'agitation du bar et du chemin des toilettes.

Elle prit une grande inspiration pendant qu'il partait commander leurs boissons. Qu'allait-elle pouvoir lui dire ?

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