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En sortant du restaurant, Liam lui tint la porte. Ils avaient passé une excellente soirée, à bavarder, à rire et à échanger des anecdotes sur eux. Elle ne s'attendait pas à se sentir aussi à l'aise en sa compagnie, alors même qu'ils ne se connaissaient que depuis quelques jours. Mais elle avait retrouvé cette énergie qu'il lui donnait, cette envie de s'ouvrir, de se reposer sur quelqu'un.
- Merci, j'ai passé un très bon moment.
Ils se faisaient face dans la rue, juste devant le restaurant. Elle frottait ses mains l'une contre l'autre pour les réchauffer et un panache de fumée s'échappait de ses lèvres.
Ils sourirent, encore et encore. C'était devenu leur manière de communiquer, à présent.
- Je te raccompagne ? lui demanda-t-il.
- D'accord.
Ils avancèrent d'un même mouvement en direction de l'appartement de la jeune femme. Le froid les figeait sur place mais rire les réchauffa quelque peu. Tout en marchant, ils se rapprochèrent physiquement. Elle avait beau être emmitouflée de la tête aux pieds dans son manteau et ses accessoires d'hiver, il ne cessait de lui jeter des coups d'œil.
A plusieurs reprises leurs mains se frôlèrent, mais ni l'un ni l'autre n'osa complètement les lier. Elles continuèrent à se balancer dans le vide, l'une en face de l'autre, sans jamais se nouer.
En arrivant devant son bâtiment, Adèle eut un mauvais pressentiment. Elle voyait deux silhouettes, debout devant l'entrée principale. Elle échangea un regard avec Liam, qui lui offrit un sourire rassurant. Elle apprécia l'effort, mais à mesure qu'ils se rapprochaient, elle reconnue Annie et Simon. Cette découverte la fit accélérer le pas et Liam la suivie docilement, sans poser aucune question.
- Qu'est-ce que vous faites là ?
Elle s'arrêta devant eux et leur adressa un regard interrogateur. Annie n'avait pas l'air d'aller bien et Simon semblait un petit peu préoccupé, même si ça ne semblait pas particulièrement important.
- On a un dégât des eaux. Tu es celle qui habite le plus près et… j'avais oublié, ajouta-t-elle en désignant Liam, d'un geste vague.
- Ce n'est pas tout. Tu ne ferais pas cette tête uniquement pour un dégât des eaux.
Annie croisa les bras sur sa poitrine et baissa les yeux d'un air affligé. Elle n'avait pas l'habitude d'être morne et effacée, et ça inquiétait particulièrement Adèle. Elle connaissait son amie et si elle agissait ainsi, alors il se passait quelque chose qui créait de fortes émotions en elle.
- Krike n'était pas à la maison quand c'est arrivé, répondit Simon.
Il jeta un coup d'œil à Annie, qui baissa encore davantage son menton, presque au bord des larmes. Elle semblait si fragile, ainsi.
- Oh, Annie…
Adèle se dépêcha d'ouvrir la porte et glissa une main réconfortante sur le bras d'Annie en passant à côté d'elle. Elle savait combien ce chat comptait pour elle et combien c'était important de savoir où il se trouvait. Simon tenait beaucoup à lui aussi, mais il était aussi le plus raisonné des deux à son sujet. Il savait qu'un chat était débrouillard et qu'il trouverait forcément un endroit où aller pour avoir chaud.
La porte s'ouvrit devant Adèle et elle grimpa les marches à toute vitesse pour accueillir son amie dans un endroit réconfortant.
Ils la suivirent tous les trois sans un mot et ils s'entassèrent dans le couloir pendant qu'Adèle s'acharnait sur la serrure de son appartement. Il lui fallait toujours forcer pour que ça s'ouvre, mais d'autant plus quand il faisait froid dehors. Enfin, la porte s'ouvrit et chacun trouva sa place dans un coin du salon. Les vestes furent jetées sur la chaise de bureau et Annie s'avachie pratiquement sur le canapé. Elle se sentait à bout de force.
- Je vais vous laisser, annonça soudainement Liam, le seul à avoir gardé sa veste.
Tous les regards se tournèrent vers lui et Adèle écarquilla les yeux en se souvenant qu'elle n'avait même pas pris le temps de les présenter. Devant la détresse de son amie, elle l'avait automatiquement inclus à leur cercle.
- Oh, vous ne restez pas ? demanda Annie, en relevant la tête vers lui.
- J'imagine que vous avez besoin d'intimité.
Il haussa les épaules et leur offrit un sourire timide. A ce moment-là, Annie comprit ce qui avait fait craquer Adèle. Il était poli et calme, il ne prenait pas trop de place et était extrêmement respectueux. Tout ce qui pouvait faire chavirer le cœur de sa copine, ça ne faisait aucun doute.
Adèle parut troubler par l'envie pressante qu'avait Liam de partir et en même temps, elle était tout aussi gênée de la question d'Annie. Elle se sentait tirailler. Si elle l'invitait à rester, qu'est-ce que ça voudrait dire pour lui ? Surtout qu'elle l'avait introduit chez elle sans y faire vraiment attention ; il avait été poussé par le mouvement de foule.
Elle se rapprocha de lui, espérant qu'Annie et Simon sauraient regarder dans une autre direction.
- Si tu n'es pas pressé et que tu n'as rien d'autre à faire, peut-être que tu pourrais rester ? J'avais l'intention de te proposer un dernier verre, et puis… Tu pourrais rencontrer mes amis.
Ils restèrent silencieux quelques minutes, tout en ne se lâchant pas des yeux. Par chance, Annie et Simon gardaient les yeux sur l'extérieur et les oreilles dans leur poche. Même si en temps normal, Annie aurait été prête à tout pour entendre ce qu'ils se disaient, à l'heure actuelle, elle était préoccupée par autre chose.
Le silence s'éternisait et elle commençait à se sentir hautement mal à l'aise. Pour une fois ce soir, elle n'arrivait pas à lire en lui. Elle ne comprenait pas ce qui l'empêchait d'accepter, et d'un autre côté, elle ne pouvait pas lui en vouloir. Rencontrer les amis de l'autre, c'était toujours une étape à franchir, un pas de plus dans l'intimité.
- D'accord pour un dernier verre.
Elle eut besoin de quelques secondes pour percuter et lui sourit. Il retira sa veste et la posa en haut de la pile formée par celles des autres. Ce fut son premier geste pour s'introduire dans l'espace privé d'Adèle, et c'était elle qui lui avait demandé de le faire.
Quand tous les deux se rapprochèrent, Annie et Simon s'ouvrirent à la conversation. Malgré sa triste mine, la jeune femme fit de son mieux pour paraitre agréable et aider ce rapprochement entre eux.
- Je n'ai même pas pris le temps de vous présenter, je suis désolée. Annie, Simon, je vous présente Liam. Liam, c'est Annie et Simon. Annie est ma plus ancienne amie.
Tous sentirent que quelque chose en elle s'ouvrait. Avoir Annie auprès d'elle lui donnait du courage et de la prestance. Et l'énergie que Liam lui confiait lui permettait de rayonner face à eux. Elle sentait bon la joie de vivre et la satisfaction.
Simon se leva pour échanger une poignée de main avec Liam et Annie lui fit une bise. Ensuite, tout ce petit monde s'installa sur le canapé ou sur des coussins à même le sol. Annie semblait plus détendue maintenant qu'ils discutaient tous ensemble ; ça l'aidait à se changer les idées.
Liam se sentait plutôt à l'aise avec les amis d'Adèle ; ils l'avaient facilement accepté et étaient capables d'aborder toutes sortes de sujets de conversation.
La fin de soirée fut très agréable pour chacun d'entre eux, mais d'autant plus pour Adèle qui se taisaient quelques fois pour regarder la conversation rebondir entre Liam et Annie. Elle se sentait bien avec eux et elle sentait qu'une bonne énergie se dégageait de cette réunion. Surtout qu'à plusieurs reprises, elle remarqua le regard de Liam sur elle. Elle avait beau ne pas être vaniteuse, en général, ses regards la flattaient.