À Blaise Pascal (ou Blaisy, ou encore Pascalou).
silvy-nocturne
9/10/2014
Cher Pascal,
Aujourd'hui j'ai fais le commentaire d'un de tes textes et ça ne s'est pas bien passé. Depuis deux ans je ne cesse de te craindre, crois-moi notre relation, basée sur la crainte et le mépris, est des plus tumultueuses. Un beau jour d'hiver tu n'es apparu sur une feuille et mes yeux se sont écarquillés d'incompréhension. Je suis restée coite devant ta complexité et je n'ai cessé de te maudire, car quoi de plus frustrant pour une littéraire de ne pas comprendre ce que tu voulais dire ? Pendant toute l'année j'ai crains le fait d'expliquer ton texte lors de l'ultime examen oral et pour mon plus grand bonheur Marguerite Duras m'a sauvée. Je pensais qu'entre nous c'était fini, j'ai donc passé un été des plus agréables.
La rentrée est arrivée accompagnée d'une matière à la si difficile réputation. La philosophie te ramènes à nouveau, le professeur prononce ton nom avec passion, je me retourne, une expression de terreur s'empare de mon visage et je m'exclame "Oh non, pas lui!" ô grand malheur! Qu'est-ce qui m'a pris de croire que notre querelle de l'année antérieure était terminée ? Au cours de cette année scolaire à chaque fois que j'entendais ton nom un rire nerveux sortait de ma gorge et tantôt je me raisonnais face à ma bêtise. Pourquoi un auteur mort depuis des siècles me causait-il une telle peur ? J'ai laissé cette question en suspend.
Pendant le littéraire été que j'ai eu, j'ai pris mes précautions face à la difficulté de mon enseignement des deux prochaines années et j' ai acheté une peluche que j'ai affectivement nommée Blaisy. Ce petit surnom c'est pour placer mes études sous une bonne étoile, ainsi qu'une façon de te dé diaboliser. Depuis un mois on me parle de toi avec amour, j'ai pris plaisir à rire de tes petits différents avec Montaigne, et à savoir que tu appréciais ses Essais. Pascalou -comme je te nomme ridiculement depuis quelques jours- on m'a récemment fait lire tes Trois discours sur la condition des Grands. Crois-moi j'ai été surprise de comprendre ce que tu semblais dire au lecteur, j'ai eu confiance et ne serait-ce qu'un instant j'ai pensé qu'entre toi et moi une entente était possible. Je viens de passer quatre heures ou plutôt trois heures quarante-cinq -le professeur ayant des problèmes pour comprendre que l'explication de texte devait finir quinze minutes plus tard- en ta compagnie. Dans mon introduction j'ai fais ton éloge, j'ai allégrement surligné ton texte et d'une petite écriture j'ai écris avec frénésie et conviction ce que je comprenais de ton raisonnement. Globalement je ne pense pas avoir plus de cinq, allons rien ne sert de me leurrer, je sais bien que je n'ai aucune méthode et que j'ai sûrement dû interpréter tes propos de travers, mais j'ai eu la belle illusion de croire te comprendre. Je sais bien que j'ai beaucoup de travail à faire avant de t'apprécier à ta juste valeur. J'ai aussi un travail psychologique à faire, te traiter de la sorte, en sachant que tu es sûrement l'un des plus grands auteurs français -oui, j'avoue avoir volé ces quelques mots à mon professeur de lettres- est injuste de mon humble part. Peut-être qu'un changement s'opérera rapidement, je ne suis plus la petite lycéenne totalement renfrognée qui ne voulait pas te voir en peinture et qui soupirait dès qu'elle entendait le mot "vanité". Je suis une nouvelle étudiante, qui ne demande rien d'autre que te comprendre.
J'irais -si cela est techniquement possible- déposer un bouquet de fleur sur ta tombe, le nombre de fleur correspondra à la note que j'aurai obtenue. Peut-être que de cette façon j'enterrerais toutes les sentiments négatifs que j'ai pu éprouver à ton égard ?
Philosophiquement, Silvy-Nocturne.
Blaisy n'a plus d'yeux
· Il y a environ 10 ans ·marla