À mains nues

Il se leva du lit. Il devait partir tôt, pour le travail. Il alla dans la salle de bain se préparer. De l'eau sur le visage afin de se rafraîchir. Il fixa son reflet : Tout allait bien. Les cheveux restaient d'un noir profond, la peau n'était pas creusée et l'oeil pas encore devenu bovin. Un homme mûr mais pas encore pourri. Il posa ses yeux sur la couche. Pas un bruit. Tant mieux. Il n'aimait pas en faire au risque de perturber le sommeil d'autrui. Le corps dont on devinait les formes féminines sous les draps ne bougeait pas. Ses lèvres formèrent un rictus amusé.

Il entreprit de se raser. La mousse blanche à étaler sur les joues et le menton. Il aimait le faire chaque jour, il avait la réputation d'un homme coquet. Pas un poil disgracieux ne pourrait échapper à son triste sort. Consciencieusement, il rendit à sa peau son glabre d'antan. Il passa sa main sur son menton délicat. Ses doigts étaient fins. Il ressortait de lui une aura sensible.

Il s'habilla rapidement. Ne jamais perdre de temps. Elégant et décontracté, rester passe-partout. Il vit l'heure sur sa montre. Il s'empressa d'enfiler ses chaussures. Il mit sa veste. Il prit les clés sur la table. Alluma la télévision pour y voir les dernières infos.

Puis il caressa le visage de la jeune femme inerte et s'attarda un instant sur les marques de strangulation. Il sourit, l'air satisfait. La porte claqua quelques secondes plus tard, on entendit un bruit de moteur.

Enfin le silence s'installa, accompagné du son stéréo d'un écran plat et d'un cadavre sous les draps.