Anne, Suzy et le loup - partie II

campaspe

Enquête FICTION écrite à partir d'articles de presse RÉELS sur l'affaire AZF (terroristes cachant des bombes sous le ballast des trains.)

Afin de pouvoir continuer à réfléchir à cette affaire chez elle, Anne avait imprimé les principales pièces du dossier informatique et les avait étalées sur son bureau. Elle ne comprenait pas comment ses collègues pouvaient travailler en ne manipulant que des fichiers informatiques. Il lui semblait toujours que sous cette forme l'information n'avait aucune vie, aucune épaisseur. Elle avait toujours travaillé en découpant les articles papier, en en recollant les morceaux qui lui semblaient faire un ensemble cohérent. C'est ce qu'elle appelait « traiter l'information ». Décidément, en ce qui la concernait, le bureau sans papier n'était pas pour demain. Elle se plongea dans ses paperasses.

Des notes qu'elle avait sous les yeux, il ressortait qu'un petit noyau d'activistes avait envoyé une lettre au gouvernement français menaçant de faire sauter des trains et réclamant une rançon. L'affaire avait été révélée par un article dans « La Dépêche » en avril 2004 mais remontait à Décembre 2003. Anne s'attacha d'abord à reconstruire la chronologie des évènements.

Sept lettres avaient été reçues à la fois par l'Elysée et par le Ministère de l'Intérieur. Elles avaient été tapées sur ordinateur, tirées sur imprimante sur du papier ordinaire et expédiées depuis Roubaix et divers endroits de la région parisienne parmi lesquels Melun et Maison-Laffitte.

Un premier envoi reçu le jeudi 11 Décembre se présentait sous la forme d'une enveloppe sur laquelle était tracée une flèche et qui contenait deux feuillets. Il annonçait la naissance du groupe AZF « Par la présente, nous vous informons de l'entrée en scène du groupe AZF» et présentait de façon froide et presque administrative le groupe AZF comme un «nouveau groupe de pression à caractère terroriste créé au sein d'une confrérie laïque ». Anne s'arrêta un instant sur le choix de ce nom un peu ridicule. Et pourquoi pas « Union Carbide » ou « Bhopal » puisqu'ils y étaient. Ils auraient quand même pu être un peu plus créatifs ou au moins donner une signification un peu plus rigolote à l'acronyme choisi ; pourquoi pas l'« association des zoulous fatigués » par exemple !

Anne revint à la lettre. Celle-ci était rédigée dans une prose organisée en paragraphes et en têtes de chapitre (tiens donc, ses profs de l'école de journalisme seraient satisfaits) : « Qui sommes-nous ? », « Ce que nous voulons », « A quel but voulons-nous contribuer », stigmatisant les «politiciens davantage occupés d'eux-mêmes que de l'Etat » et souhaitant « remettre les systèmes sociaux-économiques au service de l'individu », combattre tout à la fois le « système économique dévoyé », les «Etats hypocrites », l'« agroalimentaire » l'« enseignement réducteur » et l' « appareil médiatique complice ». (« Vaste programme ! » se dit Anne.) AZF demandait aussi la remise des "systèmes sociaux-économiques au service de l'individu" afin de "relancer le progrès » et déplorait que la France vive sur les principes d'une « économie dévoyée ».

Afin d'obtenir satisfaction, le groupe n'hésitera pas à tuer parce que «quelques centaines de vies» ne sont rien «par rapport aux millions de morts, infirmes, malades et idiots causés annuellement». "Vous entendrez bientôt parler de nous", promettait enfin le texte, rédigé sans fautes de syntaxe ni d'orthographe, dans un style dense et jargonneux. Anne se demanda à part elle combien de ses collègues seraient capables de rédiger un tel texte sans faire de fautes. Les terroristes avaient du utiliser un correcteur d'orthographe.

Cette première lettre n'est pas vraiment prise au sérieux. Elle transite par différents secrétariats et n'inquiète à vrai dire pas grand monde : Place Beauvau, on reçoit plusieurs dizaines de messages de ce type chaque jour. L'envoi éveille malgré tout l'attention d'un commissaire de l'Unité de coordination de lutte antiterroriste de permanence la veille de Noël, qui en cette période de fête se décharge fort commodément de ce souci en faisant suivre la lettre pour information et analyse à la police judiciaire et aux Renseignements Généraux.

L'affaire est presque classée quand arrive le second envoi le jeudi 29 janvier : «Excusez-nous d'être restés silencieux. Nous avons repoussé les opérations mais, prenez-nous au sérieux, vous allez recevoir d'autres courriers.». Le groupe explique qu'il n'était « pas prêt » mais souligne que sa « détermination » est « totale » et qu'il est « capable de se livrer au chantage le plus machiavélique. ». Aucune menace n'est cependant précisée.

La troisième lettre arrive le vendredi 13 février. Anne se demanda si cette date avait été choisie exprès ou si c'était par hasard qu'elle était arrivée précisément ce jour là. En effet, c'est la première qui contient des menaces précises, assorties d'une demande de rançon de quatre millions d'euros. Sur un ton primesautier AZF « informe » que son « aimable artificier a imaginé et réalisé une série de bombes» enfouies « sous le ballast des voies ferrées » en des « lieux choisis pour leur grande sensibilité et leur relativement faible protection ». Ces bombes sont «équipées de minuteries cycliques très sûres et très simples». Une notice technique jointe, traduite dans un mauvais français peut-être par un logiciel informatique, décrit les bombes utilisées l'une de 2,5 et l'autre de 3,3 kilogrammes d'explosif et précise que chacune de ces neuf «mines à retardement» est capable de se mettre en veille jusqu'à un jour préétabli : chaque engin est activé par un disque cranté comportant 31 trous correspondant chacun à un jour du mois et qui joue un rôle de dateur. Lorsque ce disque s'arrête sur une encoche donnée il libère une bille d'acier qui actionne le mécanisme. A partir de ce moment, la bombe est enclenchée et pourra se déclencher sous l'effet de vibrations aussi faibles que celle qui pourraient être causées par le passage d'un train. Si le système venait à ne pas fonctionner la première fois, il se réamorcerait pour le mois suivant. «La première bombe est marquée du chiffre 018, c'est-à-dire qu'elle sera active le 18 février [...] et de nouveau trente et un jours plus tard en cas de non-implosion, et ainsi de suite. Les suivantes lui succèdent à raison de 2 à 4 par semaine», précise encore la missive. En échange de la rançon, le groupe AZF se propose de fournir les coordonnées GPS de toutes les bombes et exige que les autorités prennent contact avec lui par une annonce dans «Libération» dont il indique le modèle: «Mon gros loup, ne prenons pas de risques inutiles, le plus tôt sera le mieux. Donne-moi tes instructions. Suzy. n°...» Aux autorités de remplir la fin du message par un numéro de téléphone secret qui sera codé d'une façon expliquée dans la lettre… le tout « avant que l'équipe ne quitte l'Europe pour de longues vacances bien méritées». Enfin la lettre précise qu'il ne faut pas «tenter d'influencer AZF par un procédé médiatique quelconque».

La quatrième lettre arrive le Mardi 17 février. Elle est courte, reprochant aux pouvoirs publics « d'être lents » à donner satisfaction au « groupe AZF » et vitupère contre l'«inertie» policière: «Si vous souhaitez éviter la première catastrophe, il ne vous reste plus qu'à interrompre le trafic SNCF à partir du 17 février en soirée.» «J'attends de vos nouvelles», conclut le rédacteur de la missive.

Cette fois, les services antiterroristes se mobilisent et deux juges sont saisis. Dès le jeudi 19 février, paraît la première annonce dans Libération. Elle passe inaperçue des lecteurs, qui en ont vu bien d'autres dans cette même rubrique. « Mon gros loup, ne prenons pas de risques inutiles, le plus tôt sera le mieux. Donne-moi tes instructions », ce que Anne traduisit mentalement par « dites-nous où, quand et comment vous faire parvenir la rançon».

Le lendemain, le vendredi 20 février est expédiée la cinquième lettre. La rançon augmente et la devise change : ce sont cette fois 4 millions de dollars et un million d'euros en coupures usagées de 100 qui sont réclamés. Anne fit un rapide calcul : à raison de 1 gramme par billet, cela fait quand même cinquante kilos ! Ces terroristes là devaient être rudement musclés pour transporter en courant des sacs qui devaient faire un total de plusieurs dizaines de kilos, mais ce n'étaient pas des économistes hors pair : le cours du dollar était au milieu d'une de ses plus grandes période de baisse. Et pourquoi demander une rançon en deux monnaies ? N'avaient-ils pas confiance en l'Euro ? Voulaient-ils jouer aux héros de films américains ? A vouloir faire une séance de musculation, pourquoi ne pas demander des lingots d'or !

La somme, précise encore la lettre, devra être répartie exactement par moitié dans deux sacs postaux, qui seront chargés dans un hélicoptère biplace civil en restant visibles. L'appareil devra se tenir prêt à décoller, moteur allumé, depuis le haut de la Tour Montparnasse et ce n'est qu'une fois en vol que les terroristes préciseront les consignes exactes auxquelles devra se conformer l'appareil qui devra avoir un rayon d'action de 120 Km autour de la capitale. Anne se demanda brièvement s'il existait des points d'observation permettant de surveiller un hélico se trouvant au sommet de la Tour. Ils ne devaient, en tout cas, pas être bien nombreux… était-ce là la première erreur des terroristes ?

Cette fois le ministère de l'Intérieur décide de suivre les indications des maîtres chanteurs. Mais les pilotes font remarquer qu'à cause des ascendances violentes il est risqué de laisser un petit hélicoptère de faible masse posé au sommet de la tour Montparnasse. Il convient de choisir un autre héliport de décollage. Le contact est donc renoué via les petites annonces de « Libération », et le directeur central de la PJ et son adjoint se creusent la tête pour imaginer un message codé compréhensible par les terroristes. Finalement «Suzy» explique à «Gros Loup» que «Pour assurer réussite, l'oiseau doit s'envoler d'ailleurs. De plus souhaite garantie pour cadeau. Toujours d'accord mais parlons-en.»

Le groupe terroriste semble comprendre le contenu de ce message puisque dans une sixième lettre envoyée le samedi 21 février il promet aux autorités au moins une bombe par semaine, mais « félicite » le ministère de l'intérieur : «En remerciement de votre pragmatisme, vous trouverez les coordonnées de celle des bombes qui doit s'activer la première: "latitude 026 16, 11N et longitude 26 01, 29 E"». Ces coordonnées GPS correspondent à un endroit se trouvant sur la voie ferrée du Paris Toulouse à Folles dans la Haute Vienne, plus précisément sur le viaduc de Rocherolles, haut d'une cinquantaine de mètres, à 30 kilomètres au nord de Limoges. Non loin de l'endroit repéré, le regard des policiers de la PJ est attiré par deux flèches tracées sur les rails. Le ballast semble intact, mais en creusant à cet endroit, l'un des enquêteur déterre un Tupperware circulaire de plastique blanc portant le numéro 18 et fermé par un couvercle bombé translucide retenu par un adhésif rouge. Ce récipient contient 2,5 kilogrammes de nitrate et de fioul. Le système de mise à feu, étonne les artificiers : le mécanisme d'horlogerie comprend aussi bien des pièces industrielles que d'autres façonnées manuellement. La bille, censée déclencher le dispositif se trouve encore dans son logement: le minuteur, réglé sur le 18 février ne l'a, semble-t-il, pas mise en action.

Anne eut une pensée un peu nostalgique. L'évocation des « Tupperware » évoquait immanquablement pour elle les petits plats qu'elle rapportait de chez ses parents pour lui permettre de survivre pendant la semaine lorsqu'elle était encore à l'école de journalisme. « Epoque bénie » se dit Anne qui se replongea dans ses archives.

Les artificiers décident de tester le dispositif en le reproduisant à l'identique en laboratoire et en déclenchant sa mise a feu. Le souffle arrache un morceau de rail de 78 cm et de 35 kilogrammes qui est projeté à 37 mètres de distance.

Les premiers contacts téléphoniques ont lieu le 24 février depuis une cabine de la gare de Lyon. Le premier appel ne dure que 7 secondes « De la part d'AZF, il faudrait vous dépêcher !». La voix, plutôt autoritaire, appartient semble-t-il a une femme assez jeune qui s'exprime dans un bon français avec un accent parisien. Il semble que celle-ci soit accompagnée par un homme qui la somme de raccrocher. Le second appel est passé le 25 février depuis la gare de Meaux (Seine et Marne). Il dure cette fois quarante sept secondes : « Que proposez-vous? - L'aéroport de Villacoublay - D'accord...» L'opération est fixée au lundi 1er Mars. L'appareil devra stationner en bout de piste depuis un endroit visible depuis l'extérieur de l'aérodrome.

Le jeudi 26 février, « Suzy » insiste : « Je te le redis, garanties pour cadeau, parlons-en », alors même qu'une septième lettre parvient aux autorités : Le groupe menace de faire sauter d'autres bombes et demande la mise à disposition d'un numéro de télécopie, de façon à pouvoir indiquer le positionnement des engins explosifs une fois la rançon remise. Les policiers de la Division nationale antiterroriste et de l'Office central pour la répression du banditisme décident de préparer la rançon, rassemblée en urgence par la Banque de France.

Le samedi 28, la police passe le message convenu dans « Libération » : «L'oiseau blanc s'envolera lundi depuis le point indiqué.»

A l'aube du lundi 1er Mars , les forces de police investissent la tour Eiffel et la fouillent intégralement. Leur quête reste vaine et l'hélicoptère se met en place à Villacoublay. A son bord se trouvent le pilote, un mécanicien et deux policiers chargés chacun d'un sac. Anne note au passage que les policiers ont réussi à convaincre le groupe AZF de la nécessité d'avoir à bord quatre passagers, alors que les terroristes avaient demandé l'utilisation d'un biplace. Or la présence d'un mécanicien ne se justifie pas, et un policier aurait été suffisant pour larguer les deux sacs.

A 17h20, le numéro mis à disposition par les forces de l'ordre sonne enfin. La même voix féminine ordonne à l'équipage depuis une cabine proche de Montargis (Loiret): «Allez à l'aérodrome de Montargis, au pied de la manche à air, et grattez dans les cailloux».

Le trajet jusqu'à Montargis dure trente cinq minutes. L'hélicoptère se pose comme prévu au pied de la manche à air. Sous les cailloux, un policier trouve le message suivant : «Prenez au sud, longez l'autoroute pendant quelques kilomètres, vous apercevrez une bâche bleue. Lâchez les sacs sans vous poser.» L'hélicoptère redécolle immédiatement car l'heure du coucher de soleil est proche et qu'ensuite il n'est plus autorisé à voler plus qu'une demi heure. A l'heure fatidique les passagers de l'hélicoptère n'ont toujours pas aperçu la fameuse bâche bleue et l'équipage décide de rebrousser chemin avec les sacs à bord. Ce n'est que le lendemain matin que la fameuse bâche bleue sera localisée en plein champ, à 19 Km de l'aéroport. L'équipage de l'avion Awacs, chargé de couvrir la zone à distance, ne rapporte aucune information significative. Tout au plus l'enquête fait-elle ressortir qu'une jeune femme blonde accompagnée d'un homme plutôt jeune lui aussi ont été repérés dans ces parages.

Le mercredi 3 Mars, La Dépêche du Midi refuse de continuer à taire les menaces d'AZF que d'autres médias avaient accepté de passer sous silence pour ne pas nuire à l'enquête, et ce, malgré un contact du Ministère de l'Intérieur avec le directeur de la Rédaction puis le PDG du journal. L'article est signé du pseudonyme de Claude Nicolas, en référence, sans doute aux prénoms accolés du ministre de l'intérieur et de son directeur de cabinet. Par ailleurs, parait toujours dans « Libération » ce message des forces publiques : « Mon gros loup, pas vu ton foulard bleu, fais-moi signe. ».

Suite à l'article dans « La Dépêche » il n'est bien sûr plus question de communiquer en signant des annonces dans « Libération » du nom de « Grand Loup ». Le gouvernement tente, le 12 mars de reprendre contact avec le groupe par le biais d'une petite annonce dans le même quotidien ainsi libellée : "Serions acheteurs. Camille Claudel. Authenticité vérifiable. SVP. Discrétion assurée". Mais il n'a pas de réponse.

Dans la semaine du 8 Mars, AZF revient à la charge et envoie une nouvelle lettre frappée des trois flèches rouges en déclarant vouloir viser le réseau ferré, les gares, mais aussi un TGV qui "seront la cible d'un attentat si le gouvernement ne paye pas la rançon demandée". Le groupe a imaginé plusieurs scénarios pour récupérer la rançon -"une rançon supérieure à la précédente" et fixée à 4 millions de dollars et deux millions d'euros (« sacrée inflation » pensa Anne pour elle-même)

Le 17 Mars, cependant une nouvelle bombe est découverte à moitié enterrée entre le ballast et les rails à Montieramey (Aube). Elle contient le même explosif, du nitrate et du fuel et est entourée d'une même bande rouge mais est de fabrication plus sommaire : Les dispositifs de mise à feu des deux engins sont différents ainsi que le programmateur. Dans le cas de la bombe de l'Aube, ce n'est qu'un « vulgaire minuteur de cuisine », selon une source policière.

Par ailleurs, selon La Dépêche du midi, le toujours mystérieux groupe AZF aurait revendiqué les attentats de Madrid dans une petite annonce parue pendant la semaine du 15 Mars dans « Libération ». Cependant, le commissaire chargé de l'enquête, ne prend pas cette revendication très au sérieux : "Même s'il devient difficile aux terroristes d'AZF de piéger le réseau SNCF depuis que le gouvernement a confié l'entretien et la surveillance des voies à chaque riverain, il paraît douteux que ce groupuscule soit à l'origine des attentats de Madrid. Le mode opératoire n'est en effet pas le même et les répercussions psychologiques sur le gouvernement français sont quasi nulles. Cette petite annonce provient très certainement d'un mauvais plaisant que nous finirons bien par arrêter".

Peut être est-ce parce que, suite à ce genre de revendication fantaisiste, AZF craint d'être poursuivi par la police internationale que, finalement, le jeudi 25 Mars, une huitième lettre arrive simultanément à l'Elysée et au ministère de l'Intérieur. Anne trouva son contenu suffisamment intéressant pour le retranscrire dans son intégralité dans son dossier de presse :

« Afin de remettre les pendules à zéro, tant les vôtres que les nôtres, nous devons porter à votre connaissance les éléments suivants :

1) Il n'y a plus à ce jour de bombes en état de fonctionner sur le réseau ferré français. 2) Fort de l'expérience acquise ces dernières semaines et désormais conscient de ses faiblesses technologiques, logistiques et autres, AZF suspend son action durant le temps nécessaire pour y remédier.

3) Nous confirmons qu'aucun des membres de notre petite confrérie, ni même ceux de l'entité provisoire d'AZF, ne cultive de grief à l'encontre de quiconque au sein du gouvernement français, ni contre ce dernier en tant que tel. Notre véritable objectif est de porter un coup décisif à l'esprit dévoyé qui préside aujourd'hui à la plupart des actions humaines. Nous pensons que le moyen qui nous a été offert le permet et nous irons jusqu'au bout, sinon la Terre s'en chargera elle-même beaucoup plus brutalement.

"Comme une 'force de dissuasion' n'est perçue comme crédible que si elle est effectivement réelle, nous avons formellement décidé qu'à notre réapparition notre propre 'force de persuasion' reposerait désormais sur une matérialité effective et tangible et qu'aucune parole ne sera plus formulée par AZF qui ne repose sur une stricte réalité. "La publicité ne nous gêne guère mais n'intéresse personne. Lorsque nous le demanderons, payez donc sans façons et n'en parlons plus, sinon la France surpassera sans gloire les tristes records espagnols.

"Comprenez donc bien que nous n'entendons nullement renoncer à obtenir la somme qui nous est nécessaire que vous devriez plutôt considérer comme une 'subvention', un formidable retour d'ascenseur étant possible pour le gouvernement français avant la fin des deux années qui viennent, cela bien sûr si son sommet se montre intelligent et courageux. Dans le cas contraire d'autres saurons bien en profiter.

Sans rancune et à bientôt.

Le porte-parole d'AZF »

La formulation de ce début de lettre fit sourire Anne : « Fort de l'expérience acquise ces dernières semaines et désormais conscient de ses faiblesses technologiques, logistiques et autres ». Ces terroristes là étaient quand même bien naïfs. Imaginerait-on l'ETA ou les nationalistes corses proposer de désarmer car ils sont « conscients de leurs faiblesses technologiques », chaque fois qu'une de leurs bombes est désamorcée avant d'exploser ? Et que signifiait cette phrase sur le « formidable retour d'ascenseur ». Pensent-ils vraiment convaincre quelqu'un qu'ils seront un jour en position de faire cela ?

Naïveté encore que le passage sur la force de dissuasion. Le groupe n'admet-il pas implicitement par ces mots que ses membres ont bluffé ? Comment espère-il être pris au sérieux par la suite ?

Quant à la « subvention » demandée, Anne se dit qu'elle aussi en aurait l'usage. Elle n'avait toujours pas pris de vacances…

De fait, on n'entendit plus parler d'AZF pendant plusieurs mois, jusqu'à la réception le 12 juillet des cinq lettres qui avaient retenu l'attention du directeur de la rédaction.


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