Après l'amour
jjaji
Tes doigts pianotent le lit, toujours sur le même rythme, la même cadence. Ils se posent et se relèvent, monotones, comme nos têtes sur nos oreillers. Chaque matin vient et nous pousse vers une nouvelle journée. Quand le soleil se couche, nous nous allongeons aimablement. Tes doigts suivent le mouvement sur mes draps. Je comptes avec eux les jours, les semaines passées ensemble. Inconsciemment, tu me surprends. Mon regard quitte tes mains pour suivre le fleuve de tes veines. Elles découlent le long de ton bras, remontent jusqu'à ton coude, mises en valeurs par tes muscles tendus. J'aime l'alignement de tes poils, rangés poliment comme de sages élèves. Ils apprennent à vivre en transparence, à se faire discret, tenir la distance. Tout ça pour ne surtout pas choquer cette nouvelle société sophistiquée, pour ne pas gâcher ton incroyable beauté. En continuant mon chemin le long de ton bras, je médite sur la douceur de ton grain de peau. Le métissage qui te met en valeur, me tire vers toi. Je penche la tête vers le bas, désire oublier l'excitation qui me gagne. Les reflets du soleil que ton corps a conservé, les vestiges d'un bel été. Tu as du profiter de la chaleur berçant les nuits d'août. Mais tu es revenu, et l'hiver montre son nez pointu pour te piquer de son vent glacé. La courbe de ton épaule travaillée me fait tourner les yeux, tu pourrais me porter, m'emmener aussi loin que possible. Mon cœur battant sur ton dos transpirant, soumise à tes envies, à ton ennui, nous nous en irions. Fragilisée par la naissance de ton cou comme affaibli par trop de sentiments refoulés. Je poses mon doigt sur lui, trouvant ton pouls. Je me cale sur ses pulsions, balançant le bout de mon pied. Tu m'emmène dans une danse incontrôlée, je m'émerveille devant la souplesse de tes pas, attends moi. Oui, tu es là, ta main prend mon doigt, le soulève jusqu'à tes lèvres. Ta bouche que j'aime tant, tes dents mordillent ma main, taquines. J'ai envie de toi, tu le sais. Je me reprends, m'éloignes un peu, doucement. Tu passes ta langue sur tes lèvres asséchées, j'aimerai venir trouver leur humidité. Mais j'aime te regarder. Tes yeux fermés me troublent, je les frôle approchant mon visage du tien. Tu les ouvres, je suis face à toi et ne pourrais plus me détacher de ton regard. Il me dévore, s'emplit d'amour, de promesses, de désir. Je plonges dans ses eaux vertes bleues, y croisent quelques poissons illuminés d'or, quelques pépites d'argents. Retiens moi, gardes moi au fond de toi, perdue dans l'archipel de tes yeux. Je t'en veux de me quitter si vite, tu t'oublies dans une faible somnolence. Tu en émerges trop tard, j'ai repris mon poste, un peu reculée, tu te sais observé. Il y a tes cheveux décoiffés, témoins de la fusion de nos corps. Ils ont tord, je repars dans mon euphorie. Sers-moi plus fort, mords moi, apprends mon corps, apprends moi par cœur. Mes mains dans tes cheveux te font prendre conscience du plaisir que tu m'offres, de la jouissance que tu me portes. Il faut que je reviennes à toi, tes mèches emmêlées m'ensorcellent, me ramènent au ciel dès le réveil. Seules preuves de nos nuits, souvenirs intimes de nos folies. Tu as chaud et laisse tomber la couverture à tes pieds. Ton torse tourné vers le plafond, me fait fondre. Ta poitrine m'apaise, tes muscles saillants soulèvent mon amour pour toi. Quelques gouttes de transpiration perlent près de ton nombril, je t'ai redonné la vie. La cicatrice le long de ta hanche m'effraie. Tu es en danger, la douleur est capable de t'atteindre. Je dépose un léger baiser sur cet oubli de vigilance. Tu souris, tu sais que cette marque de souffrance m'atteint en plein cœur. Tu aimes me voir inquiète, impressionnée aussi. Mon homme à survécu, ça te fait rire de te souvenir de cette phrase sortie quand nous nous étions revus après l'incident. Pourtant je continues mon parcours. Le responsable de mes jouissances semble fatigué. Mais il est beau, se repose, enveloppé dans sa fierté de pouvoir tant donner. Ton sexe paraît sculpté dans le marbre, élégant et courtois. Il pourrait donner des frayeurs, des douleurs, mais il est notre plaisir, celui qui offrira la vie. Il y a tes cuisses, athlètes et fuselées. Je ressens encore leur pression autour des miennes, elles qui semblent murmurer "Ne me quittes pas, viens à moi". Tes doigts pianotent encore le lit, plus discrètement, comme pour me laisser à ma contemplation. Mon regard chatouille la timidité de tes mollets parfaits, insistant sur le grain de beauté de ta cheville gauche. Un don, un bijou arboré avec délicatesse pour délivrer ensuite la pente de tes pieds. Longs et fins, ce sont eux qui t'ont conduit jusqu'à moi. C'est grâce à eux que nous vivrons heureux au cœur du voyage. Il faut que je te réveille, que je te dise que je t'aime et que tu es merveilleux. Mais ton corps étendu sur le lit, à coter du mien, m'en empêche. Coincé dans ton sommeil, tu m'appartiens, ça me plait, j'aime bien. Tu me fais rêver, et je vais finalement te réveiller. Je ne peux pas te résister.
C'est trop beau.
· Il y a environ 10 ans ·dreamcatcher