Asphalte crépitant

Il dévore l'asphalte, laissant vrombir sa carcasse métallique, s'exilant de ville en ville, d'horizon en illusion, errant parmi les pavés antique de l'étoile romaine. Le défilé des artères laissant son regard hagard, défiant le temps des aires, lorgnant les autres bergers guidant leurs esprits au-delà des coutumes. Lui, elle, nous, tous en orbite sur ces voies bitumées, constellées d'incohérentes errances non maîtrisées. Certains sortent du chemin et se fracassant contre leurs destins. Triste macadam s'infligeant les affres de la célérité inconsciente. Des hommes tels des ondes s'agrippant l'âme aux travers des torsions de ce monde.

Mais ce n'est pas ce tableau qu'il aime dépeindre, il préfère sentir l'air des régions, des espaces, se retrouver en chaman naviguant, mélangeant chaque grain de goudron à ses horizons pour obtenir la décoction d'une terre en constante ébullition. Voir les univers se transformer, se déformer, rassembler son passé et se réjouir de saisir à nouveau l'instant. Se souvenir des rencontres, des regards, des ombres du matin et des lueurs de la nuit. Les aventures contées par chacun, les conneries gerbées par d'autres.

Il aime à laisser ses papilles lui remémorer les divines épices de ce village, le juteux de ce fruit, la force de cet anis..

Ce qu'il aime avant tout, c'est de se dire qu'il l'a fait, solitaire nécessaire de cette épopée, mais fier d'y être arrivé.

Et pour lui rien n'est fini, car les routes se tracent à l'infini. Ne reste qu'à s'y laisser porter, l'œil curieux, l'esprit rêveur, à la recherche des parfums oubliés de mille et une contrées..