Au cinquième jour du printemps(3)

Frédéric Cogno

Puis, voici qu'à genoux, nos deux corps se rencontrent

Et s'immolent soudain nous conciliant tout contre.

Comme un faon sous la biche un soupir est venu

Exhalant des jasmins en un râle ingénu,

Quand, fondant de désirs, du joug qui nous emprunte,

Nous nous sommes guidés jusqu'à l'ultime étreinte.

Me voilà transporté vers un autre rivage

Au coeur des naufragés qui n'ont plus de sillage.

Poussé par les vents chauds, je plonge et je dérive

Vers un gouffre élagué par les vagues captives.

Qui es-tu? Oú suis-je? Oú me mène ce couloir?

Les eaux de pluie, de mer, du profond entonnoir,

Réinventent plus loin les sources pour les chantres

Qui jaillissent en choeur au soleil sur ton ventre...

Ô clairières des druides aux embruns de Honfleur

Qui gambadent, qui jouent, espiègles moissonneurs,

Se disputant le gui et surtout cette perle

Sur ton nombril pâmé oú mes assauts déferlent!

Je retrouve éperdu tes baisers plus féconds,

Eux aussi, rescapés, du curieux tourbillon.

Toujours couché sur toi, je m'élance et je glisse

Et ton corps me répond en hautbois de réglisse.

Oh! Oui! J'en veux encore! Aimons-nous plus sauvages!

Attelle-moi derrière avec tous mes hommages!

Galopons vers l'ouest par les canyons hurlants

A grands coups de fouet et d'éperons ardents!

Hue! Qu'il est bon ton cul au feu du vent Apache!

Mes étriers lancés sans peur et sans relâche,

S'envolent dans la nuit qui descend sur tes hanches

Pour que mes coups de rein sapent ta lune blanche!

La course vient tanner ta croupe endolorie;

Ô parfums de crotale! Jeu du sable ébahi!

Je me retiens toujours, le bivouac est proche,

Oui, une bûche encore, dans ton feu, sous la broche,

Je me retire enfin le sexe rougissant

Et je t'entends gémir, coyote dans le vent.

Je me couche á présent, tu te relèves emplie

De lutins de cactus en proie aux gargouillis.

Une terre fertile, un phare, une marée,

Tout un autre horizon m'est encore annoncé...



A suivre...


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