Bain de rock
mgxden
A l'heure où je devais barboter dans mon bain, Kurt Cobain sortait le grunge. Ça sonne rauque et sale, ça résonne comme une répet' dans une cave humide ou un garage sombre, ça sent la clope de l'autre côté du disque et les fins de soirées mortelles des jeunesses délabrées. Nirvana joue l'écorché vif. Et pourtant c'est pur, tellement pur qu'on trouve difficilement moins dur à jouer à la guitare, que quelques mots suffisent à habiller quelques riffs. Tellement pur qu'un bébé patauge sur la pochette, dans le bleu d'un septembre 1991... on barbotait chacun de notre côté, à peu près au même moment. Lui s'est retrouvé sur Nevermind, éclaboussant le monde de la musique, immortel. Moi j'ai grandi et j'ai voulu gratter Come as you are sur une guitare, plongeant comme toute une génération dans l'amour du rock.
Le marmot peut nager heureux, il baigne dans les mélodies pop douces pseudo-innocentes de Nirvana. La seconde d'après, il est secoué, tape du pied sur un riff énervé, recrachant la rage du chanteur avec ferveur, les atrocités du monde et de l'homme. Il crie, pleure, rame. Viol, amours, drogues, propos incohérents, peu importe. Pourquoi comprendre ? En écoutant Nevermind, on redevient ce bébé du rock, bercé par la douceur mélancolique, agité par les rancœurs mystiques. On ne saisit rien, si ce n'est la douleur et les passions. Le ton est grave, le son coule, le mâle râle. On prend son temps, on se débat, on vit chaque accord. Et on en redemande.