ça va de soi

Prendre rendez-vous avec Maman, parler avec elle pour le plaisir, envie de quelque chose de doux, de moelleux, des flans au caramel qui s'ouvrent avec la languette, c'est plus rigolo. La radio passe des chansons que j'aime bien, qui datent de mon adolescence, je ressens toujours la même sensation quand l'adolescence vient à moi avec ses baskets Adidas, mes préférées. Une impression de bien-être où tout est encore possible, une terre bonne et humide, grasse comme il le faut, et qui s'effrite dans la main connaisseuse d'un agriculteur expérimenté. Oui, c'est bien ça. On y planterait pas des lentilles comme on faisait à la maternelle, sur du coton, mais du blé, le blé de la connaissance et du savoir, j'apprenais facilement mes leçons quand j'étais au collège, je savourais les bouquins avec délice, je prenais mon temps, retardais le moment où je tournerais la dernière page. Oui j'avais une vie facile, y avait que les maths qui m'enquiquinaient à l'époque, à l'époque...

Et si je me mettais à la plantation de lentilles? Envie de voir des choses pousser, bouger lentement au rythme de la nature, en attendant mon gardénia. Je l'ai commandé sur Internet, je sais c'est pas bien, enfin y en a qui n'aiment pas, mais j'en avais trop envie. Malgré le froid ambiant je sens comme une montée de sève, je contre l'hiver comme un footballeur contre son adversaire, dans ma tête il fait beau, la brume du sommeil se dissipe en moi. Je me suis couchée tard cette nuit. Je n'ai pas assez bougé, pas assez travaillé. Papa était un grand travailleur, un vrai courageux, la neige ne l'arrêtait pas, s'il le fallait, il mettait son vélo sur ses épaules, c'était un homme, un vrai... C'était une époque qui me laisse songeuse, j'avais peut-être deux ans, trois ans, j'étais au chaud dans mon lit de petite fille, la neige, je la tenais dans mon petit poing, emmitouflée dans mon bonnet et mon écharpe, j'ai une photo de ce souvenir, avec mon frère et ma soeur. En noir et blanc ça va de soi.