Ces bouches à nourrir

Stella Arccopinto

écrit par une bouche en cul de poule.

 Mets ta bouche contre mes goûts, là, tout contre, ici. Non, là. Oui, tout près, Tout contre, j'ai dis. Bouche à bouche, tu sais comme ça, tu sens, tu vois... Les mots glissent tout seuls sous la langue Ils fondent et se confondent dans le souffle-soupir de nos, de ton, de mon chuchotement. Sous ta muqueuse moqueuse Tu vois, j'entends distinctement chacun de tes silences me susurrer en cadence le secret des syllabes succulentes, frissonnantes syllabes, n'est ce pas, mes humides consonnes et tes tremblantes voyelles Ah que suave, que extrana conversacion tenemos o hacemos... Los labios de tus dos ojos sobre el pecho de mis palabras Sabes... Caresses que battent nos cils en catimini, là dans la douce paresse de notre délicate dialectique. Chut... Tu entends comme cela m'excite. Bouche béante, bouche bée, mets moi tes bouchées doubles, que je t'embroche un peu, que tu m'embouches un coin, tout mes recoins. Vas y, fais donc ta fine ta grande ton amuse bouche. Avale moi toute entière Avale. toutes ces couches, là toutes ces recouches, ici toutes ces sous-couches, dedans. N'hésites pas. Une à une, deux par deux, Pèle, épèle, chacune de mes peaux. Oui. Pèle mêle. Encore. Oui. Déglutissons ensemble les mots et les sons, jusqu'au plus tendre de leur jus, que l'on se mette enfin l'eau à la bouche à chaque louche que l'on se serve des mises en bouche qu'on en reprenne! Juste à peine le temps de ré-apprendre la bouche pleine de commissures à parler sans tourner sa langue 7 fois dans les yeux ou dans la gorge d'un autre. Je déboucherai tout ce qui tient sur le bout de ta langue tout ce qui colle, qui insuffle, qui emporte. Puisque ronde et longue en bouche, je serais, tout ce que tu ne sais plus dire, tanin d'un avant goût salive de tes arrières, persistante et insolente, je t'arracherais les vers et les proses, je t'enlèverais le pain, le mot, le cri, toutes ces pensées tapies dans l'embouchure de ta tête. Bouche motus et bouche cousue Je serais tout ce tuyau-fleuve-volcan four de ton canon Alors viens! Ouvre la, bouche-trou, Ouvre bien grande cette porte à nourrir car j'apporte en biais, ma bouche en coeur pour emplir notre bouche à oreille.

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