Chanter le Chant de la rivière

maelle

On dirait une nymphe. On dirait une fée ou une walkyrie. Celle fille là sait. Elle sait chanter le chant de la rivière...

Une jeune fille, belle, libre, et sauvage à travers le monde... On la voit dans les champs. On la voit dans les bois. On voit ses cheveux roux comme ceux du renard disparaître au coin d'une rivière ; on sent ses yeux bleus, posés sur nous, remplis de ciels de de nuages. Elle est partout et nulle part à la fois. Absente, présente.

J'ai cru qu'elle était une nymphe, puis une fée ou une walkyrie. Je m'étais trompé. Mais cette jeune fille là sait. Elle sait chanter le chant de la rivière. Sauvage, elle se glisse entre les arbres, écoutant le doux chant d'une sève qui s'écoule, d'un charançon qui creuse, d'une feuille qui se détache et qui tombe. La mélodie de l'arbre résonne encore à mes oreilles. Puis, libre comme l'air, sautant d'une falaise où les vagues se brisent en écumant avec violence, la jeune fille étend ses bras, elle se perche sur le vent et elle s'envole. J'imagine le vent sur son visage, dans ses cheveux roux. Ma tête se remplit de songes et d'espoir. C'est qu'il en faut tellement....


On l'a vu ici ; mais on l'a aperçue là-bas. Moi, j'en ai rêvé ; d'autres ne faisaient que l'imaginer. Elle donne à chacun et à chacune une goutte de rosée, une feuille d'arbre, ou bien une plume d'oiseau. Et ses paroles résonnent : « Suis le vent, cours dans la rivières, réveille toi avec le printemps, et dors pendant l'hiver. » Mais je sais qu'il en faudrait tellement plus.


Quand il n'y a plus de vent, la jeune fille tombe, tombe ; elle glisse dans l'océan sans une vague, elle court sur les tempêtes, elle chevauche les mammifères marins. Ce n'est plus une jeune fille : c'est une guerrière. Combattant pour les songes, guerroyant dans les rêves  ; et telle une sirène nageant parmi les flots, elle chantonne d'une voix enchanteresse : « Les baleines veillent sur toi, les courants marins n'attendent que toi, l'eau salée t'emportera. L'océan est là. Roule, cours, nage ! Tourne la page... »


Ceux qui l'ont vue disent : « C'est une déesse. » ou bien : « C'est une diablesse. ». Pour moi, elle ne m'évoque qu'une douce pensée éphémère. Mais la fille du ciel continue sa course, inlassable. De la silencieuse forêt à l'ondulante prairie, de la prairie aux frémissants champs, des champs aux scintillants lacs, des lacs aux jeunes rivières, des rivière aux immenses montagnes, et des montagne jusqu'à l'air. « J'entends les grillons, le vent, les vagues, la pluie, l'eau qui coule, les poissons qui nagent et j'entends le vent sur les épis d'or. Écoutez cette musique, plus belle, plus ensorcelante ; écoute la chanson de la nature. »


Moi, j'entends tout cela.


Ses cheveux roux disparaissent et repartent. Ils laissent sur le chemin un gland, parfois un épis de blé. Dans la main des marins, elle posera un coquillage ; dans celle des jardiniers : un caillou, entre les doigts des alpinistes : un souffle de neige, et dans la main des hommes... rien

Ainsi, cette jeune fille est comme la douce renarde ; elle reste dans sa tanière, elle ne s'aventure pas au-delà des bois. Celle fille, qui ne voit autour d'elle que l'espoir et la liberté, ne franchit pas la barrière. Les hommes n'auront ni soleil, ni goutte d'eau de rivière. L'arbuste planté dans le pot ne peut pas la cacher. Et la jeune fille mourrait...


Ces mots, ils sont pour elle ; elle qui s'aventure dans mes rêves et que je ne verrais jamais dans ma réalité.

Jeune fille libre, sauvage, dénuée de presque toutes les barrières, et craignant l'affaiblissement de ta planète, je te trouve bien courageuse. Voudrais-tu sauver le monde, à toi toute seule ; toi dont les présents sont déjà oubliés ? Pourquoi ne veux-tu pas vivre une vie de liberté, d'aventure et de nature, sans aucune prison, ni responsabilité ? Est-ce impossible, tant que le voile gris de tes yeux ne sera pas levé ? Alors, plonge dans tes rêves, et vole. Surtout ne te retourne pas. Ce n'est pas ta faute. Nous disparaîtrons bien, moi, les humains ; sans tes songes, ton chant et toi.


Maëlle

Signaler ce texte