Je repris lentement conscience. Petit à petit, mon cerveau émergea d'un épais brouillard. Je n'avais pas encore ouvert les yeux, mais je savais que j'étais dans une chambre d'hôpital : l'odeur des produits désinfectants, le goutte à goutte de la perfusion, le bruit des deux ou trois appareils qui se trouvaient dans la pièce ; tout cela m'indiquait que j'étais dans un endroit spécialisé pour les soins. Lentement, j'entrouvris les paupières pour ne pas être aveuglée. Tout était blanc. Les murs, les meubles, les objets, la lumière, tout. Je me redressai en position assise et retirai délicatement la perfusion. Un vertige me prit et j'attendis qu'il passe avant de sauter à bas du lit. Ce n'était pas tellement un lit d'ailleurs. On aurait dit plutôt un matelas posé sur une plaque en fer avec un oreiller le tout placé au centre de la pièce. Devant moi, mes vêtements étaient posés sur une chaise, propres et soigneusement pliés. Je les enfilai à la hâte et me tournai vers la seule porte qu'il y avait (blanche comme tout le reste). Elle était à côté d'une grande vitre, comme celles que l'on trouve dans les salles d'interrogatoires. C'était étrange, mais si on était en train de m'observer, la porte devait sûrement être verrouillée. Je m'avançai vers elle d'un pas décidé, saisis la poignée et la tournai vivement vers la droite. Il y eu un petit « clic » et un long « fshui » avant qu'elle ne se déverrouille. C'était de plus en plus étrange. Il devait forcément y avoir quelque chose qui allait sonner l'alarme ou bien me sauter dessus. Prudemment, je tirai la porte vers moi. A peine fut-elle entrouverte, qu'un brouhaha immense s'empara de ma tête. C'était pire qu'un énorme embouteillage en plein centre ville. Pourtant, la porte desservait dans un couloir blanc où il n'y avait personne. Prise de panique, je plaquai mes mains sur mes oreilles et fonçai dans le couloir. J'entendais toutes sortes de voix : des voix d'hommes, de femmes, des voix graves, des voix aigues, des voix d'adultes et des voix d'enfants. Surtout d'enfants. Il fallait que je sorte d'ici, il le fallait à tout prix car sinon ma tête allait exploser. Je courais le plus vite que je pouvais, suivant mon instinct. J'avais l'impression d'être dans un labyrinthe. Le nombre d'escaliers et de corridors que j'avais traversés était incalculable. A moins que tout ce bruit embrouillait ma tête. Je retins un soupir de soulagement quand j'arrivai devant deux grandes portes en bois massif. Je rentrai la tête dans les épaules et fonçai droit sur elle. La grande double-porte s'ouvrit quasiment toute seule et je manquai de justesse de m'écraser sur le perron. Je repris mon équilibre et jetai un rapide coup d'œil autour de moi. Le domaine était immense et recouvert de neige. Heureusement pour moi, la grille qui menait en dehors de la propriété, (et loin de ce boucan infernal) se trouvait à quelques volées de marches et au bout d'une grande allée bordée d'arbres. Je descendis les marches quatre à quatre et sprintai sur le chemin, manquant plusieurs fois de glisser sur le gravier gelé. Plus je m'approchais de la grille, plus les voix s'atténuaient. Arrivée aux trois quarts de l'allée, le silence se fit dans ma tête et je m'arrêtai essoufflée. Mes oreilles bourdonnaient encore mais je savourais ces quelques instants de silence. Je ne savais pas pourquoi ni comment tout cela a pu arriver et je ne voulais pas le savoir. J'avais l'impression que des revenants m'avaient harcelée pour me chasser de leur manoir hanté. Je jetai un regard par-dessus mon épaule comme pour vérifier qu'ils n'allaient pas me poursuivre.
On finit ce chapitre le souffle court : on court avec elle!
· Il y a environ 10 ans ·Fascinant, belles descriptions! :)
oriana