Chapitre II, Partie 3

C'était une pièce assez vaste, plutôt sobre. Sur le sol était étalé un immense tapis épais, deux des quatre murs étaient occupés par des étagères débordantes de livres anciens et nouveaux. Au fond de la pièce, il y avait un grand bureau en bois massif. Devant lui, deux fauteuils en cuir attendaient qu'on vienne les occuper et derrière lui, un immense feu brûlait dans l'âtre. A par moi et l'homme en noir, il y avait trois personnes. Je posai mon regard sur chacun d'eux et les examinai avec attention. Derrière le bureau, un homme d'un âge déjà avancé, se tenait droit dans son grand fauteuil, les mains jointes et me fixait intensément de ses yeux gris bleuté, comme s'il m'attendait. Ses cheveux courts étaient grisonnants sur les tempes et ils étaient soigneusement coiffés avec de la résine. Il était vêtu d'un costume marron et d'une chemise blanche sans aucun pli. Il inspirait la classe et le respect avec un soupçon de mystère et l'on ressentait un léger malaise à le regarder trop longtemps dans les yeux. Je détournai le regard de cet homme étrange. A sa droite, une jeune femme, grande et élancée, se tenait debout et me dévisageait de pied en cape avec un œil d'expert, comme si elle était en train de chercher un nouveau mannequin pour son prochain défilé. Elle avait de longs cheveux roux, presque rouges, qui lui cascadaient jusqu'au bas des reins. Son visage était fin, ainsi que son nez qui portait une légère monture argent qu'elle remit en place du bout de son index vernis. Ses yeux marron reflétaient la lumière des flammes donnant l'impression qu'ils étaient en feu. Elle était entièrement habillée de rouge : son vernis parfait, son rouge à lèvres, ses escarpins, sa robe, sa montre, son stylo tout était d'un rouge brillant. La seule chose qui contrastait avec sa tenue flamboyante était sa blouse blanche de scientifique. Je portai enfin mon regard vers le dernier intrus. Je le reconnu aussitôt, bien que je n'avais pas bien pris le temps de détailler ses traits la dernière fois. Je sentais la même odeur de danger et de sauvagerie qui émanait de lui et embaumait toute la pièce. Apparemment, sois les autres personnes présentes y étaient habituées, sois j'étais la seule à la sentir. Néanmoins je focalisai mon regard sur lui. Ses cheveux étaient bruns, mi-longs, emmêlés et sales. Son menton était recouvert d'une barbe de plusieurs jours et ses yeux de prédateurs, à peine visibles sous ses sourcils broussailleux, jetaient des éclairs. Sa stature était imposante. Il n'était vêtu que d'un simple t-shirt noir malgré la température glaciale de l'extérieur. Sa musculature impressionnante, saillait à travers le tissu et ses avant-bras velus devaient faire facilement la taille de ma cuisse. Une lourde chaîne lui servait de ceinture et on pouvait voir la crosse d'un revolver à travers son t-shirt. Il émanait de lui une certaine assurance mêlée à une perpétuelle colère. Mais il y avait quelque chose d'autre. Une chose beaucoup plus dangereuse et non désirée qui sommeillait au plus profond de lui mais qui, tel un volcan, pouvait se réveiller à n'importe quel moment. Peut-être sans le vouloir, il était en train de me signifier clairement que je ne voulais pas savoir ce que c'étais (ce n'était pas une question, il ne m'avait pas demandé mon avis) et que si jamais « le monstre » qui stagnait en lui venait à se réveiller, il valait mieux pour moi que je ne sois pas dans les parages.