Chappie le gangsta robot.
daniel-m
Chappie, sorti en 2015, est le dernier long métrage en date de Neill Blomkamp, jeune réalisateur à la double nationalité sud africaine et canadienne. Ayant démarré très fort avec son fameux « District 9 » et un « Elysium » moyennement bien accueilli, Neill Blomkamp nous offre son robot « Chappie* » qui n'aura finalement, pas fait de grosses étincelles en France et c'est un peu dommage. Neill Blomkamp devait réaliser ensuite « Alien 5 » avec un certain recul, mais papa Ridley Scott a été prioritaire sur la franchise avec son fameux « Prométhéus » et son « Alien Covenant » que personne n'a vraiment compris, un peu comme si l'ancien maitre devenu sénile, voulait toujours se la péter. Sur ce, le jeune réalisateur très doué et aux dents longues, créé sa propre maison de production « Oats production » et a commencé le tournage d'une série de courts métrages de SF dont le premier a été publié gratuitement et en trois actes et en vingt minutes sur internet. A mon sens, Blomkamp a mouché la carrière de R. Scott pendant ces vingt minutes et peut être même sans le vouloir, mais c'est véritablement saisissant. Voici « Rakka », court métrage et premier épisode d'une saga de Neill Blomkamp, nouveau génie de la SF et de l'image. Voyez plutôt.
https://www.youtube.com/watch?v=VjQ2t_yNHQs
* ‘Chappies' est une marque de chewing gum et de confiseries fantaisies très populaire en Afrique du Sud. Dans le film, le robot est baptisé un peu à l'improviste, avec un nom populaire. Ceci expliquant simplement cela.
Synopsis...
Dans un futur proche, la population est opprimée par une police entièrement robotisée. Chappie, l'un de ses droïdes policiers, est kidnappé. Reprogrammé, il devient le premier robot capable de penser par lui-même. Mais des forces destructrices considèrent Chappie comme un danger pour l'ordre établi. Elles vont tout faire pour s'assurer qu'il soit le premier, et le dernier de son espèce. (Synopsis tel que l'on le trouve sur le dos de la jaquette du Blu ray.)
Ne vous fiez pas au synopsis qui n'est que ce qu'il doit être, un résumé hyper condensé de l'histoire. Hélas, en ce qui me concerne, il ne me donne pas vraiment envie de voir le film. Métaphore d'un « reset » de l'humanité, Chappie séduit par sa naïveté et son regard neutre sur une humanité en péril. Neill Blomkamp est surveillé par son public depuis « District 9 » qui le suivra un moment encore je pense. Il est toujours difficile pour un réalisateur qui a commencé très fort avec un premier film, de continuer à convaincre et à séduire son public. Héritiers d'Elysium, du moins en ce qui concerne leur création graphique et artistique, les Scouts (policiers robots) découlent directement de cette histoire de monde « capitaliste » vivant à la solde des miséreux restés sur terre. Neill Blomkamp semble cependant encore privilégier ici l'action et les scénarii abordables par le plus grand nombre, au détriment du côté hétéroclite de District 9, avec ce « Chappie » très particulier et malgré tout osé dans un contexte cinématographique saturé par le sujet.
Les œuvres cinématographiques du genre, celles qui parlent de robots et d'intelligences artificielles, sont un peu éculées maintenant au cinéma et en cela, Chappie est donc déjà une véritable gageure. Rien que cela devrait motiver l'amateur du genre à voir le film. Le récent et non moins excellent remake de Robocop était il déplacé ou simplement génial ? Le public sera seul juge. Balancer des flics robots à Johannesburg pour mettre à plat la corruption tout en engraissant une société civile et privée en essayant de nous faire oublier par la même occasion le fameux « District 9 » qui était une sorte de métaphore de l'apartheid, … il fallait quelque part oser !
Mais, force est de constater que cela n'est pas vraiment le sujet principal de ce film. Agent droïde et froid, mis au rebut, le « Scout 22 » se voit implanter contre toute attente, un programme d'intelligence et de conscience artificielle vierge, totalement confidentiel et expérimental. Scout 22 deviendra malgré lui Chappie, un « être » nouveau, non organique mais pur, qui aura tout à apprendre de la vie et de l'univers hostile qui l'entoure…
Chappie est déconcertant en fait. Dans un contexte de quasi guerre civile et de guerre de gangs, N. Blomkamp nous fait le coup de l'enfant sauvage mécanique confronté aux dures réalités de l'humanité et de l'insupportable réalité aussi artistique que déjantée d'un couple de gangsters interprétés par le groupe « Die Antwoord » composé de Yo-Landi et de Ninja qui jouent ici presque leur propre rôle d'arrières petits héritiers de Bonnie and Clyde, que même Gainsbourg n'aurait pas imaginé. Die Antwoord est un groupe de hip hop alternatif d'Afrique du sud actif depuis 2008. Le groupe n'a pas cependant encore franchi les frontières de son pays au niveau notoriété. C'est Hans Zimmer qui signe cependant en grande partie ici la BO du film, que je trouve plutôt sympa.
Graphiquement et photographiquement, Chappie sous les capteurs de la motion capture est interprété par l'acteur fétiche du réalisateur, à savoir l'excellent Sharlto Coplay, que l'on ressent finalement très peu en visionnant le film. D'un point de vue technique, d'effets spéciaux et de post production, le film est une réussite. L'univers chaotique dans lequel évoluent nos héros, est très abouti et l'on entre sans problème dans le contexte que le début du film nous expose brièvement mais d'emblée de manière très efficace. Pour faire simple, il y a les gentils, du moins au début, qui sont, le gouvernement et la société Tetravaal, qui existe pour fournir des outils efficaces contre les méchants, à savoir des cartels de trafiquants de drogue, des braqueurs de banques et divers gangs pas vraiment identifiés. Un « décor » tellement simpliste et basique qu'il pourrait presque nuire à l'intérêt du spectateur. Mais l'histoire de Chappie n'est pas là, car très vite l'on s'intéresse à la star du film qui est bel et bien ce robot doué d'une conscience et d'une âme vierge de croyances et de religions, à l'instar de n'importe quel être humain qui viendrait au monde. Chappie doit cependant tout apprendre de ce monde et l'apprendre très vite. Chappie, comme n'importe quel être humain, n'a pas choisi son lieu de naissance, sa catégorie sociale ou son pays. Mais Chappie, comme n'importe quel être humain est au départ foncièrement bon, naïf et avide de connaissances. Le film essaye de nous démontrer, mais hélas sans trop y mettre l'accent et, cela à l'avantage de scènes de guerres assez spectaculaires, comment l'environnement, le proche entourage, la famille et leurs intentions (bonnes ou mauvaises), peuvent influencer la destinée d'un être. J'ai trouvé que l'idée de mettre de l'humanité dans une machine tout en lui confiant inconsciemment l'avenir de humanité qui elle, n'en avait plus justement, de l'humanité, très touchante et très révélatrice de notre époque. En fait, l'on se rend compte que Chappie et son créateur sont les seuls réel « gentils » de l'histoire et c'est angoissant …
Chappie n'est pas un grand film de SF à proprement parler, mais c'est un super film sur le devenir de l'homme, de sa culture et de son savoir et je ne peux que regretter que cela ne soit pas traité plus profondément dans ce film, mais probablement qu'une fois de plus, popularité et box office obligent, l'accent a été mis sur le côté spectaculaire et divertissant, les scènes de bagarres et d'attaques particulièrement bien filmées et mises en images. Les contrastes entre les scènes touchantes d'un robot plus humain que les humains et la violence que peuvent engendrer l'incompréhension entre les deux, sont remarquables. Cela n'est pas cependant sans déstabiliser le spectateur qui se régalera à défaut, du phénoménal cassage de gueule infligé à Hugh Jackman qui interprète ici un excellent méchant, jaloux et envieux, par Chappie le gentil robot gangster, à la toute fin du film. Chappie oscille perpétuellement entre le divertissement du plus pur jus Disney et la SF selon Neill Blomkamp le réalisateur de « District 9 » et en cela il est déstabilisant. Mais il y a aussi le fait, qu'à travers cette histoire très touffue et complexe a raconter, le réalisateur a été obligé visiblement de faire des choix. La naissance de Chappie, son évolution, tout cela va très, trop vite et c'est dommage, car c'est bien là qu'était l'essence de ce film. Cela dit, le mélange des deux n'est franchement pas désagréable, la preuve, je l'ai déjà visionné deux fois avec à chaque fois un immense plaisir ! Finalement, Chappie est un film un peu ovni mais très divertissant. Paradoxalement, malgré ses quelques aspects bon-enfant, c'est aussi un film plutôt dur et violent destiné à un public averti. Inutile aussi de vous dire que je vous le recommande :o)
« Ce qui énerve Chappie chez les hommes, c'est que les hommes n'arrêtent pas de mentir ! » - Chappie.
Sharlto Copley est Chappie
Dev Patel est Deon
Hugh Jackman est Vincent
Sigourney Weaver est Michelle Bradley
Yo-Landi et Ninja du groupe Die Antwoord dans leur propre rôle.
Bande annonce :
http://www.allocine.fr/video/player_gen_cmedia=19550721&cfilm=189702.html
En conclusion, je dirais simplement que ce que j'aime chez Chappie, c'est que malgré son côté trop « Walt Disney » il a su garder, grâce au talent de son réalisateur, un côté SF pur et dur. Que Monsieur Blomkamp est un vrai auteur de SF et qu'il n'a pas, malgré le poids du marketing cinématographique du moment, peur de prendre des risques. A suivre !
Tu devrais être chroniqueur dans une revue cinéma :)
· Il y a plus de 6 ans ·Sy Lou
Merci, j'aimais bien ça, chroniquer des films à ma sauce. Après, ça prend du temps, cela demande des recherches etc. J'ai tenté "allociné", mais y pondre gratuitement une critique documentée pour 500 avis de gens qui n'ont même pas vu le film, j'ai déjà donné.
· Il y a plus de 6 ans ·daniel-m
eh bé, belle critique, qui donne envie de voir ce film, de toute façon je suis assez bon public pour la SF, que j'ai toujours aimé en film ou en livre, maintenant y a de ces nanars pas possibles aussi là-dedans...
· Il y a plus de 6 ans ·arthur-roubignolle
Merci ! Moi j'aime tout à partir du moment où ça me touche. J'aime bien la SF, même si de plus en plus l'on confond la SF avec le cinéma fantastique. Star Wars, c'est bien mais ce n'est pas de la SF. "Transperceneige" c'était de la vraie SF, mais ça a fait un flop, ... et pourtant.
· Il y a plus de 6 ans ·daniel-m