Chère Mamie 5

mywritings65

Salut Mamie...

 

Je sais, ça fait des mois que je ne t'ai plus écrit. Je me suis trop concentrée sur Dimitri, sur ma peine de ne plus le connaître, mes regrets, tout ça.

 

J'ai envie d'écrire alors... tu me connais... J'écris.

 

J'ai juste envie de crier pour l'instant. Tout ce que j'aimerais crier, là, maintenant, c'est POURQUOI T'ES PAS LA ?! Pourquoi il a fallu que tu partes si tôt ?! Tu pouvais pas me laisser seule avec toutes ces histoires sur mes épaules ! J'allais avoir quatre ans Mamie, t'aurais pu attendre une semaine de plus, avant de... partir.

 

Oui Mamie, j'aurais aimé que tu me prennes dans tes bras et que tu me dises que la vie n'est pas facile. J'aurais voulu lire tes cartes d'anniversaire où tu m'y aurais écrit que 20 ans est un bel âge, que la vie nous ouvre ses portes et que je m'amuserai comme une dingue. Tu aurais pu me tenir la main à l'enterrement de Dimi, on se serait échangé nos mouchoirs !

 

Et, plus important encore... J'aurais eu une grand-mère. Aujourd'hui j'en suis à avoir les larmes aux yeux en voyant des grands-parents chérir leurs petits-enfants tout ça parce que c'est une chose que je n'ai jamais connue !

 

Je n'en suis plus à t'accuser parce que soi-disant tout ce qui m'arrive est de la faute de ton décès, de ce fichu 28 octobre 1996. J'ai grandi Mamie. Je crie mais je ne pense rien de ce que je dis ! Non Mamie, je ne t'en veux pas... C'est juste que je ne comprends pas.

 

Les grands-parents qu'il me reste sont faux. Ils sont comme ils sont. Je ne peux rien dire de plus parce que c'est la honte d'en parler. On me l'a toujours interdit alors que je me fiche éperdument de tout ça. C'est pas eux qui me définissent ! Même si les gens finissaient par les connaître, ils ne me haïront pas pour ça, je ne suis pas eux ! Mais c'est dur Mamie. Je n'ai pas la mentalité pour avaler des affaires pareilles. Je les appelle même pas "mamie" ou "papy" mais par leurs prénoms. Ces gens ne sont rien. Ils nous appellent quand ils ont besoin de nous et après ? Oui, oui, elle range la maison mais faut pas venir. Foutaises ! Et ils sont pas fichus de payer pour mettre du betton ! Bah nan pardi ! Faut économiser ! Leur maison est tellement une poubelle qu'on en est là : des étrangers déposent des trucs chez eux comme si leur jardin était un conteneur ! Abusé.

 

Et je crie tout ça intérieurement, Mamie. J'hurle ! Mais je peux rien dire. Après on va encore s'étonner que j'explose. Mais y'a pas qu'eux qui jouent dans mon cri. Mais je peux rien dire... ou neveux rien dire. C'est vrai, je peux pas publier tout sur Internet. J'en ai déjà trop dit.

 

Enfin soit. J'aime mes études, Mamie. J'ai enfin trouvé ce que je voulais vraiment faire. Et les gosses m'aident vraiment ! Je peux pas m'empêcher de sourire quand j'en vois un. Ils sont pleins de vie et la vie leur paraît tellement simple.

 

Je suis désolée, Mamie. Je n'ai jamais pris la peine de m'excuser. Je suis désolée de t'avoir toujours jugée responsable de tout ce qui m'arrivait. Je suis désolée que tu aies dû me voir pleurer toutes les nuits jusqu'à en avoir mal au coeur. Je suis désolée que tu aies dû voir toutes ces choses que j'ai faites et dont je ne suis pas fière. Mais aujourd'hui je suis une jeune femme de 20 ans, plus mature, qui n'a plus l'intention de refaire ces choses. Je suis désolée de contenir mes larmes devant ta tombe mais je veux toujours paraître forte.

 

Un jour je deviendrai écrivain. Je le sais. C'est inscrit en moi depuis que j'ai 7 ans. Faut le temps que je ponde un truc correct et qui tienne la route. Mais je le ferai. Pour toi. Parce que même si tu as disparu neuf jours avant mes quatre ans, je sais que tu m'accompagnes toujours. Tu as toujours été là. Et c'est ça une Mamie. Mais toi c'est différent. Parce que t'es là mais je ne te vois pas.

 

Je sais, j'arrête pas de t'appeler "Mamie". Ca fait tellement longtemps que je n'appelle plus personne ainsi que j'en profite. J'ai le souvenir d'être partie dans un mutisme après ton décès, quand on faisait les présences lors de l'accueil en deuxième maternelle. Je ne comprenais pas pourquoi je ne te voyais plus chaque dimanche, pourquoi je ne pouvais plus m'amuser dans cet escalier en colimaçon, pourquoi je ne jouais plus sur ton piano. Plus tard, j'ai eu peur de descendre les escaliers et j'ai eu horreur du piano. C'est à partir de là que j'ai dû me dire que tout était de ta faute. Mais malgré tout je t'aimais toujours. Et je t'aime encore et toujours, Mamie !

 

Je t'aime !

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