Chez Yvon et Laetitia.(1)

Avec Betty, on arrivait à faire du Gloubi Boulga de tout. On mélangeait tellement n'importe quoi, qu'on finissait par fabriquer de la pâte à dentifrice sur de la mauvaise haleine, ainsi que de la pâte à choux pour des fleurs.

Chez nos amis on se faisait recevoir avec les dents parce que nos pieds n'étaient pas toujours dans des pantoufles : notre humeur sentait peu la lavande et parfois plus la pharmacie de 20 heures que l'extrait de vanille.

« Faut enlever tes talons Betty, tu risques de rayer notre moquette ! »

Chez Yvon et Lætitia, il y avait du Mohair sur tous les sols et 50% de Cachemire dans les sous-vêtements.

Lætitia vendait à domicile des slips brodés et des soutiens-gorge en dentelle pendant que son mari, des tapis sur des foires à l'abri des regards :

 « J'aime pas mon travail, mais faut bien vivre ! Quand t'as fini de payer ton gasoil, t'es bien content d'avoir un bout de tomate dans ton assiette ! »

Yvon aurait pu faire journaliste ou acteur : il avait toujours quelque chose à dire sur rien et était forcément contre tout : il avait son avis sur le soja et sa dose de méfait quant à la Javel sur les mains en cas d'épidémie. Yvon avait la philosophie d'un Delon mais pas son physique : c'était con pour lui mais c'était ainsi.

Yvon s'essayait sur des pièces de théâtre le samedi à la salle municipale, car c'était ça qui le faisait tenir, bander debout : « Si y avait pas le théâtre, je sais pas ce que je pourrais faire d'autre ! Le théâtre c'est ma cocotte... c'est ma soupape, tu comprends ? »

Lætitia aimait Yvon comme une chatte au soleil de sa terrasse : elle ronronnait de douceur à l'ombre de son matou :

- Mais t'es bien tout beau mon chéri aujourd'hui ! Tu vas où dans ton costume ?

Quand Yvon se glissait dans son 31, il y avait de l'anguille sous roche : la rivière tombait de la montagne, le paon de sa roue.

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