Chronique du père JC n°5

Jean Claude Blanc

encore et encore...

        Chroniques du père JC,                                               N°5

 

Salut les auvergnats,

 

J'ai bien eu de vos nouvelles ; et puis je suis allé chez l'Antoinette, elle m'avait invité pour le café ; ah ! là, y'en a une dure ; de la famille, c'est pas pour rien ; c'est qu'elle y monte, elle aussi

Plus de 80 ans, elle a encore 2,3 chèvres mais elle est couverte de rhumatisme, et bin, ça fait rien, tu peux y aller elle prend encore son bechu, pour faire les biefs, et puis pour manger faut pas lui en promettre ; le curé est passé, pour sa revue, « le fil de l'Ance », je m'y suis abonné, mais y'a pas grand-chose, les baptêmes bien rares, les mariages, j'en parle même pas, mais pour les morts, là y'a du monde.

Enfin, on a bu la goutte, lui y craint pas ; elle qui croit ni dieu, ni diable, elle lui a pas envoyé dire

« savez mon brave monsieur le curé, j'ai pas besoin de confesser, allez voir vos bigots, avec leur mine d'ange, y z'en ont sur la conscience… »

Je lui ai quand même dit, de venir bénir le rameau de la cheminée, parait, ça chasse les orages ; mon pauvre père, me l'a assez dit ; « quand y tonne, c'est le démon, qui roule sa femme dans un tonneau »

Y s'en est tellement dit dans le temps, sur les histoires du Coq Noir, eh, bien le diable il est venu un soir de bal, il a emporté, la neuille (fiancée) de Sichard, on l'a jamais plus revue ;

J'y crois pas trop, à ces conneries, mais on sait jamais, des fois, j'en ai pas honte, je vais faire brûler un cierge à l'église, vaut mieux s'y préparer, si jamais, on passe l'arme à gauche.

Alors, notre Antoinette, vous la connaissez, elle vous donnerez sa chemise ; elle avait des chèvretons, elle m'en a ployé un dans ma poche de mon veston ; pas moyen de payer ; « viens plutôt me voir plus souvent, ça me fera, bien plus plaisir », qu'elle m'a dit

On s'est coutargé, enfin discuté tout l'après-midi, des histoires en patois, elle en connait un rayon ; et comme moi, j'aime l'écouter, on n'a pas vu le temps passer.

Vous aimez bien mes racontars, pourtant suis pas bien calé, j'écris, comme ça vient, même qu'on me prend pour un idiot ; tant pis, je laisserai ça à mes gamins, qu'ils se débrouillent

Bon, quoi de neuf au pays…y fait beau, déjà pas mal, je bouge pas de ma maison, à part aujourd'hui ; les voisins, c'est que des vieux, remarque, je devrais me regarder

L'autre, y sucre les fraises, et sa bourgeoise, elle jure comme une patère, elle toujours perdu quelque chose ; ça lui passe le temps, des fois, j'aime bien la faire ronfler, ça marche à tous les coups ;

Remarque, elle bien brave, elle m'écarte les taupes, et a toujours un œil sur ma baraque

 

Et vous, les plus heureux, à la ville, quand je dis ça je devrais pas me plaindre, je vous envie pas, ma pipe, mes guenilles et mon atelier, ça me suffit

Putain, qu'est-ce que disait, ah oui… y parait, c'est les soldes chez vous, mais je veux pas aller m'entenailler, avec ces bohémiens, la mort au bec, y te défroqueraient, en un rien de temps

Suis encore bien réveillé, y'a pas beaucoup de femmes, quelques vieilles qui égrènent leur chapelet, et encore, y'a pire, ces mal mariées, qui manquent pas de toupet, s'invitent chez toi, juste pour bavasser, suis pas tombé de la dernière pluie.

Ça me fait bien plaisir, d'avoir de vos nouvelles, mon gamin, y va revenir sur Clermont en avril,

J'espère qu'il vous avertira, vous l'avez tellement gâté

Moi, je suis coincé ici, demain samedi, faut que j'aille aux courses, oh ! je traine pas, les qu'en- dira-t-on, ça me lasse ; faudra peut-être bien venir me voir, ma maison a jamais tué personne ; et puis le garde-manger est plein et cet hiver, va bien finir ; bon, faudrait que j'aille me coucher ; portez-vous bien en attendant ; ma tisane, ça fait pisser, tant pis, avant j'y allais à l'écurie, enfin j'ai mon pot de chambre ; allez, salut les auvergnats…

Je devrais pas vous le dire mais y'a un journaliste qui s'intéresse à mes âneries de vieux garçon, me direz pas, c'est là que ça se tient….              Mars 2015 JC Blanc (chronique)

Signaler ce texte