Chroniques d'une sortie de route volontaire-13

romualdmartin

Chroniques de ma promenade dans le monde des vivants

Venant de récupérer un miroir, je viens de m'apercevoir que vivre chez soi en calebar demande plus de courage qu'on ne le pense. A chaque fois que je passe devant, y a ce gros bide posé sur des cannes de serin qui me regarde d'un œil. Y a rien de complaisant qui s'écrit sur ma sale gueule. A croire que toute ma viande s'est foutu d'accord pour que je ne m'aime pas.

Je pourrais faire du sport et montrer ma gros queue sur les plages une fois que les tablettes auront poussées, je pourrais pleurnicher comme le font les grosses avec leur cul en motifs canapé, je pourrais me foutre par la fenêtre, je préfère me dessiner sur le gras et faire danser le tout quand je suis saoul.

Il y a des usages pour cacher tout ça, pour se camoufler. Mais en ce qui me concerne, j'ai la flemme, j'ai un arbre dans chaque main et ils font douloureusement concurrence a celui que j'ai dans l'entre jambe.

Je suis coincé entre « m'en branle des fringues «  et « laver le linge ça me fait chier ». N'importe quelle connasse de moins de cinquante ans te dira que c'est quedal, fière d'être une ménagère bien éduquée par la pub et les tartes dans la gueule de son ex.

Ça commence par un « c'est simple pourtant » suivi de la grande tirade « tu mets le linge dans le tambour, tu regardes la température, ce qu'on appelle le programme » dira-t-elle d'un ton méprisant puis enchainera, comme un catcheur qui te file pas de répit «tu mets la lessive dans le bac prévu à cet effet, et tu appuies sur le bouton de démarrage »

Expliqué comme ça, ça parait con. Mais dès qu'on parle d'assouplissant, de petites boules à foutre dans le linge, de lingette anti bavures de couleur, je suis largué. Je n'ai pas signé pour comprendre cette partie de la psychologie féminine.

Du coup je traine en caleçon le plus longtemps possible avec la profusion comme simple solution. Je fais du stock, j'achète plus que je ne salis, après tout, ça fait marcher le commerce.

Je n'aime pas non plus suspendre dans ma piaule les cadavres des journées précédentes, c'est comme ça. J'ai l'impression de regarder des falzars aux poches pleines de ce que j'ai loupé, des chattes que je n'ai pas prises, des verres que j'ai renversés, des gerbes que j'ai posés comme des trophées.

La lessive c'est une fois tous les quinze jours. J'écoute la dame, voilà comment ça se passe.

J'ouvre la merde en plastique ou j'empile le tout, je ne vais pas vous dire que ça sent la rose, ça serait mentir.

« Tu mets le linge dans le tambour » C'est fait, je farcis le bordel, je laisse de la place pour que l'eau circule, je ne suis pas si con que ça

« Tu regardes la température » Comment je devine à quel température on fait cuire les fringues ? Y a les étiquettes il parait, des romans ouais. Sur certaines fringues c'est même écrit qu'il ne faut pas les bouffer. Mais bon, être pris pour des cons, ça n'a pas l'air de déranger grand monde.

« Tu mets la lessive » Faut prendre laquelle ? L'hypoallergénique aux extraits de guarana, celle sans parabène aux extrait de violettes chimiques, la concentrée qui nettoie dans les coins, la spéciale tâches difficiles, personne te le dit, de quoi ruiner des jours de fringues en jouant au chimiste.

Une fois le check effectué, je lance le bordel. Une heure de cassage de tête, ou t'as l'impression d'être assis dedans.

J'ai les migraines qui pointent, du linge mouillé, de la suspente dans l'appartement, faudrait presque une machette pour circuler.

Y avait une promotion sur les caleçons dans une boutique au bout de la rue, je vais encore profiter de l'été finalement, ça m'évitera les médocs anti mal de crane, des trucs qui s'égouttent sur le parquet.

Je n'ai pas toujours des journées passionnantes.

 

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