Circulez, y'a rien à voir

kelen

Le 12 février, sur le plateau de TF1, Sarkozy a multiplié effets d'annonces et provocations en tous genres.

Nicolas Sarkozy était invité jeudi 10 février à l'émission « Paroles de Français » sur TF1. Visiblement en charge de la communication de l'Élysée, la chaîne privée a présenté cette émission comme un moment privilégié de discussion entre Sarkozy et les Français. Ce que l'on en retiendra est tout aussi clair : le président se trouve à des années-lumière des préoccupations des Français, n'entendant même plus leurs questions (à moins qu'il ne fasse exprès de répondre à côté...).

Selon Sarkozy, « le monde change »... et pourtant rien de nouveau, bien au contraire ! Toujours plus de répression avec une nouvelle loi sur la délinquance des mineurs, la mise en place de jurés populaires et le développement de la vidéosurveillance.
Minimisant la grève des magistrats, Sarkozy se contente d'une discussion avec eux pour mettre l'accent sur le pénal, expliquant que tout n'est pas une affaire de moyens – comme pour l'éducation et la santé, balayant avec mépris les revendications légitimes de ces professions.
Pour le pouvoir d'achat, tout est de la faute des 35 heures, le problème n'est pas de mieux indemniser les chômeurs mais d'augmenter la compétitivité des entreprises. Car bien entendu, s'il y a moins de compétitivité, il y a délocalisation... Donc travaillez plus, et tout ira mieux.
Paraissant déjà en campagne présidentielle, Sarkozy n'oublie pas de caler une petite ode à l'ouvrier... et de verser presque une petite larme en évoquant les victimes du Mediator ou les malades d'Alzheimer. Des micro-promesses qui s'apparentent plus à de l'agitation qu'autre chose.
Concernant l'emploi, grand prince, il « offre » un demi-milliard d'euros pour la formation des chômeurs de longue durée... ponctionné sur d'autres budgets bien évidemment ! Le système de « bonus-malus » pour les entreprises qui prennent ou pas des apprentis est censé sauver l'emploi des jeunes. Des jeunes qui n'auront pour seul choix que de rentrer au plus vite dans le monde du travail, qu'ils soient à l'université ou ailleurs. Ce sera leur seule perspective : être compétitifs.

Tout va bien...
La santé, qui est de plus en plus au cœur des préoccupations de la population, est elle aussi expédiée puisque selon le président, il n'y a jamais eu autant de médecins en France. La simple multiplication de maisons médicalisées et les mesurettes sur la dépendance suffiraient donc selon lui. La priorité cachée étant surtout d'engranger le plus possible de profits sur le dos de notre santé.
Concernant les voyages de ses ministres, rien ne lui semble anormal, aucune faute n'étant relevée. Alliot-Marie et Fillon peuvent bien prendre tous les avions privés qu'ils veulent, cela ne pose donc aucun problème à Sarkozy, tout va bien. L'exaspération de la population ne semble pas avoir d'impact sur ce dernier qui gouverne hors-sol, et probablement aussi dans une autre galaxie.
La précarité, l'emploi, la santé, l'éducation, la justice... tous ces sujets ont été à peine effleurés lors de cette soirée, qui n'a eu pour but que d'appuyer la propagande de Sarkozy et vanter le libéralisme.
Aucune remise en question de sa politique, aucune considération envers ceux qui expriment des difficultés quotidiennes. La seule réponse a été une fin de non-recevoir.
Pour Sarkozy, ce soir, le seul échec de la France, c'est le multiculturalisme, « source de nombreux problèmes ». D'ailleurs pour lui, le danger vient de l'islam. Cette « menace » a été qualifiée par le président dans des termes caricaturaux qui ne laissent aucune ambiguïté sur sa vision de cette religion qui selon lui ne garantirait pas « l'égalité entre les hommes et les femmes », « la liberté pour les petites filles d'aller à l'école », ou la conservation d'un mode de vie « à la française ».
Cette stigmatisation ne laisse aucune doute sur le type de politique sécuritaire et raciste qu'il continuera d'appliquer dans les mois à venir dans l'optique des élections de 2012. Un discours fort instructif sur ce qui nous attend mais qui ne présage bien évidemment rien de positif.
Coralie Wawrzyniak

Publié dans : Hebdo Tout est à nous ! 90 (17/02/11)

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