Come Black to Me

Tu ne feras sans doute que te protéger
là comme ils le font tous.
Tu ne feras vraiment que te désagréger
pour ne pas qu’ils t’y poussent.
Tu sais si les démons
arrachent les ailes des anges,
c’est pour les priver de leur liberté
autant que pour s’en déguiser.

Grimant et vêtant de force leurs impairs
de ténèbres qui ne sont pas les leurs,
ils déguisent les plus blanches
jusqu’aux plus transparentes
âmes que la Terre a portées.

Tu arrêteras de dormir,
te mettras peut-être à vomir.
Tu ne voudras plus te nourrir,
te mettras peut-être à mourir.
Et lorsque tu auras vu en face
que tu n’avais lu que le préface
d’une vie si douce dans ses balbutiements,
quand tu verras le sang séché sur le ciment

alors tu me reviendras en noir.

Moi je verrai encore tes ailes
même si tu as deux cicatrices sur le dos.
Moi je dirai que la vie est belle
mentant à moi, à toi pour alléger ton fardeau.

Tu as arrêté d’avoir faim…
pas vrai ?
Avec ce corps gracile
que moi seul ai touché du bout des doigts,
tu n’es qu’un adolescent
qui cache si bien le vieillard en lui.
Tu penses déjà
que toutes ces années sont indécentes
pour un être humain, n’est-ce pas ?

C’est parce que tu n’es pas comme eux
que tu es dégoûté.
C’est parce que tu viens d’un ciel bleu
que tu es dérouté.

Tu ne peux pas les voir
dans ton propre miroir,
alors tu as l’impression que tu es seul :
c’est vrai tu es l’intrus parmi tous ces veules.

Tu arrêteras sans doute de rêver
et tu n’auras plus envie de te lever.
Et parce que l’humain devient ce dont il a peur
pour s’y fondre jusqu’à ne plus sentir son horreur,

tu me reviendras en noir.

Même si à l’intérieur c’est blanc,
tu te diras que c’est désolant,
qu’il vaut surtout mieux le cacher,
que tu ne veux pas tout gâcher…

Puisque la seule solution est de rester humain,
puisque la solution est le plus grand problème

alors tu me reviendras tout en noir,
je sais que l’habit ne fait pas le soir.

(écrit sur une impulsion le 6 août 2013)