Conversation avec Dieu

Hervé Lénervé

- Avez-vous bien dormi ? Moi très bien, c’est au réveil que ça n’allait plus tellement.

Je vous demande cela, alors que je suis occupé à une autre affaire. En effet, debout, nu comme un ver et comme au premier jour de ma création, si ce n'est qu'aujourd'hui, c'est le dernier. Oui ! Je suis mort, on ne va pas en faire toute une histoire, cela arrive tout le temps et à tout le monde, alors ? Le créateur m'est en vis-à-vis, mais lui, est décemment habillé d'une toge blanche. Blanche, c'est vite dit, car elle est plutôt douteuse, maculé des reliefs de son dernier repas. Tâches grasses de mayonnaise à droite, de jus de tomates à gauche et plus bas, sur le bas ventre, d'autres plus suspectes dont je préfère ne pas connaître l'origine.

Ah, j'oubliais, c'est vrai, vous voulez que je vous le décrive, car on manque cruellement de photo du Grand Manitou.

Hé, bé ! Il n'est même pas barbu, il a un visage ordinaire, il me fait penser à Galabru, vous savez l'acteur décédé, lui aussi, je dis aussi pour moi, le Créateur est peut-être encore vivant, lui, bien qu'ici, on ne sache plus grand-chose en la matière. Il a également le corps de Galabru, gros, inélégant, même pas majestueux, un corps de celui qui se fout de son corps et ne le respecte pas. Il me parle. Merde, il a la voix de Galabru aussi, finalement Galabru, c'était peut-être Dieu et dire qu'on le prenait pour un Con. C'est un Monde, quand même que le nôtre.

-         hervé ! Je ne suis pas ravi de te voir.

-         Enchanté, moi aussi !

-         Pas d'impertinence, veux-tu ! Je lis, ici,

Et là, pour mieux lire certainement, il retire ses grosses lunettes à monture d'écailles de tortues, made in China, pour les essuyer avec un pan de sa toge essuie-tout. Je me retiens de souligner qu'il est impossible de faire confiance à l'Omniscient chaussé d'un artéfact pour bien voir. Il poursuit et moi je reste coït.

-         Que tu as vécu en ignorants tous mes préceptes.

-          Oh, là, vous m'étonnez monsieur ? Comment, dois-je vous appeler, monsieur ?

-         Restons simple appelle-moi, Seigneur ou Maître, mais pas Maître Seigneur, je n'aime pas.

-         Vous avez raison, restons familiers, je vous nommerai Pépère.

-         Non ! Pas pépère, je n'aime pas.

-         Papa, alors ?

-         Pas papa, non plus ! Appelle-moi, Seigneur et c'est tout.

-         C'est un peu long, Seigneur Jésaistout, mais si vous y tenez.

On peut toujours fayoter un peu, ça ne mange pas de pain.

-         Non ! Seigneur, tout court.

-         On ne va pas se quereller pour des broutilles, Seigneur Toucourt !

-         Tais-toi et écoute ma voix, plutôt !

J'écoutais attentivement, mais il n'y avait aucun autre son que sa voix, qu'aurais-je bien pu écouter d'autre ? Il manquait de cohérence le Seigneur Toucourt, il était peut-être gaga, vu son grand âge.

-         Tu n'es pas un bon sujet, hervé, je t'ai créé comme tout autre et tu ne m'as pas honoré et respecté. Tu t'es cru au-dessus de Moi, supérieur à mon œuvre. Quelle présomption, pour un simple humain de secondes classes.

-         Secondes classes, secondes classes, j'ai quand même été jusqu'au Certificat d'Etudes.

-         Que tu as raté !

-         De peu, because que j'n'avais pas de lunettes, moi, et toc, pour copier sur mon voisin.

-         Justement parlons-en ! Toute ta vie n'a été que tricheries, tromperies, escroqueries et j'en passe.

-         Oui ! Passons, vous avez raison !

-         Tais-toi ! et assois-toi !

-         Il n'y a pas de chaise.

-         Tu ne sais décidemment rien !  L'homme ne peut-il s'asseoir sans chaise ? Ai-je conçu l'homme avec une chaise en accessoire ?

-         Je m'assois par terre, alors ?

-         Il n'y a plus de Terre ici, on est au Ciel.

-         Ok, je m'assois par ciel et par vaux, alors ! En lotus, ça ira ?

-         Méfie-toi, hervé, je n'aime pas l'ironie.

Je me posais intérieurement la question intérieure de savoir ce qu'il pouvait bien aimer à part les frites à la mayonnaise, en me posant par ciel ? Par prudence, je taisais mes interrogations introspectives. Et Galabru reprit.

-         Crois-tu que tout te fut donné, sans contrepartie ?

-         Je n'aime pas les contrepèteries !

-         Je t'ai donné vie.

-         C'est gentil, mais je ne vous avais rien demandé. S'il me plaisait, à moi, de rester dans le néant.

-         Les hommes ne me demandent pas, je les fais, c'est tout.

-         Ça c'est vrai, car tous ceux qui vous prient, chaque jour, pour être exhaussés, attendent encore vos réponses.

-         Ils n'en auront pas.

-         J'ai bien fait de ne pas vous importuner de mes prières, alors !

-         On ne prie pas pour demander, on prie pour me célébrer.

-         Oui ! Et ça sert à quoi, vous ne pensez pas être assez célèbre, comme cela !

-         Je suis comme je suis et tel je suis, ce n'est pas à l'homme de me commenter.

-         Je ne commente pas, je critique. Vous n'avez jamais levé le petit doigt pour stopper les guerres, les meurtres, les tortures qui étaient faits en votre nom.

-         Je n'interviens pas dans les histoires d'hommes.

-         Vous servez à quoi, alors ?

-         Je vous ai créé libres à vous d'écrire votre Terre.

-         Elle agonise !

-         La faute à qui ?

-         A Nous !

-         Bien, donc tu vois, je suis sans reproche.

-         je réitère, donc, ma question, à quoi bon vous louer, si vous êtes impuissant.

-         Je suis omnipotent, mais pas pour vous.

-         Pour qui, alors ?

-         Pour personne.

-         La belle affaire, d'avoir la puissance suprême pour ne rien en faire, autant la laisser à un autre plus motivé.

-         Je n'ai pas d'équivalent.

-         Mais un contraire, le Diable.

-         Ha, ha ! Le diable un pantin à cornes. Juste bon à effrayer les enfants.

-         Moi, pour effrayer les enfants, je n'ai pas besoin de dieux, j'ai un martinet.

-         Parlons en justement, es-tu fier de t'en prendre à plus faible que toi.

-         Ça me change, les plus forts s'en prennent bien à moi, je me venge comme je peux.

-         C'est une ville vengeance.

-         Connais pas cette ville ?

-         Tais-toi, à l'heure de ton jugement dernier, hervé, je te confie aux soins des enfers jusqu'à mortem aeternam. Amen !

Je ne sais pas pour vous ? Mais moi, je suis parti me recoucher en laissant Dieu, planté comme un piquet, pour une fois qu'il n'était pas en croix, celui-là, ha, non la croix, c'est le fils ! Bon, bref court et rapide, j'ai très bien redormi sans lui.

Moralité : Dieu existe bien ! C'est un fait, révélé, par myself en personne. Mais il ne sert à rien ! Il aurait mieux fait de rester Galabru, il était plus marrant ! Si, si dans la série des gendarmes, par exemple, si on aime les grimaces bien lourdingues à la de Funès ou si on a un cousin qui connait un beau-frère qui a une cousine Germaine Gendarme casernée à Pluviole, à côté de Pernesiau, pas loin de Pigémoncolomb. Elle est tellement longue cette morale qu'elle devient une Bible, je devais bien ça à l'autre Pingouin pour me faire « absoluter ». Démarabouté par le Grand Marabout

  • j'en pleure de rire! tellement drôle!

    · Il y a environ 7 ans ·
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    nehara

    • Oh, non ! Je ne voudrais pas te faire pleurer, même de rire. Une larme sur une joue, n’est que « eau », elle ne sait pas si elle est de joie ou de peine.

      · Il y a environ 7 ans ·
      Photo rv livre

      Hervé Lénervé

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