Coup de soleil

macmun

Coup de soleil

Ca va être une belle évasion. Deux mois que j'y pense. Deux semaines que je suis prêt. Deux semaines de flotte. J'attends juste un peu de ciel bleu. Apparemment aujourd'hui le soleil revient. Pas longtemps, quelques éclaircies, de dix heures à midi, mais ça me suffit pour partir d'ici. Pas de fanfare, pas d'hélico, je passe par la porte de derrière. Mon codétenu est à l'infirmerie depuis hier. J'avoue que ça tombe plutôt bien, je pense qu'il aurait tout fait pour foutre mon plan à l'eau. Il m'aime bien, je l'aime bien, on s'entend bien mais il aurait voulu me garder pour lui et pour ce que je vais faire aujourd'hui il n'y a de la place que pour une seule personne.

Je guette devant mes barreaux depuis une heure déjà. Je sens qu'il pointe le bout de son nez, je vois les nuages s'estomper. Je suis impatient de me barrer de cette foutue prison. Cinq ans que je suis là et encore quinze piges à tirer. Je vais pas pleurer sur mon sort, je mérite d'être ici. Mais je supporte plus cet endroit. Aujourd'hui, c'est la quille. Mon plan est simple et sans accroc, aucun risque qu'il foire. Je demande juste un peu de soleil, pour me soutenir.

Enfin le voilà. Comme il est beau, comme il m'a aidé toutes ces années. Pendant la promenade, parfois, quand il fait beau, je m'assois, je pense à rien - ça me demande pas beaucoup d'effort je dois l'admettre - et je regarde le ciel. Je me plonge dans son immensité et m'évade. C'est mes seuls moments de liberté. Y a que là que je suis bien. Alors j'ai décidé de partir avec lui.

Dans les films ils font ça dans des baignoires. Sûrement pour se vider plus rapidement. Il n'y a que des chiottes ici. Et comme je me vois pas finir mes jours les bras plongés dans une cuvette, je vais me mettre pépère sur mon matelas, face au mur, face à la fenêtre, face au ciel. Elle m'a coûté tout ce que j'avais cette lame. C'est à dire pas grand chose, quarante euros, deux bouquins de cul et une cartouche de cigarettes. Là où je vais de toute façon j'en aurai plus besoin. Puis si je suis vraiment en manque paraît qu'il aime les havanes là-haut. S'il est sympa, il m'en filera un ou deux.

Allez c'est parti. Je m'allonge, m'installe confortablement - autant que je peux sur ce matelas pourri - et regarde le ciel. Le soleil est en plein dans ma ligne de mire. Il cogne le salaud. C'est ce que je voulais, je me sens bien, je me sens loin. Moi qui voulais pas crever un jour de pluie je vais sûrement bronzer pour le dernier jour de ma vie. Un petit coup de lame et le sang déjà brunit mes draps. L'évasion parfaite. Au soleil. Et pendant que ma vie coule du bout de mon bras, à travers les barreaux, je regarde le ciel, je rejoins l'au-delà.

  • Chaque semaine sur le petit forum d'écriture http://avosplumes.xooit.com (j'en profite pour faire un peu de pub) un jeu est organisé et quelques participants (de cinq à quinze en général) écrivent et proposent une nouvelle (de 3300 caractères maximum) sur un thème imposé. L'exercice est difficile car le temps est restreint (moins de sept jours) et qu'il faut être concis.
    Voici donc une de mes nouvelles que j'ai proposée sur le site. N'hésitez pas à la commenter et à aller voir mes autres nouvelles si celle-ci vous a plu. Pour chaque commentaire que vous laisserez (positif comme négatif) j'irai lire une de vos œuvres et émettre mon avis. Ainsi, partage sera fait.
    Je vous invite également à faire un tour sur http://avosplumes.xooit.com si l'écriture et/ou la lecture vous intéresse !
    Bonne lecture !

    · Il y a presque 12 ans ·
    Default user

    macmun

  • Magnifique nouvelle. J'adore ! Continuez comme ça :)

    · Il y a presque 12 ans ·
    Pippinetmerry

    bleupanda

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