Crier au Loup

eaurelie

Quand Revenir déchire le voile si doux d'Oublier

Tu es revenu. Je t'ai vu. En douce, à une heure où tu dors dans les bras de ta femme. Je t'ai vu. Comme çà, sans m'y attendre. Je t'ai vu. Tu m'as prise. Sans le savoir, sans en douter. Ou sinon juste un peu. 

Tu es revenu. Ca y est. Toutes ces heures doubles que je relevais en souriant d'abord, en m'impatientant ensuite. Donne moi une heure, que je criais aux horloges. Des cris contre des tics. Des rages contre des tacs. Je les relevais et puis disais, pour conjurer un sort comme une malédiction; Je disais Ah, tiens, une heure double, quelqu'un pense à moi! en me convaincant petit à petit de la futilité de cette ... superstition. Et puis, à force, je me suis dit que cela n'était pas normal. J'en ai fait la réflexion, c'en est devenu un jeu. Je donnais à quelqu'un, chaque heure, l'occasion de croire à un amour secret. Et tous les soirs, en tournant au coin de ma rue, lourde de toutes ces pensées pour moi, je m'attendais à te trouver au volant de ta nouvelle voiture noire. Jamais ce ne fut le cas, maintenant que je suis partie. Jamais çà ne le sera. 

Mais tu es revenu. Des mots jetés au vent, la suite d'une histoire qu'on avait écrite ensemble. Tu as repris, bien diligemment, la suite. Chapitre 4, article 1. Comme une nouvelle page. 

Un an que tu faisais silence. Un an moins un mois qu'on s'était quitté sur un mail. 11 mois aujourd'hui en fait. Tu es parti le 27 Mai, au soir, vers cette heure là. Avec un mail qui commençait par =)

Quelle douloureuse ineptie. 

Et te voilà revenu. Ne disant rien de ta vie actuelle, sinon que tu as déménagé. Ne disant rien de ta femme, de votre vie, de ton niveau de bonheur. 

Non, étrangement, tu es resté le même. Même ton d'article, même discours. Mêmes pensées. Moi qui pensais qu'elle allait changer ta vie. 

Mais, en même temps, çà faisait un an que tu n'avais plus écrit. Des choses se sont passées. Que je ne saurais jamais. Et mieux, que je ne veux jamais savoir. 

Et voilà, tu es revenu. A mon côté, un peu plus sur la gauche. Tu restes là, avec les vieux de la vieille comme moi. 

Tu aurais pu choisir ailleurs pour revenir. 

Tu aurais pu changer d'identité aussi. Prendre une autre que celle que tu avais créé avec moi. 

çà aurait été bien. Mais qu'importe, la porte est fermée. Je suis dehors, tu es dedans. En dedans de cette pièce remplie de tous nos souvenirs. 

Avec le sable, la tente, les coups de soleil, les coups de douceur, les mots d'amour, les sms, les appels, les vidéos. Tu es avec les galets, la mer turquoise de Croatie. Tu es avec les nuages du ciel de ce pays, où il m'a fallu vaincre ma peur de l'avion pour y arriver. Tu es parmi ces milliers de photos qui prennent tellement de place sur mon disque dur. Tu es parmi les serviettes de plage, les draps de bain, les peignoirs, les nus non artistiques, les restes de ta Clio. Les cartes, les menus, les lunettes de soleil, les chaussettes, les chaussures, les herbes de ce camping. Cette pièce est remplie de nature. De nature, de vie, de vérité, d'amour et .. de poussière maintenant. 

Tu es revenu. Et m'a fait comprendre que j'étais déjà partie. 




Enfin. 

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