Crisis.
Tophe Harper
Le soleil naissant qui traverse les vitres vient me caresser la joue, me titiller la paupière droite – la gauche est enfoncée dans l'oreiller. Cette clarté intruse me tire d'un sommeil encombré, envahie par une douleur à la fois physique et mentale. Les cauchemars ont peuplé ma nuit, la douleur est venue les soutenir.
Pas un matin je ne me réveille en paix. Je souffre d'un mal chronique, je ne sais plus ce que c'est d'aller bien. Cette forme de vie est une amnésie pour moi. Je dis que je souffre de migraines, pour qu'on me comprenne. En fait, j'ai une névralgie d'Arnold, développée suite à un accident de la route. J'ai mal à la tête chaque seconde que le jour et la nuit me tendent. Et plusieurs fois par semaine j'ai une crise, comprenez que j'ai beaucoup plus mal que d'habitude.
Le réveil de ce matin est un de ceux-ci. La crise s'annonce. Je ne serais pas debout longtemps. Une douleur aiguë, perçante, me lance le côté gauche de la tête, tout l'hémisphère gauche est cerné. Il est la cible d'un jeu de fléchettes, il subit l'entraînement d'un lanceur de couteau, Atlas y a délivré le poids du monde. À chaque battement de paupières, ma tête s'engourdit. Le malaise n'est pas loin, il me nargue. Mais non! Une fois de plus il ne me délivrera pas.
Je tente tant bien que mal, plus mal que bien de tenir le coup. Je vais sur les réseaux sociaux. Pointe le bout de mon nez virtuel en jouant la comédie d'une femme sereine portée par la bonne humeur et le bien-être. Planquée derrière mon clavier tandis qu'on m'imagine souriante et enjouée je mets une minute à taper une phrase qui nécessite dix secondes à un être en pleine possession de ses moyens et je me fais peur toute seule en voyant mon double d'une pâleur affligeante dans le reflet sur l'écran. J'halète comme un chien en été et ma paupière danse sur un air d'agonie. Car oui, j'agonise!
S'en est trop! Je ne suis plus fichue d'écrire mon prénom. Chaque mouvement, y compris ma respiration, me comprime le cœur. Je n'aurais tenu que deux heures. Je retourne me coucher. C'est pratique, je suis toujours en pyjama!
Un texte fort qui ne peut amener qu'à la compassion sincère !
· Il y a environ 9 ans ·Marie Guzman