Dans son corps
Florence
Dans son corps
Les lunettes glissaient d'une large paume à l'autre ; Avec ses grosses mains calleuses d'ouvrier du bâtiment, il en suivait la courbure, la rondeur, la finesse. Elles étaient simples et douces au toucher comme le visage de celle qui les portait
La question le tourmentait sans relâche
Qu'aurait elle fait s'il s'agissait de lui? Devait il la retenir ? Devait il la laisser partir? Y avait il encore une chance pour qu'elle revienne ?
Il voulait la voir une dernière fois, la serrer contre lui, respirer sa chaleur, entendre son cœur battre
Il voulait sentir ce qui restait d'elle, de sa volonté, de son désir, la sentir répondre à son étreinte... une veine qui palpiterait, même un battement de cil ferait l'affaire! Tout sauf cette froideur...
Et s'il n'y avait rien....S'il n'y avait vraiment plus rien...il renoncerait à elle
Mais rien ne s'était passé comme il l'avait prévu.
Cette horreur, cette ABOBINATION, avait pris la place de sa femme, au corps menu comme une enfant , perdue dans ses draps trop grands de lit d'hopital.
Il était venue lui dire je t'aime une dernière fois, pars en paix, je prendrais soin de notre enfant.
Il était venue pour pleurer et libérer son âme enfermée depuis trois mois dans un coma sans issue.
Puisque la vie en avait décidé ainsi, ou plutôt un chauffeur ivre armé de son semi remorque.
Son cerveau était irrémédiablement endommagé et plus personne ne parlait de réveil avec de possibles séquelles.
A quoi bon puisque tout n'était qu'illusion, sa respiration paisible, son thorax qui montait et descendait doucement comme lorsqu'elle dormait à ses côtés...
Que s'était il passé ? Il s'était absenté un seul week end, a cause de leur bébé qui avait la grippe, il venait la voir tous les soirs habituellement après le boulot.
Comment une créature aussi vile, aussi monstrueuse, aussi misérable que cet ectoplasme, avait elle pu élire domicile au creux de cette poitrine qui n'avait vécu que pour le bien ?
Je la voyais cette sorcière, et elle me voyait aussi !
Grise, édentée, des yeux méchants, maigre comme la misère elle même, nue et laide.
Parfois une infirmière passait la porte, notait une constante, réajustait un pansement, affairée, professionnelle, déplaçant à peine dans son sillage rapide l'épais nuage d'irréalité qui s'était installé dans la pièce.
Les vivants et les morts s'affrontaient dans cette chambre et elles ne voyaient rien, ne ressentaient rien.
Bien sûr, seuls les médiums voyaient les fantômes.
C'était mieux ainsi, sinon qui voudrait travailler dans un hôpital ? Tant de douleur, tant de décès.
Moi je les voyais, depuis toujours, c'était ainsi et c'était le cadet de mes soucis car les morts, ils vont bien quelquepart non ?
L'air à ce propos était glacé et l'idée mêmeme de toucher ce corps qui n'était déjà plus a elle, plus à moi, me répugnait
La colère me serrait le ventre. Pourquoi elle ? Pourquoi une telle infamie ? Personne ne méritait cela, être squatté ! Dépossédé, déshonoré, Souillé !
– VA T'EN ! Sifflaisje entre mes dents ELLE n'est pas pour toi !
La créature vulgairement accroupie sur le ventre de ma bien aimée, comme pour mieux encore me provoquer semblait me dire avec ses yeux narquois « pas avant que j'ai fait le mal , je commence tout juste à m'amuser» « et que vas tu faire petit humain ridicule hein ? »
Elle semblait si vieille , si vieille, comme venue d'un autre temps; La tête me tournait.
Je n'étais pas prêtre, je n'étais pas exorciste, aurais je dû demander de l'aide ?
Je n'avais jamais lu de livre ésotérique de ma vie , mais je savais, je sentais, que ça ne se passerait pas comme dans les films.
Il n'y aurait pas de croix, pas de pieu, pas d'eau bénite, pas de prières.Il n'y avait que le froid .
L'entité tirait sa force , sa présence même, du peu de vie qui restait en cassandra , cette vie que les machines lui octroyait. Il fallait la débrancher et vite. Que faire ?
Si je mettais fin à sa vie moi même , en arrachant le tuyau de sa bouche, les électrodes, les cathéters, je passerais pour un fou, . Qui me croirait ? On m'enfermerait comme un dangereux
individu et qui s'occupperait de notre fille ? Un tribunal pourrait meme penser que j'avais orchestré cet accident de camion, que mon but des le début avait été de me débarasser de mon épouse ?
Non, même si j'avais en horreur l'idée de la laisser seule avec....cette chose, il fallait passer par la voie légale, suivre le protocole, signer les autorisations, quelquesoit le temps que ça prendrait.
Je fis le nécessaire puis je rentrais chez nous et je ne repassais pas à l'hôpital pendant trois jours
Je ne pus travailler, je ne dormais pas, je ne mangeais pas, je priais ….mais mon cœur ne rencontrait que le désespoir
Je restais dans la chambre de notre petite emma pour la protéger de tout mal.
Le jour « j »arriva enfin , je voulais en finir, j'étais pâle et sans force, je détestais cet hôpital et son personnel . Le petit corps nerveux d'emma se serrait contre ma poitrine, ses mains étaient crispées et ses yeux agités en tous sens, dans cet endroit qu'elle n'aimait pas. Je voulais qu'elle puisse dire adieu à sa mère .
Tous les formulaires étaient signés. Escorté par le médecin en chef et son infirmière nous entrâmes une dernière fois dans la chambre bleue, mais celle ci était vide.
Contrarié par ce contretemps le medecin s'employa a retracer les dernières heures de sa patiente qui était encore là ce matin, et à son haut le cœur je compris tout de suite que quelquechose n'allait pas.
« Elle est en service de réanimation » dit il froidement comme s'il ne pouvait s'agir que d'un malentendu ou d'une aberration médicale. « je vais régler ça »dit il en secouant la tête.
Lui aussi avait hâte d'en finir. Son service avait besoin du lit.
S'ensuivit un coup de téléphone au service concerné et quelques bribes que je ne pus déchiffrer.
Emma s'était endormie. L'infirmière s'approcha du docteur avec milles précautions.Ils échangèrent quelques mots à voix basse. J'aurais même juré qu'elle se tordait les mains. Elle se tourna enfin vers moi, soucieuse, déconcertée.
Votre femme est sortie du coma monsieur forder, elle est réveillée et elle vous attend
Chute optimiste, mais il y faudrait quelques lignes d'explications: par exemple on découvre dans une armoire de l'hôpital le cadavre ratatiné de la sorcière ? Bon, moi j'dis ça...
· Il y a plus de 5 ans ·astrov
merci bombyx, je trouvais que finalement elle ne foutait pas trop les jetons cette histoire (par rapport à ce que je lis en ce moment, huhuh, j'arrive pas a finir le bouquin!!! peur de faire des cauchemards...mais en effet je me demande si ça ne mériterait pas une suite, ça serait un bon exdercice car je n'ai jamais écrit que des nouvelles (et pas beaaucoup)
· Il y a plus de 8 ans ·j'aimerais beaucoup expérimenter ce fameux moment magique ou les personnages échappent à leur créateur!!!
a ceux qui auront l'amabilité de me lire je demande que vous inspire la chute, optimiste ou pessimiste?
Florence