Dernière danse

Caïn Bates

         J'ai longtemps parcouru ton corps, effleuré 100 fois ton visage, trouvé de l'or et même quelques étoiles en essuyant tes larmes. J'ai appris par cœur la pureté de tes formes, parfois je les dessine encore, tu fais partie de moi...

        C'est assis que je nous revois, ton oreille collée à mon cœur malade, écoutant ma version enraillée de Le vent nous portera de ton autre oreille. Le silence nous entourait et je te chuchotais ces paroles pleines de sens comme des confidences cachées au monde entier. Tu restais là, pensive, suspendue à la réalité grâce à ma voix, tes yeux s'étaient perdus dans le vague. J'ai ensuite posé ma main sur ta joue pour redresser ta tête sur mon épaule. Tu as croisé mon regard en me souriant avant de te réfugier au creux de mon cou et de t'évader à nouveau dans tes pensées. La pluie tombait par courtes trombes et éclaboussait tes chevilles nues. Une fois revenue de ton escapade mentale, tu m'as demandée de t'inventer l'histoire de 3 ours, d'une enfant blonde qui se faisait dévorée et d'un loup qui chantait un air d'opéra. Tu m'as fixé sans cesse, souriante quand tu me voyais buter sur la succession de l'histoire. En apprenant que ce n'était pas un loup mais  une louve qui chantait Arrrrrr Monnie, ton sourire est devenu presque menaçant et ton regard candide est devenu noir. Je t'ai agrippé par l'épaule pour te coller contre la mienne et déposé mes lèvres sur ton front.

       "C'est stupide, les loups ne chantent pas de toute façon.
-Et un ours ça valse?!
-Bah oui, Winnie l'ourson sait valser je pense. Je crois l'avoir vu dans le dessin animé."    

        Tu as frotté le bout de ton museau contre mon cou avant de te lever d'un bond et de tirer sur mon bras.

        "Bon, je suis crevée donc je rentre, je te raccompagne pas, tu connais le chemin de ta maison."

         Le bout de tes doigts caressaient mes phalanges, se mêlaient entre eux pour m'attirer vers toi.

       "Promis, la prochaine fois tu pourras conclure... si tu inventes une histoire plus crédible."

           Tu m'adresses un clin d'œil avec ton sourire en coin, te faufile entre mes bras serrés contre ton dos et respire profondément. Tu es rentrée chez toi, je suis parti sans broncher.

        Je peux mourir demain, ça ne change rien, j'ai reçu de ses mains le bonheur ancré dans mon âme, c'est même trop pour un seul homme. Je l'ai vue partir, sans rien dire, il fallait seulement qu'elle respire. Merci d'avoir enchanté ma vie avant l'ombre et l'indifférence...

         

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