Des routes (extrait)
jeanduvoyage
Allez tous vous faire omettre
Le métro assez vide,
Silence absolu,
Une femme bavarde,
Téléphone sangsue,
Accroché à l'oreille,
Le dos contre la porte,
La pute me réveille,
Je la souhaite morte,
D'un coup, derrière elle,
La porte grande ouverte,
Avale cette belle,
Grande sieste, p'tite perte.
Lorsque je me réveille, je suis au bout du rouleau de la ligne et encore saoul. Je titube laborieusement jusqu'aux bancs en face de la rame et m'assois. Une jolie demoiselle passe devant moi, jambes brillantes, mini-jupe bien mini. Laborieusement toujours, je lève les yeux jusqu'à son visage. Je me croirais sur un bateau en pleine tempête, elle jette un coup d'œil discret en ma direction en continuant son chemin. Je la suis du regard comme le public suit une jolie balle durant un match de tennis, ce qui crée en moi un phénomène de roulis. Mon repas du soir -des sushis- me fait soudainement de la nageoire. Je le sens remonter, je le laisse faire, je vomis et je reconnais un bout de saumon. Elle a certainement été éclaboussée, moi, je me sens beaucoup mieux. Je me dis que la belle qui est descendue plus vite que prévu de la rame est sûrement plus proche de chez moi que je ne le suis moi même. J'aurais sûrement mieux fait de téléphoner plutôt que de m'assoupir. Je rentre chez moi, à pied, histoire de rafraîchir mon haleine parfum marée très basse.
Beaucoup vous diront que l'ivresse n'aide pas, et vous me le direz sûrement aussi. L'ivresse modifie la perception, pas seulement de celle des sens, mais aussi celle de la conscience. L'ivresse nous ouvre sur une forme passagère de schizophrénie parfois très appréciable, à deux on se sent moins seul. Mon moi bourré ne souffrait clairement pas de ma détestable vie, de ma médiocrité, je devenais un autre homme, détaché de mon histoire banale, de mes angoisses ordinaires. Faible de ce constat, incapable de me détacher de mes imprégnations, je bois tout le temps, anesthésié de mon mal être général. Ces dernières années, c'est ce que je faisais avec conviction. Comme tout drogué, j'avais continuellement besoin d'une dose régulière et rapide, le désir d'atténuer la souffrance qui m'habite est continuel. En réfléchissant davantage je me disais que l'alcool n'était pas mon seul exutoire. J'étais comme beaucoup, aussi drogué à la tune et au sexe. Il fallait que ça change et c'est l'autre homme qui me l'a dit.
Bonne chance
· Il y a environ 7 ans ·unrienlabime