Drôle d'idée...

arkhaam

   C'est dans le noir d'une pièce que je me sens libre, toute lumière est bannie, n'est autorisé que le point rouge incandescent produit par ma cigarette. Ainsi fait-il naître quelques ombres fantomatiques qui glissent en tremblant sur les murs qui m'entourent donnant, aussi, l'impression qu'ils vont se refermer sur moi. Je reste allongé, la cigarette au coin des lèvres, les mains jointes sous ma tête. J'ai pris le pari que, ce soir, je m'en sortirais encore; c'est la troisième fois cette semaine. Je ne comprends pas d'où me vient cette chance, jamais je n'aurais cru y parvenir, ne serait-ce qu'une fois. Cela dit, c'est la première fois que je parie, cela pourrait bien faire mon infortune car il suffit de croire un peu trop à sa chance pour, qu'irrémédiablement, celle-ci vous abandonne, vous laissant, stupide et mort, sur le sol froid et sale d'une pièce trop sombre. Je ne peux m'empêcher de penser à elle, elle à fini par faire un choix, ce choix à marquer ma fin d'une pierre ensanglantée, ma vie sans elle n'a aucun sens; peut-être en trouverais-je un à ma mort. Voilà des mois qu'elle hésitait, certes ses sentiments pour moi étaient véritables, intenses mais on ne fait pas toujours ce que l'on veut dans la vie, chacun à ses priorités et elle a trouvé les siennes. Je ne lui en veux pas, je l'aime bien trop pour ça, je crois même que je comprends son choix, elle se doit de protéger les siens. Moi, je n'ai rien à offrir, je ne suis rien, je suis celui qui reste dans l'ombre, qui espère en silence sans être capable de donner quoi que ce soit. Pourtant je l'aimais, je l'aime toujours, au point de donner ma vie puisque sans elle, elle n'a pas le moindre intérêt.

Je me lève, je m'approche de la table qui trône au milieu de la chambre, j'allume les deux bougies qui attendent la flamme salvatrice, celle qui va leur donner vie. Les ombres se font plus grandes, plus tremblantes. Mes yeux me font mal, même une lumière aussi faible m'est devenue insupportable. Sans mon amour auprès de moi, rien n'a de valeur, d'importance, tout est souffrance, peine et torture. Je sais le mal que ça lui a fait de me quitter, de devoir mettre de côté notre histoire car je sais l'importance qu'elle lui accordait. C'est d'autant plus terrible que nous savions que nous aurions pu vivre quelque chose d'unique. La vie en à décidé autrement, aussi je me range du côté de la mort. Cette dernière est bien moins exigeante, elle se contente de peu et, en ce moment précis, ma vie est moins que peu. Curieusement, j'ai toujours le sentiment que je vais m'en sortir mais, ce soir, je crois n'en avoir pas envie aussi je passe de deux à trois pour cette fois, peut-être que cette troisième sera la bonne. Je sais qu'en agissant ainsi je donne peu de crédit à la victoire, du moins à la survie mais il se trouve que c'est ma vie, que c'est moi qui décide et je décide d'augmenter le nombre de coups. Et puis quoi, trois ce n'est pas si énorme que ça, il reste trois, également dans l'autre socle de la balance. Nous voici donc face à une parfaite égalité.

J'allume un autre cigarette, je descends un fond de Vodka, la chaleur de l'alcool est agréable, une goutte de sueur perle sur mon front. Je prends l'arme, l'ouvre et introduit la balle, l'unique balle qui servira à ce jeu morbide. Il n'est plus temps d'hésiter, je fais tourner le barillet dans le vide, le referme et pose le canon sur ma tempe: ''clic''. Le premier coup à frappé sur une chambre vide, d'autres gouttes prennent forme sur mon front mais ce n'est plus l'alcool qui en est à l'origine, je n'ai pas honte de le dire, c'est la peur. Pas de mourir, non, seulement celle de perdre ma bien-aimée, pour de bon. Je pense à elle, comme à chaque seconde de mon existence depuis que je la connais. Elle aurait pu tout changer, faire de moi un autre homme mais le destin aime s'amuser et contrarier les histoires qui ont un sens. La vie est une pute.

Je n'aurais même pas eu à attendre trois, le deuxième coup fut le bon et je n'ai rien senti lorsque mon crâne à explosé. J'ai pris la route d'un néant plus sombre que tout ce que j'avais pu imaginer, la seule lumière qui m'est restée est l'image sublime de mon adorée, car oui, même dans la mort je la garde avec moi, même dans la mort.

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