L'arôme de la littérature.
silvy-nocturne
Lysandre aimait boire du thé. Il regardait avec curiosité l'arôme qui se dégageait du petit sachet de poudre. Pleine de poésie, cette entité colorait, subtilement, puis avec vigueur, l'eau translucide. Il déposait avec nonchalance un petit cube de sucre juste devant la tasse et il le lâchait tout d'un coup. Il imaginait les minuscules grains de sucre se défaire et conquérir avec brio le fond du récipient. La vapeur du thé dessinait tout un tas d'arabesques et de chimériques figures; il était bon de savoir qu'en observant des choses banales on pouvait découvrir des faits peu communs, complexes, presque magnifiques.
Avec Violette ça avait été pareil, il la connaissait depuis la seconde, mais il n'avait jamais cherché à lui parler ou à la regarder avec attention. Elle lui semblait banale, pire encore, il en était venu à la trouver simple et plus qu'ordinaire. Mais, quand il la vit - l'année suivante- assise et concentrée, écoutant attentivement leur professeur de français, il lui trouva un certain charme, un semblant d'allure de personnage romanesque.
L'atmosphère littéraire et taquine de la classe se faisait sentir, non sans enfantillages les élèves critiquaient la complexité des Pensées de Pascal, tentaient de jouer de façon moderne les textes de théâtre qu'on leur faisaient étudier et clamaient des "Jean-Jacques" avec des voix insupportables juste avant les commentaires composés, dans le but de se souhaiter bonne chance. Certains élèves étaient là juste pour échapper aux matières scientifiques et non par amour des lettres, mais ils finissaient par s'imprégner, d'une façon ou d'une autre, de la filière littéraire dans laquelle ils baignaient. Lysandre avait toujours apprécié la littérature, bien avant de commencer l'écriture de chansons ou de poèmes, il dévorait les romans. Il lisait vite et comprenait le moindre sous-entendu contenu dans un mot ou dans une phrase. Pour bien écrire il fallait avant tout avoir cet amour pour les livres et il c'était à de nombreuses reprises dit qu'il apprécierait le partager. Violette était toute autre en cours de français, elle levait souvent la main et répondait avec humilité. Lysandre buvait ses paroles, il les trouvaient si intéressantes, si vraies, si réfléchies.
Puis sans réellement savoir par où commencer, il se jeta à l'eau et alla lui parler. La jeune fille parlait très bas, il avait du mal à entendre complètement ses phrases, elle semblait surprise, mais son visage ne laissait pas paraître grand chose, elle était presque comme d'habitude. Pour l'amadouer, il lui parla de littérature et d'art. Il ressentit tout de suite qu'il l'intéressait, qu'il captait son attention et surtout qu'il l'attirait. Tout d'un coup il associa Violette à la célèbre Valse de Brahms, elle était douce, délicate et ancienne, c'est pour peu s'il ne la comparait pas à une de ces femmes de l'époque Victorienne, qui paraissent si froides, mais si intéressantes. Elle ressemblait aussi à cette entité qui colorait doucement l'eau de son thé, on décelait en elle une grande force.
Il s'approcha d'elle à petite dose, et comme un bourgeon qui éclos et qui par la suite s'épanouit, elle s'ouvrit doucement à lui. Ils parlaient le sourire aux lèvres, une réelle complicité s'était installée en ces deux âmes si semblables. Et dans un élan de romantisme Lysandre lui écrivit une lettre, il se sentit étrange, puis ridicule lorsqu'il se rappela qu'il n'était pas dans un roman du XIX siècle, mais cette idée lui plu, à quoi bon envoyer des sms ridicules, alors que l'on écrit mille fois mieux ? Le jour suivant il lui glissa dans son sac, le plus discrètement possible, la dite lettre, il eut vraiment peur de sa réaction. Lorsqu'elle chercha son agenda, elle sembla surprise de ce nouvel objet qui entre ses cahiers se cachait. Il la vit lire le papier et s'empourprer, il se rongea les sangs, se fit tout un tas de scénarios catastrophes et en vint même à l'idée qu'elle ne ressentait rien pour lui. La fin du cours lui sembla interminable, c'était la première fois qu'il n'écoutait pas les mots de son professeur de français qui parlait pourtant de sa pièce de théâtre préférée. Elle sortit vite de cours, il se dit qu'il n'allait plus jamais la revoir ni lui reparler, mais elle l'attendait à l'entrée de la salle, ils marchèrent un peu en silence, au détour d'un couloir elle se mit sur la pointe des pieds et lui glissa ce vers à l'oreille "Je demeurai longtemps errant dans Césarée…" Ce fut leur phrase magique, leur grande référence doublement littéraire, une sorte d'hymne à l'amour qui scellait leur relation amoureuse naissante.
Lysandre regardait Violette endormie à ses côtés, il buvait doucement du thé. Le liquide était parfumé, la vapeur chatouillait son nez, la chaleur emplissait son corps. La jeune fille n'était plus cette Valse délicate de Bramhs, elle correspondait d'avantage à la reprise de Thunderstruck de David Garrett, mythique et si sauvage. Violette était une personne complexe, noble, mais imprévisible. Sa personnalité était quelque peu changeante, elle avait un fort caractère et un volonté constante de réussir. Elle dessinait beaucoup ces derniers temps et lorsqu'elle exerçait son art, elle demandait à être seule. Un vrai petit génie imprévisible, étrange, presque animal.
Je n'ai rien a redire. J'aime beaucoup le couple Lysandre Violette alors c'est juste un merveilleux sujet ! Et puis comme tu écris si bien, ça donne une véritable petite oeuvre d'art. Tu m'enerverais presque o/
· Il y a environ 10 ans ·Bisous ! Mimie
Heska
très romanesque , à conseiller pour démarrer la journée en beauté
· Il y a environ 10 ans ·Nicole Azais
Merci ! Un joli dimanche en perspective!
· Il y a environ 10 ans ·silvy-nocturne