Du virtuel au réel

eroliange

Eroliange

Du virtuel

au réel

La séparation

Je te quitte. Voilà, ça c'est simple, et c'est réel. Adieu.

Sur ces mots je lui raccroche au nez.

Quelques instants à observer mon téléphone portable.

Non, je ne culpabilise pas.

Non, je viens de la quitter, et de lui raccrocher au nez, mais je ne culpabilise pas.

Bizarrement, je n'ai absolument aucun regret.

Elle était jolie. C'est vrai. Grande, blonde, des seins lourds mais fermes, une peau presque laiteuse et un petit cul bien ferme qui m'excitait terriblement lorsque la position que nous adoptions me permettait de l'observer.

Elle avait une situation professionnelle intéressante. C'est un fait.

Elle passait son temps sur son smartphone. C'est une réalité.

Son temps se divisait entre son boulot, les bonnes affaires pour s'habiller, se maquiller, se décorer, et les restaurants ou les bars avec les amis et amies. Dans ces moments là, ils discutaient des bons plans pour s'habiller, se maquiller, entre deux instants à s'occuper de son smartphone. Si, occasionnellement, ils jugeaient une personne qui ne leur semblaient pas à la page, pour tel ou tel prétexte, ils se riaient de lui, ou d'elle.

Nous faisions l'amour entre deux mails ou deux messages.

Depuis près de six mois que nous nous fréquentions, elle ne connaissait pas mes goûts, mes envies, mon histoire, et je ne connaissais pas plus les siens.

Nous n'avions que le sexe comme intimité partagée.

Je ne sais pourquoi ce soir, plutôt qu'un autre soir, mais cela faisait des semaines que cela m'oppressait.

Rompre avec elle, rompre avec ce type de rencontres, ou j'arrive moi-même à me sentir étranger à ma propre vie.

J'ai multiplié ce type de rencontres pendants quelques années, et il faut bien l'avouer, cela me convenait.

Ce n'était pas mon monde, donc je savais que cela ne durerait pas.

C'était plutôt facile de rencontrer une femme. La chance des mégapoles.

Mais depuis quelques mois, je dormais de moins en moins bien, avec un sentiment de manque de quelque chose. Et ce quelque chose c'est le manque d'humanité, de naturel, le retour aux sources. L'overdose de paraître, et le manque d'être.

J'ai eu la chance de trouver un boulot où je gagne bien ma vie. Cela me permet de sortir dès que j'en ai envie, et de vivre plutôt bien, malgré la ou les crises.

Cette vie professionnelle, a induit des sorties dans le même type de milieu, et de rencontrer des personnes de ce milieu également.

En bref, un communautarisme élitiste, et en dehors de l'activité professionnelle, une vie de nantis superficiels et immatures.

Changer de vie.

Ce n'est pas moi.

Je ne suis pas heureux.

A partir de demain, je m'isole de ce monde.

Point de sortie au restaurant avec les collègues le soir.

Point de bar ou pub avec les amis des amis.

Point de réponses aux textos et autres mails intempestifs.

S'isoler.

Faire le point, sur ma vie, et sur ce que j'en attends.

Premier contact

Je suis rentré à l'appartement directement après le boulot.

Que ce fut dur de refuser toutes les invitations.

Un petit tour vers le frigo... vide.

Ici, je n'ai que de l'alcool, au cas où. Je mange toujours à l'extérieur.

Penser à faire des courses.

Une boîte de conserve de maman.

Ça fera l'affaire pour ce soir.

Le téléphone sonne... ne pas répondre.

D'ailleurs, je vais l'éteindre. Voilà.

Tranquille. Me voilà enfin seul.

Je prends la télécommande et allume la télé.

Ma pauvre télé, tu dois être bien surprise de reprendre vie après de si longs mois d'attente.

Je passe les chaînes en revue, mais, définitivement, je ne suis pas intéressé.

Lire.

Pourquoi pas, je n'ai pas lu depuis si longtemps.

Là non plus, je ne me décide pas.

Je m'assois sur le canapé, pour réfléchir.

Je sais, en moi-même, ce que je recherche, mais comment le trouver. Et surtout, comment le chercher.

Ce que je souhaite? Rencontrer la femme de ma vie. Rien d'original me direz-vous, c'est le vœu de tous ceux qui ne l'ont pas encore trouvée.

Mais je désire rencontrer celle avec qui nous partagerons enfin. Qui m'aimera pour moi, s'inquiètera pour moi. Et celle que je connaîtrais sur le bout des doigts, que j'aimerais pour elle, pour ce qu'elle est dans sa totalité.

Je suis sur la bonne voie, je sais ce que je veux.

Maintenant, si je sors pour rencontrer, je vais retrouver les mêmes personnes que je veux fuir.

Et internet ?

C'est du virtuel, donc rien de concret, de réel.

Oui, mais mon réel me fera toujours rencontrer le même type de personnes.

Que rechercher sur internet ?

Des sites de rencontres ? Et devoir rencontrer toutes les célibataires sans avoir échangé avant.

Je veux juste trouver mon fantasme intellectuel. Celle qui me fera vibrer.

Et un tchat ?

Une multitude d'utilisateurs virtuels, et perdue au milieu, peut-être celle qui va me parler vraiment.

Dans tous les cas, tout débute par un dialogue et non des mensurations et autres caractéristiques.

Banco.

Un moteur de recherche, et nous voilà partis sur plusieurs sites de dialogues.

Inscriptions.

Lequel d'entre eux me conviendra ?

Nous verrons.

Mon pseudo? ETRE VRAI.

Et me voilà connecté.

J'attends de longues minutes.

Personne ne me contacte.

Je suis inscrit sur quatre sites de dialogue, et aucune femme ne veut discuter avec moi.

Regardons qui est connecté.

Une femme pour dix hommes.

Bon, il va falloir que je chasse, sinon je risque d'attendre longtemps.

Me voilà à analyser les messages d'accueil des personnes de sexe féminin présentes.

Certaines sont sexuellement explicites... du racolage pour des sites adultes payants, voire, des numéros de téléphones surtaxés.

Certaines ne veulent pas discuter avec des hommes.

Certaines sont des hommes se faisant passer pour des femmes. Quels imbéciles.

Bon, au total, le nombre de femmes se restreint.

Je me décide à envoyer le même message à toutes les femmes qui me semblent être de vrais femmes.

Le message est d'une originalité à couper le souffle : « bonsoir ».

Après avoir envoyé, entre mes quatre différents sites, une centaine de bonsoirs, j'obtiens dix réponses, mais toujours les mêmes : « bonsoir ».

Me voilà bien embarqué.

Comment poursuivre?

Une idée me vient : « marre du superficiel, je cherche à découvrir réellement une femme, au plus profond de nos intimités. »

Avec ça, si j'ai des réponses, elles savent où je veux aller.

Je m'attends tout de même à une hécatombe.

J'ai finalement quatre réponses en retour... Je m'attendais à moins.

Une première réponse bourrée de fautes d'orthographes. Je réponds sans conviction.

Une seconde réponse, me disant qu'elle accepte de discuter, mais qu'elle ne dévoilera pas son intimité le premier soir...

Une troisième réponse me demandant si j'aimais les scénarios. Que répondre ? De quel type ?

Une dernière réponse : « jusqu'à quel degré d'intimité es tu prêt à aller ? ».

Enfin une réponse intéressante.

Je lui réponds : « n'être plus qu'un ».

Les autres contacts m'ont répondu, mais je dois bien dire que je ne me souviens plus de mes retours. J'attends son message. Elle m'a piqué au vif.

Puis son message apparaît : « tu sais ce que tu y perds ? ».

Ma réponse : « je sais aussi ce que j'y gagne ».

Je ne sais pourquoi, mais je devine que cette femme est une étape obligatoire dans ma construction.

Elle a un pseudo qui m'attire : « bohème ». Son message d'accueil est tout aussi intéressant : « d'amour et d'eau fraîche. ».

Sur son profil, elle a 32 ans.

Elle cherche du solide, à moi de montrer que je peux l'être.

Et, j'ai oublié tous les autres messages pour ne m'intéresser qu'aux siens.

J'attends sa réponse comme un chien attend son os.

tu n'y es pas prêt.

Si, tu ne me connais pas.

Entre chaque message, de longues secondes d'attente.

Tu ne cherches qu'à t'amuser.

Non, à enfin partager.

Tu es prêt à partager quoi?

Tout.

Tu es prêt à abandonner quoi?

Tout.

Des mots.

Elle est piquante.

Si je donne autant que je reçois, pourquoi serait-ce des mots?

Parce que tu veux me séduire, comme un trophée.

Non, parce que je ne suis pas heureux, et que je cherche le bonheur.

Quel bonheur?

Ce n'est plus un dialogue, mais une audition.

Le bonheur de partager, bons et mauvais moments, mais avec celle qui sera là, dans tous les moments.

Tu recherches une écoute, non? Tu es mal dans ta peau.

Non, je recherche mon idéal, mon âme perdue.

Tu cherches une femme maîtresse et mère, donc.

Elle me pousse, là.

Non, je cherche mon ange, mon alter ego.

Tu penses que c'est ma recherche?

Celle là, je ne m'y attendais pas.

Je me suis livré, à toi d'être honnête sur ce que tu recherches.

Tu corresponds à ce que je cherche... pour le moment.

Pour le moment? C'est rassurant.

Mais encore ?

J'ai été trop déçue.

Moi aussi.

Tu ne me décevras pas?

Enfin, elle se radoucit.

J'essaierai.

Je dois aller me coucher, je travaille demain.

Moi aussi, tu vois, mais je l'oubliais.

Tu seras ici demain soir?

Oui, sans fautes.

A demain alors.

A demain, et passe une bonne nuit.

Bonne nuit.

J'ai dû batailler, mais que ce fût agréable.

Un virtuel si réel

Voilà pas mal de temps que je ne m'étais pas levé d'une aussi bonne humeur.

A peine levé, il me tarde déjà le soir de poursuivre cette discussion.

Bohême attise ma curiosité.

Je veux en savoir plus.

Elle me paraît tellement sûre d'elle.

Elle me semble compliquée, je dois l'avouer également.

Mais compliquée dans le bon sens.

Par contre, j'ai la sensation que je vais devoir ramer.

Mais, ce n'est que du dialogue sur internet, sans engagement, et c'est un bon défi. A moi d'être à la hauteur.

La journée se passe, d'une banale habitude.

A nouveau refuser quelques invitations.

Visiblement, ma nouvelle condition de célibataire est connue.

Pour le moment, refuser toutes les invitations, quitte à passer pour celui qui souffre.

L'heure de débaucher.

Faire quelques courses, car le frigo est bien orphelin de nourriture.

Me voilà rentré dans mon appartement, plutôt grand, au décor design, mais qui subitement me parait dépourvu d'âme.

Les mûrs sont blancs, le sol est fait de carreaux blancs, les canapés sont noirs, les meubles noirs ou en verre, et les tableaux sont en noir et blancs. Que tout cela est froid.

Penser à refaire la décoration, en y intégrant la notion de couleurs.

Des petites douceurs à déguster.

Déboucher une bouteille de vin. Un Côtes de Bourg fera l'affaire.

J'installe le tout, autour de l'ordinateur, je l'allume et me voilà connecté.

Retour sur le site de ma rencontre d'hier au soir.

Il y a tant de personnes connectées sur ces sites.

Que cherchent donc toutes ces personnes?

L'amour ? Non. Si c'était ça, il y aurait plus de femmes que d'hommes, non ?

J'attends ma Bohème, mais elle n'est pas connectée.

Soudain, le pseudo Bohême me contacte, mais Bohême est devenu un homme.

Bonsoir.

Bonsoir. N'y aurait-il pas du changement depuis hier au soir?

Si, je me suis métamorphosée en homme en quelques clics. Le pouvoir du virtuel.

Je t'avoue que j'aimais bien la bohème au féminin, je m'y sentais plus à mon aise.

Si je me connecte au féminin, je serais harcelée, et serais donc moins disponible pour toi.

Tu m'accordes donc l'exclusivité ? J'en suis flatté.

Pour un instant, ne te fais pas trop d'idées.

Je commence à comprendre pourquoi il y a si peu de femmes sur ce type de site.

C'est le nombre que tu recherches ?

Non, Mais en faisant un tour d'horizon des connectés, je me posais la question.

Tu en as contacté beaucoup ?

Hier, je dois t'avouer que oui.

Et ce soir ?

Ce soir, je t'attendais.

Dois-je me sentir flattée.

La suite te le dira, non ?

Nous verrons bien, en effet.

Je suis ravi que tu sois avec moi ce soir.

Là, je sais que je prends un risque, en tapant ce dernier message.

Je n'avais rien d'autre à faire. Lol.

Étrangement, moi non plus.

Ce ne sera pas tous les jours comme ça, il faut une vie sociale.

Cela peut dépendre de toi.

Comment ça?

A l'heure actuelle je préfère limiter ma vie sociale.

Ah, un bouton sur le nez?

Lol, presque. Un nœud au cerveau.

Tant qu'il est loin du cou.

Je suis très loin de ces idées.

Mais tu ne me connais pas encore, lol.

Je conserve la corde et jette le nœud.

Tu ne me connais pas, et ignore encore à quoi je ressemble.

Tout comme toi.

Et cela ne te fais pas peur? Cet inconnu?

Non, pourquoi? J'ai une bonne sensation, inexplicable, mais c'est comme ça.

Mais on ne sait jamais?

D'un autre côté, nous ne faisons que discuter. Si le courant passe, pourquoi ne pas poursuivre?

Oui. De mon côté j'ai tout de même un certain nombre d'exigences physiques, intellectuelles et morales.

Pour le côté intellectuel et moral, tu peux juger ici, pour le physique, il n'y a que les imbéciles qui ne changent pas d'avis.

J'attendais cette réponse.

Tu l'as eue.

J'ai l'impression que nous nous comprenons.

C'est ce que je te disais avant. J'ai une bonne sensation.

Oui, on peut le définir comme ça.

Et encore, nous ne connaissons rien de nous.

Oui, juste des mots qui attirent.

Tout à fait.

Tu voudrais que l'on se connecte sur une messagerie instantanée ?

Forcément, je n'en ai jamais créée, ou dans mes jeunes années.

Oui, ce serait un plaisir, et ce serait surtout beaucoup plus rapide.

Connectons-nous alors.

Laisse-moi le temps de créer un compte, et nous serons branchés.

J'avais son adresse, à moi de créer la mienne.

Quelques clics, une inscription, une confirmation d'enregistrement, un téléchargement de logiciel et me voilà connecté.

Chercher « ajouter un contact ».

Entrer son adresse, et attendre.

Quelques instants de suspense.

Enfin, une fenêtre de discussion s'ouvre sur un « coucou » rassurant.

coucou, nous voilà un peu plus connectés.

Des champs d'octets à échanger.

Pour une vie de bohème virtuelle.

Pour, pourquoi pas, au final, être vrai.

Et nous avons communiqué ainsi des heures.

J'étais ensorcelé de ses mots, et les miens, visiblement, ne la faisaient pas fuir.

Pour cette première en instantanée, nous ne nous sommes pas raconté nos vies. Bizarrement, je ne sais rien de plus sur elle, et elle n'en sait pas plus sur moi.

Une première fois à se dompter, à apprendre nos réactions, à appréhender nos expressions, notre humour.

Puis vient l'heure où nous devons nous quitter, pour pouvoir être efficace le lendemain.

En éteignant l'ordinateur, je ressens une sensation de frustration, en quittant des instants que je n'ai pas envie de quitter, peut-être par peur de ne pas les retrouver.

J'ai retrouvé la magie enivrante d'une première rencontre réelle, et cela dans un monde virtuel.

Une promesse

La nuit fût douce.

Je m'éveille avec le sourire.

Tiens, c'est nouveau.

Le café, la douche, se préparer, et le départ. Un refrain quotidien, mais de bonne humeur, aujourd'hui.

Une journée de boulot débute, avec une sensation d'optimisme intense.

Refuser de nouvelles invitations pour le soir, en prétextant une soirée déjà chargée.

Vite rentrer chez moi et retrouver la bohème.

Allumer l'ordinateur puis ma messagerie, et l'attendre quelques minutes.

Elle se connecte.

Bonsoir ma bohème.

Bonsoir toi.

Je m'impatientais de ta présence.

Et me voilà.

Une apparition virtuelle.

Mais bien réelle.

Je le souhaite.

Peut-être nous rencontrerons nous?

J'imagine que nous nous rencontrerons quand nous serons prêts tous les deux.

Tu n'y serais pas prêt maintenant ?

Si. Mais...

Mais quoi?

J'ai la sensation que nous devons encore attendre. Nous nous découvrons peu à peu, intimement, et se voir nous rendrait peut-être plus timides, et au final, moins réels que derrière ces claviers.

Je partage complètement ton point de vue. Par contre, un jour peut-être aurai-je envie, subitement de te voir, pour ne pas rester sur du virtuel uniquement. On ne sait pas de quoi est faite la vie, et nous pouvons rencontrer du monde.

Et je le comprendrais et l'accepterais, et je ferai de même.

Merci. Si notre contact reste le même, je souffrirais de rencontrer quelqu'un d'autre sans t'avoir découvert.

Moi aussi, je dois dire. En même temps, j'ai peur de rompre ce charme. Mais si je devais rencontrer quelqu'un d'autre, je garderais le regret de ne t'avoir connue.

Et tu essayerais de me voir avant?

Oui, mais nous n'en sommes pas là.

Promets-moi que si nos moments sont toujours aussi agréables, nous ne couperons pas le dialogue subitement, sans s'être vus.

Promis, ma bohème. J'en serais malheureux, tout autant.

Peux-tu me promettre autre chose?

Nous verrons bien, dis-moi?

Ne parlons jamais de boulot, mais toujours de nous.

Avec plaisir.

Une fois ces promesses faites, elle commence à me raconter sa vie, et moi la mienne, en évitant le boulot.

Nous avons tous les deux des vies simples, sans grands malheurs, sans bonheurs intenses non plus.

Des vies banales, ne se sentant pas tout à fait à leur place, et recherchant à l'être.

J'aime sa façon d'écrire, et sa façon d'être, profonde et si simple à la fois.

Je me découvre également, en redevenant plus proche de moi-même.

Superbes sensations.

La proposition

Tous les soirs, nous nous connectons ainsi.

Je la découvre un peu plus à chaque connexion, et je l'aime un peu plus, à chaque fois.

Sans aucune logique, sans l'avoir jamais vue, j'ai besoin, chaque soir de son contact virtuel.

Cela fait quelques semaines que nous communiquons, et que je pars travailler heureux, même si c'est dans l'attente du soir.

Et subitement, me voilà convoqué par mon patron.

Ne me sentant pas d'une conscience professionnelle irréprochable depuis quelques jours, je suis un peu inquiet.

Je fais mon boulot, heureux de vivre, mais dans un état d'esprit moins combatif vis-à-vis de mes autres collègues.

Voilà que pour vivre des instants virtuels magiques, et me sentir un peu revivre personnellement, je vais le payer professionnellement.

J'attends devant le bureau de mon patron. Que vais-je dire pour assurer ma défense? Que je suis amoureux? Que j'ai changé? Non.

Nous verrons bien, le boulot n'est pas tout.

La porte s'ouvre, et mon patron me dit d'entrer.

J'entre, et m'installe face à lui.

Il me paraît détendu.

Ça va faire mal.

Pas le temps de m'inquiéter plus avant :

Vous savez pour quoi je vous ai fait venir?

Je dois vous avouer que non, dis-je d'une voix un peu inquiète.

Pour tout vous dire, je m'en doutais.

Ah?, et je suis sûr qu'il se sent drôle.

Avez vous entendu parler du projet Prothéus?

Oui, un projet commun entre notre société et trois autres?

Sur le coup je ne m'attendais pas du tout à ça.

Oui, tout à fait. Un projet sensible.

Oui.

Nous cherchons un chef de projet.

Oui.

Nous avons songé à vous?

À moi?, là, je suis cloué sur place.

Oui, vous seriez intéressé?

Oui, bien sûr, c'est un projet intéressant, qui doit demander beaucoup de temps, mais j'ai déjà des journées chargées par d'autres projets.

Là, n'est pas le problème. Seriez-vous intéressé?

Oui, bien sûr, mais...

C'est une promotion.

Oui, mais...

Vous seriez le chef de projet pour les quatre sociétés.

Mais je ne pourrais plus gérer les autres projets.

Une personne les suivra, qui vous rapportera en direct.

C'est une vraie promotion.

Oui.

Quel est l'objet exact de ce poste?

C'est un projet stratégique pour la société, je dois vous le dire, sans vous mettre de pression.

Ça ne me met pas du tout la pression, et je souris.

Oui, présenté comme ça, c'est un peu froid.

Je peux assurer.

Je sais, mais vous aurez énormément de déplacements à faire.

C'est à dire.

Vous serez en déplacement en permanence. Suivre les projets dans les différentes équipes, dans les différentes sociétés pour que nous réussissions.

Ce projet est immense, comment le gérer seul?

Vous ne serez pas seul.

Comment ça?

Un chef de projet de chaque société et vous en coordinateur.

Vous me faites un beau cadeau, vraiment, mais pourquoi moi?

Vous êtes mûr.

J'espère qu'il n'insinue pas que je suis vieux. Je lui réponds :

Je suis flatté, et j'espère ne pas vous décevoir.

Je vous observe, vous avez mûri, je sais que vous êtes capable.

Merci.

Vous acceptez?

Oui.

Vous commencez lundi, la secrétaire vous fournira toutes les autres informations nécessaires.

Merci encore.

Bonne journée.

Elle le sera.

Je sors de là fou de joie, mais essaie de garder au maximum mon sang froid.

Cacher mes émotions.

Je ne peux en parler à personne au boulot, pour éviter les jalousies.

Je rentre le soir, et me connecte. Ma bohème.

Nous avons décidé de ne pas parler boulot, c'est vrai.

Ce n'est pas grave, je vais partager ma bonne humeur avec elle.

Aussitôt rentré, je me connecte.

Je ne lui en parle pas, mais nous rions de nos années bêtes, et cela me suffît.

Je ne peux partager avec elle, mais elle partage mon bonheur, sur un autre sujet.

Premières découvertes

Nous voilà le week-end.

Je suis connecté avec ma bohème.

Nous nous coupons du monde tous les soirs pour nous retrouver virtuellement.

Le vendredi soir, nous nous quittons après avoir continué à rire sur nos erreurs du passé.

Le samedi, nous nous connectons dès le réveil.

Chacun de nous fait ses affaires, et nous commentons nos activités, du ménage au lavage.

Nous décidons d'aller acheter le même plat tout prêt pour le soir, comme si nous faisions un restaurant ensemble, ou partagions un repas en couple.

Quelques minutes de coupure de contact, le temps de faire des courses.

Nous nous retrouvons.

J'ai de plus en plus envie de la voir.

Elle me propose de prendre l'apéritif à distance.

J'accepte avec plaisir.

Nous voilà à trinquer. Elle au vin cuit, et moi au pastis. On ne se refait pas.

L'apéritif à distance durant, nous nous détendons, et soudain bohème m'envoie ce message :

J'ai envie de te voir.

Moi aussi, mais j'ai peur.

Tu as une webcam ?

Oui.

Moi aussi, on pourrait se voir ?

Oui, mais j'ai peur de rompre le charme.

Moi aussi, mais ne pourrait-on pas se voir, en dessous du visage ?

Je n'avais pas pensé à ça.

C'est une bonne idée.

Je règle ma caméra.

Et moi la mienne.

Me voilà à régler cet objet en dessous de mon visage, et à jouer avec la luminosité. L'alcool aidant, j'y prends un peu de temps.

Une fois les réglages faits, je me reconnecte.

Elle est là.

Un tee shirt bleu marine, et un jean. Elle est assise. Elles est fine, mais sa poitrine me semble bien développée.

Je la vois taper sur le clavier.

J'avais peur que tu sois gros, même si ça ne m'aurait peut-être pas dérangée.

Tu es telle que je l'imaginais.

Tu dis ça pour me flatter.

Non, J'aime ce que je vois.

Merci.

Enfin un corps sur ces mots.

Oui, ça fait du bien de voir un peu de réel.

Oui.

Nous nous montrons nos verres et trinquons contre la caméra.

J'aime bien mon petit apéritif, me dit-elle.

Moi aussi. Ça détend.

Oui.

La soirée avançant, et l'apéritif s'éternisant, nous voilà tous deux décontractés.

J'ai de plus en plus de mal à taper au clavier, les touches devenant plus petites à chaque verre supplémentaire.

L'alcool aidant, je commence à sentir des pulsions monter, et je me retiens de lui écrire de nous voir en réel de suite. Je ne suis de toute façon pas en état de me déplacer, et elle non plus.

J'essaie soigneusement d'éviter ce sujet, par crainte de l'effrayer, quand soudain elle m'écrit :

Tu me montrerais ton torse?

Oui.

Et je m'exécute.

Tu es un peu poilu.

Oui, cela te gène ?

Pas du tout. Me répond elle.

Et toi ? Tu me montre ton torse ?

A peine ce message envoyé, je regrette de l'avoir écrit. Elle va me prendre pour qui ?

Pas le temps de m'inquiéter que la réponse apparaît.

Oui.

Je m'attends à la voir en soutien gorge.

Elle enlève tout le haut.

Elle a des seins ronds, épais et magnifiques.

La luminosité des webcams est trompeuse et de mauvaise qualité, mais je devine une peau un peu ambrée et satinée.

Je reste admiratif.

tu dors? Me demande t-elle.

Non, j'admire.

Quoi?

Tu as des seins superbes.

Merci.

Elle pose ses mains sur ses seins quelques instants, pour les cacher, puis les enlève.

Je ne voulais pas te gêner.

Tu ne me gênes pas, mais je réalise que je me suis déshabillée comme ça, sans retenue et presque naturellement. Ce n'est pas mon habitude.

J'adore ce que je vois, tu es vraiment magnifique.

Merci, mais je n'aimerai pas que tu penses que je me montre comme ça, facilement.

J'imagine que tu ne te dévoiles pas comme ça en public.

Si bien sûr, je suis comme ça, lol.

Il faudra que tu me dises où tu t'exposes, je viendrais te voir tous les jours.

Une exhibitionniste, tu as gagné le gros lot.

Non, une exposition. On exhibe un corps, et on expose une œuvre d'art.

C'est adorable. Mais pour être sérieuse, je ne m'expose pas, et encore moins m'exhibe. J'ai une certaine idée de ma dignité.

C'est tout à ton honneur. Mais je dois dire qu'en ce moment, j'adore te regarder m'écrire, lol.

Ne serais-tu pas vicieux ?

Non, esthète.

Et nous continuons notre dialogue, comme si de rien n'était.

Elle a ma poitrine sur sa caméra, et j'ai la sienne, dans mon champs de vision.

Un verre de plus, et nous sommes de plus en plus détendus.

Je vois sa poitrine se mouvoir au gré de ses mouvements sur le clavier. C'est d'un excitant.

Petit à petit, la soirée dérive sur le sexe. De notre première fois, aux impressions diverses et variées au travers des différentes relations, sans rentrer dans les détails, bien entendu.

Soudain, elle m'écrit :

Tu as des tabous sur le sexe, en couple ?

Non, enfin oui. En fait, tout dépend de l'amour et de la confiance, j'imagine.

Oui, là, je suis d'accord. L'amour et la confiance font tomber des barrières.

Oui, voilà. Après il faut trouver celle avec qui... C'est le plus dur.

C'est vrai aussi. Je me sens à l'aise avec toi, tu sais ?

Moi aussi, je dois dire. Je me sens bien.

J'ai envie de tester cette sensation.

Comment ça ?

Je me sens tellement bien que j'ai envie de pousser un peu plus pour voir.

Pour voir quoi?

Si je me sens toujours aussi à l'aise.

Jusqu'où veux-tu pousser ?

Si je te dis que j'ai envie de voir ton corps complètement, tu serais choqué ?

Non, mais tu ferais la même chose de ton côté ?

Naturellement.

Alors, ok.

Nous voilà tous deux à nous déshabiller complètement , en simultané.

Je suis nu et m'assois nu devant la caméra.

Elle s'assoit, mais je devine ses fesses fermes, sa taille fine, et malgré sa position assise, son sexe épilé.

tu es magnifique, lui dis-je.

Tu as un beau corps et un beau sexe.

Merci, lui dis-je un peu gêné.

Maintenant, nous nous connaissons.

Tu as un très beau corps.

Merci, toi aussi.

Tu es une flatteuse née.

Non, il est rassurant et sensuel.

Tu dois avoir des problèmes de vue, non ?

Mets toi debout, que je t'observe mieux, j'ai peut-être raté quelque chose, lol.

J'adore ta façon de me mettre à l'aise.

Bizarrement, même nue, je suis à l'aise en ta présence virtuelle, devant ton regard.

Moi aussi en fait. Je me sens nu de mes barrières.

Tu es toi, nu devant moi, et moi nue, offerte, sans mensonges. C'est rare.

Oui, et je dois dire, que plus je te découvre, plus je t'aime.

Là, mes pulsations s'accélèrent. Je me suis un peu trop lâché.

Tu m'aimes?

Rattraper le coup.

Oui, je suis désolé d'avoir écrit ça, mais j'aime être avec toi.

Mais ne sois pas désolé. Moi aussi.

Ouf.

Merci, et ce n'est pas la nudité.

Tu es sûr.

Oui. Depuis que je t'ai rencontré, je n'ai qu'une envie... te retrouver ici.

Merci. Moi aussi. J'aimerai que tu sois à mes côtés.

Moi aussi, te serrer contre moi.

Mais c'est un peu tôt.

Je sais.

Et si, lors de notre rencontre nous n'avions rien à nous dire?

J'en suis mort de peur.

Et si nous ne nous plaisions pas, notre visage, notre voix?

J'en suis horrifié.

Tu veux que l'on arrête de se connecter pour ne rien gâcher?

C'est trop tard. Je ne suis pas capable de faire machine arrière.

Moi non plus.

Nous sommes dans une impasse amoureuse.

Oui. Nous perdre en nous trouvant.

Oui, ce serait fâcheux pour moi.

Pour moi également.

Tu as une idée?

Oui, et toi?

Moi aussi.

Nous retrouver dans un hôtel.

Oui, lumière éteinte, et sans parler.

Oui. Laisser parler nos corps.

Oui. Et se retrouver ici pour en parler.

Nous sommes en accord parfait.

Oui

Il ne reste qu'à trouver quand.

Le week-end prochain.

Parfait, samedi soir.

Je réserve la chambre, et la paie d'avance.

Je récupère les clés à ton nom.

Je te rejoins.

Parfait.

Mais je ne pourrais me passer de toi jusque-là.

Moi non plus.

Connectons nous plus tard.

Oui, et nus.

Nous sommes vraiment en accord sur tout.

Oui, et ça me fait encore plus peur.

Restons comme nous sommes, et tout devrait aller.

Tu as raison. A demain soir, je vais aller me coucher.

Bonne nuit ma bohème.

Bonne nuit mon tendre amant virtuel.

A demain ma douce épaule.

A demain mon chevalier charmant.

Nous nous quittons ainsi.

Avant de m'endormir et pour pouvoir m'endormir, justement, ayant son corps imprimé dans mes yeux, je ne peux m'empêcher de me donner du plaisir. Je me masturbe en fermant les yeux, et en imaginant ses seins, son ventre plat et ferme, le début de son sexe, ses hanches parfaites.

Je vais me coucher.

Je m'endors, un sourire aux lèvres.

Elle hante ma nuit, comme un fantôme bienveillant.

Première inquiétude

Dimanche.

Un réveil tardif, tout sourire.

N'ayant pas été très productif la veille, il me faut laver, nettoyer, repasser, afin d'être prêt pour ma journée du lundi.

Plus la journée s'avance, plus je commence à me poser des questions sur notre dernière soirée.

Ne sommes nous pas allés trop loin, sous l'effet de l'alcool ?

Ne va-elle pas regretter cette soirée ?

Je me mets à culpabiliser, et à regretter de ne pas avoir limité la soirée à un dialogue.

Je ne peux plus me passer de sa connexion, de son contact virtuel.

Je n'arrive même pas à comprendre comment il est possible de tomber amoureux de mots, d'un corps, d'échanges, sans écouter la voix, sans voir le visage.

Je passe ma journée à ruminer ainsi, dans l'attente du soir, ou je pourrais enfin la retrouver.

Elle sera déçue de moi, c'est sûr.

Elle regrettera, c'est sûr.

La journée passe lentement, trop lentement, c'est insupportable.

Plus la journée passe, plus je deviens une boule de nerf.

Calme toi, tu ne la connais pas. Essaie de garder ton sang froid.

Impossible.

Vingt heure pétante. Je me connecte. Je ne peux plus attendre.

Mes affaires pour la semaine sont prêtes, et j'ai même repassé pour les six mois qui viennent, tellement je suis nerveux.

Elle n'est pas connectée.

Je reste transi devant mon écran.

Plus les minutes passent, plus un sentiment de panique m'envahit.

20h10.

Nous avons été trop loin, hier.

20h15.

Pourquoi, pourquoi diable ai-je joué le jeu.

20h20.

Connecte toi, s'il te plaît, allez, j'essaierai de me faire pardonner. J'effacerai ton corps de ma mémoire, mais connecte toi.

20h25.

Ne me laisse pas, je t'aime. Allez, connecte toi, s'il te plaît.

20h30.

Elle ne se connectera plus. C'est sûr. La bohème s'en est allée, me laissant le cœur dévasté. Je reste prostré.

20h31.

Une fenêtre de dialogue s'ouvre .

C'est elle.

Tu es là ?

Oui, je t'attendais.

Tu es sûr ?

Oh que oui, et depuis trop longtemps.

Je me suis retenue de ne pas me connecter plus tôt.

Tu n'aurais pas dû.

Mais nous avions décidé de nous connecter plus tard, et j'ai tenu ce que j'ai pu.

Tu as plus de volonté que moi.

J'étais inquiète que tu sois choqué pour hier soir.

Je l'étais tout autant. Je culpabilisais.

Pourquoi?

Parce que j'ai passé une soirée géniale, mais que j'avais peur qu'avec l'alcool, tu ne regrettes le tout.

J'avais la même crainte.

J'ai adoré.

Moi aussi.

Alors, bonsoir, ma bohème adorée, heureux de te retrouver.

Bonsoir mon preux chevalier virtuel.

Je peux être honnête?

Oui.

J'étais mort de trouille avant que tu ne te connectes.

Moi aussi.

Je crois que je t'aime, je suis désolé.

Moi aussi, et nous ne nous sommes jamais vus.

J'ai encore plus peur de te perdre.

Moi aussi.

Cessons de nous inquiéter, et profitons de nous.

Tu as raison. Une webcam ?

Oui, hier soir, nous avions décidé de nous connecter nus. Je ne le suis pas. La peur que tu n'aies changée d'avis, et quelque part, de te faire peur.

J'ai aimé ce moment d'intimité.

Moi aussi.

Alors, pourquoi hésiter.

Et nous voilà, à nouveau connectés en cam, et nus.

Elle est toujours aussi sublime.

La soirée se passe ainsi.

Elle me parle de sa famille, moi de la mienne.

D'anecdotes en anecdotes, nous approchons de l'heure tardive et fatidique ou nous devons nous quitter.

Nous nous quittons avec regrets, en nous donnant rendez-vous le lendemain soir.

Une nouvelle vie professionnelle

Le lundi.

J'arrive au boulot, costard cravate, et chaussures cirées.

A peine arrivé, une réunion de lancement de projet.

Je m'attends à du beau monde, mais en entrant dans la salle de réunion immense, un petit déjeuner pantagruélique nous attend, et toutes les directions des quatre sociétés sont là. Je me sens un peu intimidé.

En bref, je panique un peu.

Mon responsable me prend par le bras pour me présenter tout le monde.

Comme ça, si je me plante, tout le monde me connaîtra.

Puis, il me présente l'équipe projet.

Une jeune femme, talons hauts, tailleur, souriante et avenante. Elle est superbe, mais me semble, justement, un peu trop avenante.

Un homme, la cinquantaine, qui me paraît jovial et bon enfant.

Une femme, classe, en costard pour femme, mais froide, terriblement froide.

Voilà l'équipe que je devrais coordonner.

Ils ont tous de très bonnes expériences, mais, je ne sais pourquoi, je me sens mal à l'aise et un peu intimidé.

Mon patron, me prend à part.

Ne sois pas impressionné.

J'essaie.

Tu es meilleur qu'eux.

J'espère.

Tu vas passer tes soirées avec eux, donc, bouffe-les.

Je vais faire de mon mieux.

Et il y a des compensations.

Comment ça ?

A mon avis, la jeunette, elle doit pas trop aimer être seule le soir.

Nous verrons bien.

Il s'éloigne tout en lançant :

profite, mais réussis le projet.

Merci.

Voilà. Un moment de solitude à me demander ce que je fais ici.

La jeune femme vient me voir :

Moi, c'est Clara.

Fred.

Enchantée.

De même.

L'homme de la cinquantaine s'approche à son tour :

Moi c'est Hubert.

Fred.

On va passer de bons moments.

Je n'en doute pas.

La femme s'approche à son tour.

Marine.

Fred.

Vous serez à la hauteur?

Elle m'impressionne et me fait peur.

Vous me le direz.

Nous n'y manquerons pas.

Voilà, l'équipe était posée.

Où es tu ma bohème, pour me tenir la main?

A peine les présentations faites, nous voilà à devoir partir pour prendre un avion vers Munich, pour une réunion projet dès le lendemain.

Aéroport.

Vol sans encombre.

Hubert a tenté de faire des blagues tout le trajet, et Clara a ri tout le long du trajet. Marine, n'a pas souri une minute.

Taxi.

Hôtel.

Restaurant.

Hubert est en pleine forme, et il a une fan absolue en Clara. Par contre, elle me regarde avec insistance.

Elle est mignonne, mais je connais ce type de personnage.

Marine est, et reste, froide.

A mon avis, elle va rapidement me prendre pour une truffe.

Le repas terminé, Hubert veut aller prendre un verre.

Je refuse l'offre, ainsi que Marine.

Je monte dans ma chambre, suivi par cette femme d'une froideur immense.

En nous séparant, je lui lance un « bonne nuit » le plus avenant possible.

J'obtiens un « bonne nuit » glacial en retour.

Mes aïeux, je vais m'en voir.

Vite, rentrer dans ma chambre et aimer ma bohème.

Essayer de me connecter.

Ça marche.

Elle n'est pas connectée.

J'espère qu'elle n'est pas allée se coucher.

Je patiente.

Dix minutes plus tard et la voilà.

Bonsoir ma bohème bien aimée.

Bonsoir mon chevalier adoré.

Tu m'as manqué.

Toi aussi. Tu mets le visuel?

Quelques secondes, et me voilà connecté nu devant ma perle allongée et nue également.

Tu es encore plus sublime allongée.

Merci.

Tu m'as manqué.

Toi aussi.

Il me tarde ce week-end.

Et moi donc.

J'espère que tu ne seras pas trop déçue.

Et toi non plus.

Aucune chance.

Nous verrons bien.

Le reste de la soirée se passe, à discuter de tout et de rien, mais suffisamment pour me remonter et affronter le lendemain.

C'est une magicienne.

Elle transforme une terre en friche en une terre fertile.

Je l'aime.

Nous nous quittons, et je m'endors comme un enfant.

Une si longue semaine

La semaine se passe. Je fais ce que je peux, mais j'ai du mal à convaincre Marine. Clara et Hubert semblent heureux.

Après Munich, Vienne, puis Milan, pour finir par Madrid.

Une semaine épuisante.

J'ai essayé de faire de mon mieux, mais j'ai cette impression de n'avoir convaincu personne.

Tous les soirs, mes discussions bohèmes, me permettaient de garder le moral.

Et ce samedi soir, je devrais être à la hauteur.

Mais comment l'être?

Je ne le savais pas.

J'ai réservé la chambre, et payé d'avance.

Je rentre le vendredi soir exténué de cette semaine marathon.

Me servir un apéro, et me connecter.

Bonsoir mon chevalier servant.

Bonsoir ma bohème bienfaitrice.

Tu n'as pas peur pour demain?

Si, mais rien n'est obligé.

Je sais.

Tu me feras comprendre si tu n'es pas à l'aise?

Oui, ne t'inquiète pas.

Tu sais, je serais peut-être très excité.

Tout comme je le suis.

Mais, je ne veux pas te perdre. Fais moi comprendre si ça ne va pas.

Je te le promets.

Merci.

Nous nous quittons dans l'impatience du lendemain, comme des enfants dans l'attente de leurs cadeaux de Noël.

Demain sera un jour essentiel. Elle m'aimera, ou pas.

Le début de la découverte ultime.

Le virtuel devient réel

Je me lève heureux.

Ce soir, je vais découvrir, et surtout ressentir ma bohème.

Cette journée me semble bien longue et je suis de plus en plus stressé.

Je ne sais pas comment gérer cette rencontre, sans nous voir, sans parler, juste se toucher.

Je fais un petit tour sur ma messagerie, voir si elle n'a pas annulé.

Non, rien.

Soudain, je la vois se connecter.

Un message :

Bonjour beau chevalier.

Bonjour ma bohème.

tu es là?

Oui.

Pourquoi?

Je venais vérifier si tu n'avais pas annulé.

Là, tu ne me fais pas confiance.

Si, mais je n'ai jamais fait une rencontre comme ça, et je dois avouer que je suis un peu stressé.

Je t'avoue que je me suis connecté pour les mêmes raisons.

Merci de ton honnêteté, je me sens moins nul.

Tu sais, nous pouvons juste nous toucher.

Oui.

Je ne tiens pas à te perdre, dès notre première rencontre.

Moi non plus, et encore moins te décevoir.

Tout se fera naturellement, ou ne se fera pas.

Oui, tu as raison, ne stressons pas, et profitons de cette rencontre hors norme.

Je te quitte, et te dis à tout à l'heure, mon chevalier.

A tout à l'heure ma bohème adorée.

Ce dialogue m'a un peu rassuré.

Par contre, il me faut m'habiller, me préparer.

Elle ne me verra pas, mais touchera, donc privilégier des vêtements aux contacts agréables.

J'ai ce qu'il faut.

Ne pas trop se parfumer, mais sentir bon quand même.

Le temps de tergiverser, il faut que je me dépêche pour ne pas être en retard.

Voilà, je suis prêt, et pas en avance.

Je pars, un léger nœud au ventre.

Plus je m'approche du but, et plus je me sens stressé.

Je dois la rejoindre dans la chambre.

Tu vas voir que je vais m'étaler dans le noir, et être ridicule.

Me voilà arrivé.

Me garer.

Sortir dignement de la voiture.

Pénétrer dans l'hôtel en saluant le réceptionniste.

Monter les escaliers.

Traverser un couloir.

Me retrouver devant la porte de la chambre.

Étrange moment de solitude. Je suis devant la porte et je reste ainsi quelques instants sans pouvoir l'ouvrir.

Ma bohème est derrière cette porte, ou ne l'est pas du tout.

Si elle est là, que je rentre, je risque de tout perdre. Si je n'entre pas, je perds tout, c'est sûr. Je ne vais pas être à la hauteur, je le sens.

Je commence à me fluidifier devant cette porte, qui ne m'a rien fait.

Mais, sur un sursaut d'orgueil subit, je l'ouvre et rentre.

Je la referme aussitôt.

L'obscurité.

Déjà, la porte était ouverte, donc elle est bien là.

Me diriger vers le lit, à tâtons.

Une main me touche, je la saisis aussitôt, pour me rassurer.

Elle est d'une douceur et d'un réconfort, cette main, que je la porte à ma bouche pour l'embrasser. Une peau de satin.

Cette main me dirige vers le lit pour que je m'assois.

Je m'assois, et garde sa main dans la mienne.

J'ai envie de lui parler, de la voir, mais les règles sont définies.

Je suis assis.

Je caresse sa main, comme un automate, ne sachant que faire d'autre.

Elle pose son autre main sur mon bras gauche.

Je desserre mes doigts autour de sa main pour suivre son bras jusqu'aux épaules.

Là, je me détends et l'invite à venir contre moi.

Nous nous étreignons, assis dans le noir.

Je passe mon autre main autour d'elle et la serre contre moi.

Elle me rend volontiers cette étreinte.

Nous restons ainsi de longues minutes, nous étreignant de plus en plus fort, avant de nous décider à nous embrasser.

Un baiser timide d'abord, puis ce baiser grandit pour devenir torrent de passion.

Nous nous allongeons sur le lit en ne cessant de nous embrasser.

Nous tournons l'un sur l'autre, de façon désordonnée.

Nous nous touchons en tournoyant, retirant peu à peu ce qui gène pour un contact complet de nos deux épidermes.

Enfin nous sommes nus, l'un contre l'autre, nous embrassant fougueusement. Ma jambe est entre ses jambes douces et chaleureuses, et une des sienne entre les miennes.

Nous sommes totalement excités.

Elle me plaque sur le dos, remonte son corps sur le mien tout en m'embrassant, puis d'un coup de rein avale complètement mon sexe de son sexe chaud et humide.

Une décharge électrique me secoue les reins et je suis limite crier de bonheur.

Elle pousse un grand gémissement, et s'arrête de bouger, tout en plongeant son visage dans mon cou.

Nous nous serrons soudain très fort, n'osant plus bouger pendant quelques instants.

Le sang afflue dans mon sexe par saccades. Il faut que je me calme.

L'excitation se diffuse peu à peu, et je ressens à nouveau la chaleur de son sexe autour du mien.

Lentement, elle démarre des va-et viens sur mon sexe. Je l'aide en posant mes mains sur ses hanches et en facilitant ses mouvements.

Comme des vagues, nos sexes se prennent et se détachent, en flux et reflux de plus en plus rapides, de plus en plus profonds. Ces vagues, de plus en plus puissantes, deviennent tempêtes, pour finir dans une explosion puissante et bruyante, avant de mourir doucement, nous laissant épuisés et immobiles.

Je la serre très fort dans mes bras.

Elle m'embrasse dans le cou.

Nous nous embrassons.

Nous sommes resté lovés ainsi un long moment.

Le temps de récupérer, et de recommencer.

Nous avons fait et refait l'amour cette nuit là.

Mes mains et mes lèvres ont apprivoisé les moindres recoins de son corps, et elle a dompté le mien.

Maladroits par moments, mais toujours en douceur.

J'ai dévoré chaque recoins de ses seins, goûté son sexe divin, léché le creux de ses reins, et tout ce que je découvrais n'était que plaisir..

Ses mains furent joueuses, et sa bouche intime.

Nous étions encore timide, mais que ce fût bon.

Le lendemain

Comme convenu, je suis parti en silence et dans l'obscurité.

Mais quelle nuit.

Je n'ai pas dormi, et elle non plus par la même occasion.

Nous avons découvert nos corps de nos doigts, de nos langues. Nous avons découvert nos respirations, nos battements de cœur.

J'étais totalement attentif à la moindre de ses réactions.

Nous étions unis comme jamais.

Une nuit à nous découvrir, à nous aimer, à nous écouter dans le plus profond du silence.

Son corps contre le mien, toute cette nuit.

Nous avons fait l'amour, c'est vrai. De nombreuses fois.

La chambre sentait nos corps unis.

Je rentre chez moi, complètement rêveur.

Récupérer.

Préparer mes affaires pour la semaine, et dormir.

La douche? J'ai son odeur sur moi, la garder jusqu'au lendemain.

Me coucher.

Je me lève vers 19h00, avec une faim énorme.

Un bon repas.

20h00.

Je me connecte.

Surprise, ma bohème est là.

Je ne peux m'empêcher de lui écrire.

Bonjour ma bohème d'amour.

Bonsoir, mon bel étalon.

J'ai passé une nuit merveilleuse.

Et moi donc.

Je vis un rêve éveillé.

Je suis heureuse.

Tu imagines ? Je ne connais, ni ton visage, ni ta voix, et je t'appartiens déjà, tout entier.

M'appartiendras-tu toujours si nous nous découvrons plus.

Il nous suffira d'éteindre la lumière.

Quel souvenir.

Oh oui.

Je t'aime.

Tu ne me l'avais jamais dit, je suis flatté.

Et tu vas en profiter.

Oui, pour t'aimer encore plus.

Tu es un ange.

Tu es ma déesse.

Nous nous quittons quelques minutes après.

Je me sens amoureux fou, mais je me sens un peu frustré d'être amoureux d'une personne que je pourrais croiser, voire bousculer dans les transports, sans la reconnaître.

Je me couche en pensant à elle, et dort en pensant à elle.

Quel week-end.

Une aide inattendue

Lundi.

Le réveil.

Vite se préparer.

Effacer les odeurs du week-end sur mon corps.

Aéroport.

Rejoindre ma fine équipe.

Je suis dans un coton, et répond comme un automate, en ne faisant attention à rien.

Monter dans l'avion, direction Lisbonne.

J'ai une présentation à faire, je ne suis pas prêt, mais je suis dans un autre monde.

Soudain, un voix d'homme entre dans mon rêve.

C'est Hubert.

Tu es prêt?

Pas vraiment.

Tu plaisantes?

Non.

Clara bondit :

Cette journée est essentielle.

J'improviserai.

Improviser quoi, s'énerve Hubert?

Tu n'as rien préparé, s'énerve Clara?

Je n'ai rien préparé.

Tu plaisantes, enrage Hubert.

Oui, je sais de quoi je vais parler.

Ah!, firent Clara et Hubert. Point de Marine.

Je n'ai rien préparé, et elle va me cueillir à froid.

J'aurai dû préparer mon sujet ce week-end, mais ma bohème... oh, ma bohème.

Je maîtrise mon sujet, mais je n'ai pas réfléchi à la façon de le présenter.

Ça va être une tuerie, je le sais, mais je m'en fous. J'aime ma bohème.

Vivre lumière éteinte, ne pas se parler. Juste être contre elle.

Atterrissage.

Taxi.

Ça y est j'y suis. Là tu peux leur vendre ta bohème.

Tu vas être ridicule.

Nous arrivons sur site.

Un café avec tout le monde.

Je commence à sérieusement redescendre sur terre et à légèrement paniquer.

Je sens Hubert et Clara inquiets, et contre toute attente, Marine détendue.

Elle va me crucifier.

Me voilà seul devant mon jury.

Ils attendent des informations, des objectifs et des jalons, et je suis à la rue.

Je débute en leur donnant les informations génériques du projet.

Jusque là tout va bien.

Puis je dois attaquer les objectifs et les différentes étapes.

Mais là, je commence à me perdre un peu.

Une question.

Je dois bien dire que je ne me souviens même pas de la question.

Marine s'est levée, et a prit le relais en disant :

c'est ma partie, je vais vous répondre.

Et elle a assuré comme un as, tout en vantant mon travail, en plus.

J'étais interloqué, stupéfait.

Quelle mouche l'avait piquée?

La journée s'est poursuivie par des visites de sites.

Le soir Hubert et Clara décident de sortir avec les employés locaux.

Voulant rejoindre ma bohème, je prétexte du travail pour éviter la sortie. Marine fait de même.

Marine et moi prenons les clés de la chambre ensemble.

Nous sommes à côté.

Je suis son pas pour rejoindre notre espace d'intimité.

Au moment ou elle ouvre, je la regarde et lui dit :

Merci.

Merci pour quoi.

Tu m'as sauvé.

De quoi?

Du ridicule.

Juste ça? Ce n'est rien.

Vraiment merci.

Je n'aime pas les merci.

Tu manges au restaurant de l'hôtel?

Oui.

Veux-tu dîner avec moi.

Si on ne parle pas boulot.

Pas de soucis, dans dix minutes en bas.

Et me voilà, ayant invité Marine, tout en espérant que le repas sera le plus rapide possible pour ne pas faire patienter ma bohème.

Je la retrouve au restaurant quelques minutes plus tard.

Nous nous asseyons.

C'est une belle femme.

Elle a une classe naturelle, sans être bourgeoise.

Elle m'a paru froide, mais, ce soir, elle me paraît détendue.

J'attaque :

Encore merci.

Ah non, sinon, je pars.

Non, je te suis juste reconnaissant.

Bon, ce n'est rien.

Je peux être honnête?

Oui.

Je la sens inquiète.

Tu m'impressionnes.

Comment ça?

Je ne sais pas, je me sens mal à l'aise, et aussi surprenant que ça puisse paraître, pas là.

Non, je ne comprends pas, mais je peux aller manger seule.

Non, surtout pas. Tu as une assurance, une froideur au boulot. Je ne me sens pas à la hauteur, peut-être.

On a dit que l'on ne parlait pas de boulot.

Oui, tu as raison.

Mais j'aime ta franchise.

Merci, je suis maladroit aussi.

J'ai vu.

Et pas très sérieux.

J'ai vu.

J'ai une excuse.

Ah?

Mais je ne peux pas en parler.

Ce n'est pas une excuse, mais un aveu.

Ça restera entre nous?

Non, je vais courir en parler à Clara et Hubert, quand ils rentreront bourrés. Je plaisante.

Je suis amoureux, et c'est le début.

Amoureux comment?

Je ne peux pas le décrire, mais c'est nouveau pour moi.

Tu es honnête?

Toujours.

Je le sais.

Merci.

Je le sens.

A première vue, je te voyais comme une personne ultra rigide, mais là, je suis très surpris.

Je sais, on me l'a souvent dit.

Elle fait une légère moue contrariée.

Elle a des cheveux bruns, longs et raides, des yeux noisettes, un visage de poupée, dès qu'elle est détendue.

je te rassure. L'homme a cette sensation dès qu'il croise un femme qui a confiance en elle, et que lui n'a pas confiance en lui.

Belle analyse. Mais elle implique que tu n'aurais donc pas confiance en toi.

Gagné.

Bel aveu.

Tu peux en profiter.

Jamais.

Tu aurais dû avoir ma place, tu as les compétences.

Je ne le veux pas.

Pourquoi?

Je ne le veux pas. J'ai aussi une vie.

Oui, je comprends.

L'entrée arrive.

Je n'arrive pas à la lâcher des yeux. Je le trouvais froide, mais je la découvre charmante.

L'entrée terminée, elle m'attaque :

Tu as géré beaucoup de projets de ce type?

Non.

Je le savais. N'hésite pas à me demander de l'aide.

Merci.

Point final sur le boulot.

Point final.

Parfait. Tu es amoureux depuis longtemps?

Non.

C'est nouveau alors?

Oui.

Elle est belle?

Elle est ce que je cherchais depuis longtemps.

C'est beau.

C'est magnifique.

Tu es heureux.

Oui, je le suis.

C'est le principal.

Et toi?

Je peux te faire confiance?

Oui.

Je suis amoureuse.

C'est génial.

Il est adorable.

Le plat arrive.

Je te souhaite beaucoup de bonheur.

C'est un début.

Tu le ressens bien?

Oui.

C'est l'essentiel.

Le reste du repas, nous avons parlé actualité, littérature, musique.

Un repas fort agréable.

Tout le repas, malgré tout, je culpabilisais de la situation d'attente dans laquelle devait se trouver ma bohème.

Nous nous sommes quittés, et à peine dans ma chambre, je me suis connecté.

Elle n'était pas là.

Elle avait dû se déconnecter, à force de m'attendre.

Soudain elle apparaît.

Je m'excuse du retard, et elle accepte mes excuses.

Quelques minutes à s'aimer de mots, de phrases imprimées sur l'écran, à se souvenir de cette nuit si sensuelle.

Quelques minutes de bonheur intense.

Elle me manque.

Je lui manque également, c'est bon signe.

Nous convenons d'une nouvelle rencontre le week-end suivant.

Cette fois-ci, elle l'organise.

J'accepte.

Nous nous quittons ainsi, et il me tarde déjà d'être le week-end.

Une collègue

Mardi.

Se préparer.

Petit déjeuner avec mes trois acolytes.

Clara et Hubert ont de petites mines. Ils ont dû faire la fête une partie de la nuit.

Ils nous raconteront une fois bien réveillés.

Marine est souriante. C'est nouveau.

Nous revoyons le planning de la journée.

Une dernière réunion de débriefing sur site, un repas, puis départ pour Tunis.

Demain, une autre réunion importante. Cette fois-ci, essayer de la préparer avant, pour être plus efficace.

En plus il me faudra faire un compte rendu de ces premières journées pour la direction, et mettre en place le planning projet exact.

En bref, je vais commencer à avoir du boulot.

Il va falloir que je mette un peu mes acolytes à contribution.

Un taxi.

Partir sur site.

Je fais une présentation rapide de l'état du projet, et explique qu'en l'état, tout risquait d'évoluer, mais que nous devions rencontrer tous les acteurs pour affiner les étapes, et donc les objectifs de chacun.

Ils nous remercient; nous déjeunons ensemble.

Le départ.

Aéroport.

Nous montons dans l'avion.

Nos places sont dispatchées.

Je me retrouve assis à côté de Marine.

Cela tombe bien, contre toute attente, c'est avec elle que je me sens le plus à l'aise, surtout depuis hier soir.

Je sors mon ordinateur portable, pour commencer à rédiger le compte rendu, et ainsi m'avancer un peu.

Marine me propose de m'aider, et j'accepte la proposition aussitôt.

J'imagine que tu n'as rien fait hier au soir.

Tu imagines bien.

Normalement, nous devrions travailler ensemble, tous les quatre sur ce projet.

Oui, mais je suis censé être coordinateur.

Coordinateur ne veut pas dire tout faire.

Oui, tu as raison.

Et nous voilà travaillant le plan projet et le compte rendu.

Un vrai casse-tête.

Nous arrivons à destination, et tout est quasi terminé... Enfin, beaucoup de questions restent en suspens, et il va falloir mettre nos deux acolytes à contribution.

Nous atterrissons à Tunis.

Direction l'hôtel.

Arrivés à l'hôtel, Clara et Hubert veulent aller se promener en ville.

Je prends mon rôle à cœur, et leur dit qu'il est encore tôt. Ils iront en ville après manger.

Ils ont une demi-heure de détente, et on fait une réunion avant de dîner.

Je sens quelques réticences, mais ils acceptent.

Je vais à l'accueil de l'hôtel voir si ils peuvent nous mettre une petite salle ou une grande table au restaurant pour faire une réunion.

Ils me proposent une petite salle, mais qu'ils me factureront.

Vu le tarif, j'accepte.

Je m'installe dans ma chambre.

Comme il fait chaud, je me mets un peu à l'aise, et me rafraichis.

Une fois cela fait, me voilà à taper aux portes des trois chambres pour leur indiquer que nous nous voyons de suite en salle de réunion.

Quelques minutes plus tard nous sommes fin prêts.

Nous réglons les derniers points critiques, et nous découvrons qu'un certain nombre de données nous manquent pour arriver à être au point.

Je charge Clara, Hubert et Marine de récupérer ces informations pour la semaine prochaine.

Voilà. Nous pouvons aller dîner.

Tout est calé, il ne me reste que la présentation de demain à voir.

Nous dînons tous ensemble.

Clara et Hubert partent se balader en ville, et me proposent de les accompagner. Je refuse, indiquant que je dois préparer ma présentation du lendemain.

Ils proposent à Marine, qui refuse également.

Ils s'en vont donc tous les deux.

Je commence à partir du restaurant à mon tour, et Marine me demande si je veux prendre un café en sa compagnie.

J'accepte.

Nous sommes installés au bar. Le café est servi.

Tu es prêt pour demain?

Loin de là.

Et tu seras prêt?

J'espère.

Tu veux un coup de main?

C'est gentil, mais je crois que tu as quelqu'un à contacter.

Oui, mais je peux te rejoindre après.

Je n'ai pas réservé de salles, et la réception est fermée à cette heure.

On le fait dans une chambre.

Oui, j'ai une terrasse, nous mettrons la table dehors.

Tu me laisses une petite heure?

Oui.

Le café terminé, nous voilà partant dans nos chambres respectives.

A peine dans la chambre, j'allume mon pc.

Vite ma bohème.

Elle est là.

Bonjour ma bohème.

Bonsoir mon chevalier.

Tu me manques.

Toi aussi.

Je ne pourrais pas rester longtemps ce soir, j'ai une présentation à terminer pour demain, et je suis à l'ouest.

Je comprends. J'espère que ta présentation n'a pas de belles jambes longues, et des yeux de velours.

Non, elle a des touches partout et des schémas, des tableaux, et elle est très sensuellement peu excitante.

Bon, je te fais confiance, mais tu devras te faire pardonner.

Tout ce que tu voudras, ma bohème.

Ne me tente pas.

Mais j'espère bien que je te tente, au moins un petit peu.

Tu verras ça, ce week-end.

Qu'est ce qu'il me tarde.

Moi aussi, mon petit voyageur.

Tu es où là ?

Dans ma chambre, nue devant tes mots.

Ne m'excites pas. Nous ne sommes que mardi. Il faut que je patiente jusqu'à samedi soir.

Mais pour une soirée pleine de surprises.

A ce point?

Oui.

Je suis impatient.

Tu penses à moi?

Tout le temps.

Moi aussi.

Plus que quatre nuits sans toi.

C'est beaucoup trop. Tu es où, je te rejoins.

A Tunis.

Tu plaisantes?

Non, malheureusement.

C'est un peu loin.

Je sais.

Nous nous quittons quelques minutes après, en voyant que nous ne pourrons pas nous rejoindre.

Elle me manque.

J'ouvre le fichier pour essayer de créer ma présentation. Je suis dans mes rêves de bohème, et j'ai du mal à me concentrer.

Je m'allonge, et me remémore ce week-end.

Mon esprit s'évade complètement.

On frappe à la porte.

Je sursaute, me demandant bien qui cela peut être, puis je me souviens que Marine doit venir travailler avec moi.

Elle va me prendre pour un charlot, je n'ai rien débuté.

Je vais ouvrir.

Elle s'est changée.

Une robe longue, un peu décolletée, mais rien de choquant.

J'installe le bureau sur le balcon.

Il fait bon.

A peine assis, elle me demande :

Tu as commencé?

Non.

Je m'en doutais.

J'étais avec elle.

Je m'en doutais aussi.

Tu étais en agréable compagnie toi aussi, non?

J'avoue.

Je suis désolé de n'avoir rien préparé. Je me rends compte que ça n'excuse rien.

Ne t'inquiète pas, j'aurais pu être en plus désagréable compagnie.

Merci, premier compliment caché.

Non, ce n'est pas un compliment. Quand je me sens en confiance, je peux être une personne tout à fait détendue.

Je le sais.

Comment?

Je le sens.

Nous voilà à débuter la présentation.

Une soirée de boulot.

Par moment, mon regard se pose sur elle. C'est une très belle femme. Un charme froid et discret au premier abord, mais elle est très jolie.

Nous terminons la présentation.

Je la remercie de son aide.

Je la raccompagne, et au moment où elle va sortir, je lui demande, un peu bêtement:

Je peux te faire la bise?

Pourquoi?

Je me sens un peu bête, et hésite à répondre.

Elle prend les devants :

Tu n'étais pas obligé de demander, je t'aurais fait une bise de façon naturelle.

Je préférais demander, j'avais peur que tu refuses.

Tu as toujours peur de moi?

Non.

Mais?

Mais rien.

Si, il y a un mais.

Tu es une très belle femme, compétente et sérieuse, et je me sens un peu, comment dire, pas à ta hauteur.

Tu as d'autres qualités, rassure-toi. Et j'apprécie travailler avec toi.

Merci.

Bonne nuit.

Elle s'approche, me fait une bise et s'en va.

Bonne nuit.

Quelle femme.

Je ferme la porte.

Je commence à penser qu'elle est mon complément professionnel. J'ai des idées, et elle me tempère. J'ai des solutions, et elle les formalise clairement.

En bref, elle amène de la lisibilité et de la sagesse à mes idées. Et mes idées sont plus cohérentes, lorsqu'elle est là.

Pour le moment, ce duo professionnel est parfait.

Je vais me coucher en repensant à ma bohème.

Premier problème

Mercredi.

Je présente le projet, préparé la veille avec Marine.

Tout le monde est conquis, et je remercie mes trois contributeurs, en insistant spécifiquement sur Marine.

Déjeuner.

Une visite de site, puis départ pour l'aéroport.

Direction Casablanca.

Taxi, hôtel et réunion à quatre avant le dîner.

Le dîner.

Clara et Hubert partent visiter la ville de suite après.

Je reste avec Marine.

Nous prenons un café, et nous donnons rendez-vous une heure après pour la présentation du lendemain.

J'arrive dans ma chambre, me connecte.

Elle est là.

Bonsoir ma bohème adorée.

Bonsoir mon chevalier manquant. Tu me manques.

Toi aussi, mon rêve.

Tu es mignon.

Non, amoureux.

Moi aussi. Tu es où ce soir ?

À Casablanca.

Ça va, on ne se refuse rien.

Je n'ai pas choisi.

Tu m'accorderais une requête?

Tout ce que tu veux.

J'ai envie d'entendre ta voix ce week-end.

Seulement si j'entends la tienne.

C'était prévu.

Alors pas de soucis.

Nous communions ainsi encore quelques minutes avant de nous quitter.

Puis, je regarde rapidement mes mails, et l'un d'entre eux me choque.

La société pour laquelle travaille Marine voudrait libérer Marine pour me mettre une autre personne à la place.

Je réponds vivement, que c'est une personne qui m'est d'une grande aide et, dans l'état du projet, dont je ne peux pas me passer.

Je suis tout retourné.

Quelques minutes plus tard, Marine frappe à la porte.

Nous travaillons toute la soirée.

Je ne sais comment lui en parler, mais je ne souhaite pas qu'elle quitte le projet.

Avant qu'elle ne parte, je lui pose la question :

Ce projet t'intéresse?

Pourquoi me poses-tu cette question.

Comme ça, réponds-moi. Tu as un autre projet en vue ou tu veux avancer avec nous sur ce projet ?

Tu es bien curieux.

Réponds-moi s'il-te-plaît.

Je suis emballée par ce projet, et ne désire pas le quitter.

Tu es sûre?

Tu vas me vexer.

Ce n'est pas ce que je souhaite. J'adore travailler avec toi, mais je ne voudrais pas apprendre que tu ne t'y sens pas à l'aise, ou que tu désires autre chose.

Ce n'est pas le cas, mais je ne te comprends pas.

J'aime travailler avec toi.

Moi aussi. Tu te répètes.

Si tu veux être coordinatrice, je te laisse mon poste.

Pourquoi me dis-tu ça? Tu penses que je veux te piquer ton poste?

Non, ce n'est pas ça.

Tu vois, je m'entendais bien avec toi, et te faisais confiance, mais je trouve que tu vas trop loin. Tu me déçois.

Et je n'ai pas le temps de répondre qu'elle a claqué la porte.

Super.

Je vais la perdre, je ne le veux pas, et je ne sais comment lui dire que sa direction le veut, et pas moi.

Cette nuit là, j'ai très mal dormi.

Début d'amitié

Jeudi.

Une journée de présentation, suivie d'une vraie soirée à l'hôtel, où je pourrais profiter, car le vendredi, c'est le retour en France.

Je sens Marine tendue toute la journée.

Professionnellement, tout se passe comme sur des roulettes.

Le soir, nous mangeons ensemble.

Marine ne me regarde pas.

Je suis mal à l'aise.

Clara et Hubert poursuivent leurs soirées, et je rentre dans ma chambre, tout comme Marine.

Je me connecte.

Discuter avec ma bohème va me remonter le moral.

Je ne lui dis rien, mais ses mots me font du bien.

C'est une merveille.

Elle m'annonce que nous nous verrons ce samedi soir, et que ce sera dur d'attendre jusque là.

Pour moi aussi.

Nous nous quittons.

Je suis perturbé par la réaction de Marine.

Je voudrais aller la voir, mais je ne sais ce que je pourrais lui dire.

Je me connecte sur mon mail.

Une très bonne nouvelle : Marine reste quelques semaines de plus sur le projet.

Je suis ravi, mais d'un coup je remets tout en question.

Elle ne peut plus me regarder. Cela va être dur à gérer.

J'aurais envie d'aller lui parler, mais je ne veux pas qu'elle sache que sa société voulait la sortir du projet.

Situation compliquée.

Je ne sais pas quoi faire.

Soudain, on frappe à la porte.

Pour le coup, je n'attends personne.

Je vais ouvrir.

Devant moi, Marine, les yeux rougis.

Entre.

Elle entre.

Je referme derrière elle.

Elle ne dit rien.

Je m'excuse, je ne voulais pas te froisser.

Je sais.

Je m'en veux.

Pourquoi?

Pour toutes ces questions. Je n'ai pas été à la hauteur de ce que tu m'as apporté.

Si.

Non, je ne t'ai pas fait confiance.

Si.

Non.

Marine pleure et a du mal à parler.

Un peu dérouté, je lui demande :

En quoi t'ai-je rendu l'aide que tu m'avais donnée ?

Elle éclate en sanglots.

Je la prends dans mes bras, sans trop comprendre.

Elle me serre dans ses bras et plonge son visage sur mon torse.

Je reste comme cela quelques minutes, le temps qu'elle récupère.

Elle se calme.

Elle s'écarte de moi, et me demande :

Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?

Dis quoi?

Que ma société cherchait à me licencier?

Parce que je ne le savais pas.

Tu le savais.

Non.

Alors, pourquoi m'as-tu défendue ?

Marine, calme-toi, et asseyons nous.

Elle s'assoit sur mon lit. Je m'assois à côté d'elle.

Je reprends :

Je ne comprends pas ton histoire, et je ne t'ai pas défendue, car je n'étais pas au courant.

Mais si. Dis-moi la vérité.

Je te la dis.

Tu as bien écris un mail pour dire que tu voulais que je reste sur le projet.

Oui, mais je croyais que c'était toi qui voulais quitter le projet.

Comment ça ?

J'ai reçu un mail de la direction me disant qu'ils voulaient te mettre sur un autre projet, et j'ai simplement répondu que je voulais que tu restes.

C'est pour ça tes questions ?

Oui, je pensais que tu n'appréciais pas de travailler sur ce projet.

Et tu as refusé quand même ?

Oui, j'ai besoin de toi sur ce projet. Tu me complètes parfaitement et j'apprécie de travailler avec toi.

Elle se remet à pleurer.

Je la prends à nouveau dans mes bras.

Quelques instants plus tard :

Pourquoi ne m'as-tu rien dit ?

Parce que je ne savais rien.

Merci.

Merci de quoi ?

De m'avoir soutenue. J'ai eu une passe difficile ces derniers temps.

Merci à toi de m'avoir soutenu.

Elle me serre fort dans ses bras.

Elle me demande si elle peut voir le mail qu'ils m'ont envoyé.

J'accepte.

Mon ordinateur n'est pas éteint.

La première chose qui s'affiche est ma connexion sur ma messagerie directe.

Je la ferme très vite.

Elle n'a pas eu le temps de voir, c'est sûr.

Je lui montre le mail.

Et la, elle se remet à pleurer.

Ils voulaient me licencier, et tu m'as sauvée, sans le savoir.

Ils ne t'auraient pas licencié, tu es trop compétente.

Non, mes derniers projets n'ont pas été glorieux. Je n'ai pas été à la hauteur.

Pourquoi?

Des histoires d'hommes.

Ah!

Non, pas ce que tu crois. Eux étaient beaucoup moins sérieux que toi et un peu trop entreprenants.

Tu les a fait partir.

Nous sommes dans un monde d'homme. J'aime le travail bien fait, et eux avaient d'autres idées.

Je comprends, mais je veux que tu continues à bosser avec moi. Avec toi, je suis rassuré, tu es mon complément.

Merci.

Merci à toi.

Non, tu es adorable.

Non, j'aime travailler en confiance.

Elle se remet à pleurer et s'allonge sur le lit.

Je m'allonge face à elle et met son visage sur mon épaule.

Elle est magnifique, triste et désemparée.

Son odeur me rappelle ma bohème.

Je lutte intérieurement. Ma bohème, et Marine. Si bohème savait...

Pendant des années, je n'ai rencontré que des personnes superficielles, et voilà que je rencontre deux femmes adorables et saines en même temps.

Elle s'endort.

Nous restons ainsi toute la nuit.

Une excuse et un repas particulier

Vendredi.

Au petit matin, une bise sur la joue me réveille.

Je me lève en sursaut.

Je vois Marine dans ma chambre.

Merci pour tout, je vais dans ma chambre me doucher.

De rien Marine.

J'ai été un boulet pour toi cette nuit.

Non, ce fut avec plaisir.

Tu es un amour.

Tu es adorable.

Elle quitte la chambre.

Elle ouvre la porte et j'entends la voix d'Hubert :

Je comprends mieux pourquoi vous ne vouliez pas venir.

Euh non. Balbutie Marine.

On ne me la fait pas. Je comprends mieux. Et il s'éloigne.

Marine entre à nouveau dans ma chambre :

Je suis désolée. Hubert était dans le couloir, et...

J'ai entendu.

Que vont-ils penser? me dit-elle affolée.

Laisse-moi faire, j'ai une solution.

Tu es sûr?

Oui.

Elle quitte la chambre, visiblement rassurée par mes paroles.

A peine la porte fermée, je me demande bien ce que je vais pouvoir raconter.

Je sens que la journée va être longue.

Je tarde un peu à me préparer.

Je descends rejoindre tout le monde pour le petit déjeuner.

En arrivant dans la salle, j'essaie de prendre un air fatigué.

Hubert me voit arriver, et, un sourire aux lèvres :

La nuit a été mouvementée?

Ne m'en parle pas. Je suis crevé.

Je vois Marine se décomposer.

On avait cru comprendre.

Comprendre quoi?

Que la soirée avait été pleine de surprise.

Des gens se sont plaints ?

Là, je sens Marine qui ne me suit plus du tout.

Non, je ne crois pas ?

J'ai eu peur.

Peur de quoi? Qu'on vous entende ?

Et là, je joue la personne un peu vexée :

Qu'on entende qui ?

Euh ?

Vas au bout, ça m'intéresse.

Vous deux.

Nous deux, qui. J'étais avec quelqu'un cette nuit ? Vous m'avez vu ?

Non.

Je ne comprends pas.

Toi et Marine.

Moi et Marine quoi ?

Je vois Marine se mettre la main devant les yeux.

Tous les deux.

Quoi tous les deux, je ne te comprends pas du tout.

Et bien... tu vois ce que je veux dire.

Non, pas vraiment.

Vous avez dormi tous les deux.

Ah ? Ravi de l'apprendre.

Comment ça ?

Marine est venue me réveiller, certes, et je l'en remercie.

Elle enlève ses mains des yeux, surprise.

Et je continue :

Je ne pense pas que Marine ait dormi avec moi, sinon j'en serais vraiment désolé.

Tout le monde est surpris. Marine me regarde d'un œil bizarre. Visiblement, elle n'a pas appréciée la dernière phrase.

Je poursuis :

Oui, j'ai été lourd, hier soir.

Comment ça ? Demande Hubert intéressé.

Bon, j'ai fait le con.

Je vois Marine le visage surpris, qui ne comprend pas du tout ou je veux en venir.

Raconte-nous.

Hubert est toujours aussi intéressé.

Je me suis pris la tête avec mon amie, j'ai bu, et comme je me sentais seul, je suis allé ennuyer Marine dans sa chambre...voilà.

Et ? dis Hubert en regardant Marine.

Et elle a été adorable, et m'a reconduit à ma chambre, car je ne tenais plus bien debout.

Ah!

Oui, je ne suis pas fier, mais j'essaie d'assumer mes conneries. D'ailleurs encore désolé Marine.

Ce n'est rien, me dit Marine, avec un regard reconnaissant.

Tu n'es pas rancunière, toi, dit Hubert.

Il ne m'a pas sauté dessus non plus. Il voulait juste dormir avec moi. Il était saoul.

Voilà, l'histoire est réglée. Par contre je me sens un peu moins crédible vis à vis d'Hubert et Clara.

Nous récupérons nos affaires et partons pour l'aéroport.

Une fois dans l'avion, je suis situé à côté d'Hubert.

Durant le vol, il fallait bien qu'il attaque le sujet :

Bien tenté. Je reconnais que c'est une jolie femme.

Hubert, je suis assez gêné vis-à-vis d'une collègue, s'il te plaît n'en rajoute pas.

Tu crois que je n'ai pas tenté avec Clara?

Comment ça?

Attends, nous sommes des hommes.

Et elle a accepté?

Non.

Et vous sortez le soir ensemble?

Oui, on aime bien faire la fête ensemble.

Je ne comprends plus.

Je lui ai demandé, elle a refusé, et voilà, on s'arrête là.

Vous êtes zen.

Tu réfléchis trop. Marine n'a pas l'air de t'en vouloir, alors ne te prends pas la tête.

Tu as sûrement raison.

Hubert réussit à me déculpabiliser d'un acte que je n'ai pas commis. C'est une situation loufoque.

Atterrissage.

Récupérer les bagages et rentrer chez moi.

Quelle semaine.

Vite me connecter.

A peine le temps d'allumer l'ordinateur que le téléphone sonne.

Oui?

C'est Marine.

Oui Marine.

Je ne te dérange pas?

Non, pas du tout.

Merci pour ce matin.

Mais de rien.

Tu es adorable, tu sais?

Non. Tu étais mal à l'aise, et j'ai trouvé une explication. Bon, elle vaut ce qu'elle vaut, mais sur le moment, c'était ma seule idée.

Merci.

Non, Marine, ne me remercie pas. Par contre, on se retrouve lundi, et tu ne me lâches pas.

Non, mon capitaine.

Passe un bon week-end.

Toi aussi.

Bises.

Bises.

Vite me connecter à ma bohème.

Je n'en peux plus de cette attente de l'avoir au bout du clavier, enfin seuls.

Elle est connectée.

Bonsoir ma bohème bien aimée.

Bonsoir mon chevalier tant désiré.

Tu m'as manqué.

Toi aussi. J'ai pensé au goût de ta peau et à ta chaleur toute la semaine.

Moi aussi. Il me tarde demain.

Nous ne sommes pas loin.

Je sais, et si je savais ou tu étais, j'aurai couru chez toi dès ce soir.

Et je t'aurais accueillie à bras ouverts.

Tu me mets au supplice.

J'ai envie de te sentir près de moi.

Et moi donc.

Viens.

Tu as tout prévu pour demain, je ne veux pas te déranger.

Viens.

J'arrive.

Une douche, s'habiller.

Partir pour une soirée de bohème.

Je n'ai pas dîné, mais ce n'est pas grave.

Je roule vers toi ma bohème, le cœur et les hormones en ébullition.

Retrouver ta peau.

J'arrive devant chez toi.

Un immeuble récent.

Faire le code d'entrée de l'immeuble.

Monter au second.

Je suis devant ta porte, ivre de désir de te sentir.

Tu m'ouvres.

J'entre et tu refermes aussitôt.

L'obscurité est totale.

Tu me prends par la main et m'attire.

Amène-moi au bout du monde, je te suis.

Tu m'assois sur le lit, et t'installes à côté.

Je prends tes mains dans les miennes.

Elles ont la douceur des cœurs de pétales de rose.

Nous nous embrassons tout en nous déshabillant.

Je caresse longuement ton corps et m'enivre de tes odeurs. Je caresse un champ de fleur.

De ta peau de soie à tes odeurs printanières, tout n'est que délice.

Tu m'échappes quelques instants pour mieux me revenir.

Tu t'assois sur mes cuisses, et m'enchaînes de tes jambes.

Tu m'embrasses.

J'ai ta poitrine collée à la mienne. Un enchantement.

Là, tu cesses de m'embrasser et insère dans ma bouche une fraise.

Quel délice.

Puis tu mets une fraise dans ta bouche et viens m'embrasser. Nous échangeons la fraise de notre bouche et de nos langues.

Tu m'allonges sur le lit et te relève.

Soudain, je sens un contact inhabituel sur mon torse. Je te sens appuyer dessus, et un liquide se met à couler. Une odeur boisée m'envahit.

Un fruit des bois.

Tu te mets à écraser des fruits sur tout mon corps.

Je suis complètement humide et sucré.

Une odeur fruitée emplie la chambre.

Je suis recouvert de liquide sucré.

Tu t'allonges sur moi, et m'embrasses.

Tout en nous embrassant, nous nous frottons l'un contre l'autre intensément.

Elle est toute sucrée et fruitée également.

Soudain, nous nous mettons à nous lécher, le moindre recoins de nos corps.

Il n'y a plus de sens, de logique.

Nous nous tournons autour, et nous léchons le moindre bout de peau.

Tu me lèche le torse, et je déguste tes épaules. Tu goûtes mes seins, je dévore tes fesses. Tu lapes mon ventre, je savoure tes seins. Tu t'occupes de mes jambes, je déguste tes orteils. Tu engloutis mon sexe, et je m'enfouis dans le tien.

Nous sommes tous les deux collant collants et humides de fruits et de nos langues.

Tu m'allonges sur le dos, tu saisis mon sexe de la main, et l'introduis en toi.

Un délice.

Tu t'assois sur mon sexe et te mets à aller et venir, avec de petits gémissements.

Je me relève, pour plonger mon visage dans tes seins, et finir de boire ce jus sucré.

Nous sommes collants de sucre.

Tout en me faisant l'amour, tu continues à me donner la becquée, de fruits.

Je te nourris également, tout en te gobant les seins.

Soudain tu bouges de plus en plus intensément, jusqu'à ton explosion.

J'aime tes gémissements, ma bohème.

Tu te remets quelques secondes, sort de mon sexe.

Tu te mets à embrasser mon torse, puis, me lécher le nombril, pour finir sur mon sexe.

Ta bouche englobe mon sexe, et tes allers-retours de plus en plus forts, me poussent vers mes limites.

Je ne dois pas parler, mais je ne veux pas partir dans ta bouche.

De mes mains, j'essaie de te repousser pour que tu ne prennes pas ma semence dans ta bouche.

Rien n'y fait.

Tu insistes.

Je ne peux me retenir longtemps, et finis par partir dans ta bouche.

Je sens que tu avales tout, et que tu nettoies mon sexe.

Quel bonheur.

Je suis aux anges.

L'entendre

Je me lève au petit matin, et quitte le nid ou ma bohème m'a donnée la becquée.

Une becquée tout à fait originale.

A peine rentré, une douche, mettre mes affaires à laver, quelques courses, et nouvelle connexion.

Ma bohème n'est pas là, mais ne tarde pas à se connecter :

Bonjour ma vie de bohème.

Bonjour mon chevalier gourmand.

J'ai passé une soirée unique, fabuleuse.

Moi aussi.

Tu m'ensorcèles à chaque rencontre.

Mais c'est le but.

Tu vas me rendre accroc à ton corps.

Juste mon corps ?

Non, tes idées, notre intimité, ce que nous partageons.

Merci.

Mais, tu sais que je t'aime.

Ça se dit si facilement.

Non, tu es mon équilibre et je suis à ta merci.

À ce point?

Oui.

Je te rassure, je ne peux plus me passer de ton contact.

Tu crois que de se voir et de s'entendre changera tout?

Je ne le souhaite pas.

Moi non plus. Mais qui te dit que ce n'est pas de ne pas se voir et s'entendre qui nous fait nous aimer.

Comment ça?

D'avoir cette liberté intime, que tu ne peux avoir quand tu connais la personne.

C'est possible, je ne me suis pas posée la question dans ce sens.

Je viens de me la me la poser, et la partage avec toi.

On peut se rencontrer, dans l'obscurité, et ne faire que se parler.

S'habituer à nos voix.

Oui.

Excellente idée.

Tu serais partant ce soir ?

Oui.

Où.

Je te reçois.

Je viens.

Discuter de vive voix.

Pas de sexe.

Oui. Même si je dois dire que ton corps est somptueux.

Et le tien appétissant.

Je t'attends ce soir.

Je serais là.

Nous nous déconnectons.

Faire tous les préparatifs.

Du champagne au frais.

Bien positionner les fauteuils du salon, et savoir les repérer les yeux fermés.

Et puis l'attendre.

L'attendre et l'imaginer.

Je l'ai touchée, apprise, mais je ne connais pas son visage. Je ne sais pourquoi, mais j'imagine le visage de Marine sur ce corps adoré.

Ne penses pas à Marine.

Tout est prêt.

L'heure approche.

Une sonnerie. Elle est devant ma porte.

Je me tends un peu.

Éteindre les lumières.

Lui ouvrir.

Refermer la porte.

Nous sommes dans l'obscurité la plus totale.

Je la serre contre moi et l'embrasse.

Puis, je la prends par la main, et l'amène jusqu'à son fauteuil.

Je m'assois sur le mien.

Quelques secondes de silence.

Je ne sais comment débuter cette découverte.

Puis, je me lance. Après tout, si tout doit se terminer, autant que cela se fasse vite :

Bienvenue ma bohème.

Bonsoir mon chevalier.

Elle a une voix douce et sensuelle, mais ce timbre me dit étrangement quelque chose.

J'aime ta voix.

Tu as une voix d'homme, telle que je les affectionne.

J'ai l'impression de connaître cette voix.

Je nous sers une coupe de champagne, en aveugle, et lui tend une coupe.

Avance un peu ta main, je te tends une coupe de champagne.

Elle attrape la coupe, tout en me frôlant la main.

Là, je dis l'éternelle phrase en pareille circonstances:

Santé.

Santé Fred.

Comment sait-elle mon prénom?

Je panique quelques instants, puis essaie de réfléchir.

Cette voix, connue, ces sensations de connivence, cela ne se peut pas.

Marine?

Quelques instants de silence de la part de ma bohème, histoire de m'angoisser.

Si je me suis trompé, il va falloir que je m'explique sur Marine. Je tombe dans tous les pièges.

Mais, soudainement.

Oui, c'est moi.

Je reste quelques instants stupéfait, avant d'oser parler. Puis j'ai osé :

Tu le savais depuis longtemps?

Je m'en doutais, je le souhaitais aussi.

Mais comment c'est possible?

Là, je n'en sais rien... le destin peut-être.

Mais...

Chut. Tu veux toujours m'embrasser?

Plus que tout au monde.

Alors viens.

Je me suis levé, à tâtons, et après quelques hésitations, et l'aide des mains de Marine, j'ai trouvé ses lèvres.

C'était bien les lèvres de ma bohème.

Nous nous sommes embrassés timidement.

Puis le désir prenant le dessus, nous nous sommes embrassé de plus en plus fougueusement.

Après quelques minutes, à nous toucher, à nous caresser, et à nous reconnaître, j'osais poser une question à Marine:

Veux-tu que j'allume la lumière?

Je préfèrerai attendre.

Pourquoi?

J'ai envie de profiter une dernière fois de cette sensation de doute.

Tu as raison, c'est excitant.

Oui, et nous aurons tout le temps de nous voir après.

Mais ça ne te fais pas peur.

Chut... Fais moi l'amour, et taisons nous.

Avec plaisir.

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