Elément perturbateur - Episode 1

nat28

Série dont vous n'êtes pas le héros mais dont la suite dépend de vous !

            Un rai de lumière qui filtrait entre les deux volets de la petite fenêtre de sa chambre à coucher réveilla Gauthier en douceur, ce dimanche là. Il s'étira longuement et profita quelques instants de la chaleur de son lit avant de se lever et de se lancer dans la recherche de ses chaussons. Chaque matin, invariablement, sa pantoufle droite jouait à cache-cache alors que la gauche l'attendait bien sagement, là où il l'avait laissé la veille. Le jeune homme se demandait si des forces magiques n'œuvraient pas toutes les nuits pour dissimuler une charentaise à sa vue. Car, malgré son jeune âge, Gauthier était adepte de ses savates fourrées, dernier vestige de son enfance à Angoulême. Il avait quitté le Sud-ouest l'année dernière, pour "monter" à Paris, emportant dans ses cartons la paire de chaussons offerte par sa grand-mère. "C'est des vraies, des artisanales, hein, pas de la saloperie industrielle !" avait précisé son aïeule dans le langage fleuri dont elle avait le secret. C'est elle qui lui avait appris la plus grande partie des gros mots qui faisaient bondir sa mère quand l'un d'eux échappait au garçonnet. Ce souvenir le faisait toujours sourire. Et bien qu'une d'entre elles soit trouée, Gauthier refusait de jeter ses charentaises.

           

            Il traîna des pieds jusqu'à la cuisine pour se verser une tasse de café et la mettre à réchauffer au micro-onde. Un crime, pour son père, qui, chaque matin, prenait le temps de moudre ses grains de café avant de les passer au percolateur. L'odeur du café chaud avait titillé les narines de Gauthier pendant une quinzaine d'années, jusqu'à ce qu'il quitte la maison familiale pour un internat où le petit déjeuner était servi dans un self moderne et impersonnel, et plus dans une petite cuisine chaleureuse. "Au moins, à la cantine, tout était servi sur un plateau" se dit le jeune homme en cherchant désespérément une biscotte dans un placard de sa minuscule kitchenette. Il savait que sa quête était vaine et qu'il ne trouverait qu'un morceau d'emballage en plastique vide dans un coin de l'étagère. Il oubliait toujours de racheter des biscottes lorsqu'il faisait ses courses, tous les lundis soirs, à la supérette de son quartier. Et il se disait toujours qu'il devrait faire une liste, pour ne pas se retrouver avec des placards à moitié vides et un réfrigérateur beaucoup trop plein. Mais malgré les post-it qui prenaient la poussière près de l'évier, il ne prenait jamais le temps d'inventorier ses besoins alimentaires avant d'aller se ravitailler.

 

            La sonnerie du micro-onde sortit Gauthier de sa rêverie matinale. Il récupéra sa tasse de café fumante et s'installa sur un coin de sa petite table de cuisine avec une madeleine un peu rassise, le seul "aliment" qu'il avait pu dénicher pour son petit-déjeuner. Bien que le temps fut ensoleillé, le jeune homme n'avait pas eu le courage de quitter son pyjama et d'aller à la boulangerie pour acheter une baguette. Et puis il n'avait pas grand chose à tartiner dessus de toutes façons. Le fait qu'il n'ait pas trouvé de biscotte n'était pas si grave, après tout, il aurait dû la manger nature, ce qui n'était pas la meilleure façon de commencer la journée. Journée déjà bien entamée : la pendule de la cuisine indiquait dix heures et demi.

 

            Cependant, Gauthier ne se pressait pas. Il avait décidé de consacrer son dimanche au visionnage de la nouvelle saison d'une série qu'il appréciait. Ses examens l'avaient occupé sans répits pendant un mois, il avait bien le droit de s'accorder une pause.

 

            Et puis il y avait eu l'affaire... Dans son immeuble, un sexagénaire avait été retrouvé mort, vidé de son sang après avoir vraisemblablement reçu un coup de couteau en pleine poitrine. Son appartement était verrouillé et la police n'avait relevé aucune trace d'effraction. L'hypothèse du suicide, bien qu'un peu tirée par les cheveux, avait été avancé, mais il y avait un hic : l'arme utilisée était introuvable... Se poignarder soi-même était déjà assez inhabituel, mais nettoyer et ranger le couteau avant de mourir... C'était carrément improbable. Ce petit "détail" avait mis la puce à l'oreille des enquêteurs et de Gauthier, qui, en sa qualité de voisin du macchabée, avait été interrogé au commissariat de son quartier. Le jeune homme avait mené sa petite enquête et, avec l'aide précieuse de la concierge de l'immeuble, il était parvenu à mettre la main sur le coupable. Et à rassembler un joli petit paquet d'éléments pour prouver sa culpabilité. La police, bien que gênée par l'efficacité d'un étudiant de 20 ans, l'avait remercié pour son aide, et il était probable qu'il ait à témoigner lors du procès. C'était déjà arrivé.

 

            Car Gauthier n'en était pas à sa première affaire judiciaire. Depuis son adolescence, il lui semblait que les crimes se multipliaient autour de lui, quoi qu'il fasse et où qu'il soit. Sa carrière de détective amateur avait débuté en classe de Seconde, suite au vol d'une trousse. Rien de bien spectaculaire, mais le mystère avait attisé la curiosité du jeune garçon, qui avait perdu le sommeil jusqu'à ce qu'il ait trouvé le coupable. Le lendemain du larcin, fort heureusement. Quelques semaines plus tard, le vol des jardinières de sa voisine avait remis l'inspecteur Gauthier en piste... En pendant plusieurs mois, des événements de cet acabit avait eu lieu, donnant à l'adolescent le goût de l'enquête minutieuse. Il prenait ça comme un jeu, une façon de s'occuper comme une autre, et un peu plus intéressante que les réseaux sociaux ou les jeux vidéos. Ses parents s'amusaient de cette passion pour les investigations, et ils lui avaient offert un imperméable marron clair pour son anniversaire. Gauthier trouvait l'exercice divertissant, jusqu'à ce que les choses sérieuses commencent. L'empoisonnement d'un chat, pour commencer, une agression, et enfin... un meurtre. Le lendemain des résultats du baccalauréat. Pour la première fois de sa vie, et de manière totalement fortuite, le jeune homme s'était retrouvé face à un cadavre, un vrai, pas un figurant de cinéma ou une victime dans un roman policier. Car c'est Gauthier qui avait trouvé le corps, mal dissimulé dans le container à poubelle du supermarché où sa famille allait faire les courses. Pour une raison dont il ne se souvenait plus vraiment, il s'était retrouvé à l'arrière du bâtiment métallique qui abritait le magasin. Au départ, il n'avait pas réalisé que, ce qui dépassait des poubelles, c'était une vieille basket, que dans cette basket, il y avait un pied, et que ce pied appartenait à une victime de meurtre. Avec l'arrogance de ses dix-huit ans, Gauthier s'était lancé dans une enquête parallèle à celle de la police, et ses recherches l'avaient mis en danger, le jour où il s'était retrouvé, seul, face au tueur. Sa jeunesse et ses réflexes lui avait permis d'échapper aux griffes du quinquagénaire qui ne s'attendait sans doute pas à devoir courser un jeunot pour le faire taire.

 

            Les parents de Gauthier lui avaient passé un savon mémorable et l'avaient privé de sortie pendant tout l'été. Tandis que ses amis, fraîchement diplômés eux aussi, profitaient du congé estival avant de rentrer à l'université, le jeune homme, captif des dix mètres carrés de sa chambre, avait dévoré les Agatha Christie, les Arthur Conan Doyle et les Fred Vargas de la bibliothèque familiale. Il avait nourri son imaginaire d'intrigues policières et sa punition, loin de le décourager, avait confirmé son goût pour les enquêtes et le mystère.

 

            Des cadavres, Gauthier en avaient vu d'autres durant les deux années qui venait de s'écouler, et il se demandait même s'il n'attirait pas les assassins, au vu de la petite hécatombe dont il avait été le témoin. Heureusement, aucun de ses proches n'avait joué le rôle de la victime jusqu'à maintenant.

 

            Voilà à quoi pensait Gauthier en buvant son café à petites gorgées pour faire passer la Madeleine un peu trop sèche dans son gosier. "Tu ferais mieux de te trouver une copine, plutôt que d'être obsédé par des crimes !" lui répétait Théo, son meilleur ami. Mais le jeune homme était définitivement plus doué pour résoudre des énigmes que pour séduire des filles. Et puis raconter des crimes sordides pour aborder une femme n'était sans doute pas la stratégie la plus gagnante qui soit.

 

            Gauthier ne fit attention au faible bruit de sirène qui montait de la rue que lorsque celui-ci s'amplifia et que l'écho de portières claquées monta jusqu'à son studio. "Oh non, pas une nouvelle affaire, pas si tôt !" songea-t-il en se levant pour déposer sa tasse dans l'évier, où s'empilait de la vaisselle sale depuis plusieurs jours. Le jeune homme était fatigué et il ne rêvait que d'une chose : s'affaler dans son canapé. "C'est peut-être les pompiers" se dit-il en sachant pertinemment qu'il se mentait à lui-même. Il décida d'ignorer, pour le moment tout du moins, la présence des forces de police dans son voisinage, et il était sur le point d'allumer son ordinateur pour trouver sa série en streaming quand sa porte d'entrée s'ouvrit avec fracas. Une conséquence courante lorsqu'une porte se fait défoncer par un coup d'épaule décidé.

 

            Gauthier resta bouche bée au milieu de la pièce, en caleçon et vieux T-shirt, face à l'intrus, tandis que des bruits de course et des cris montaient de la cage d'escalier. "Vous devez absolument m'aider !" lança     

 

1 : la femme

2 : l'homme

 

essoufflé(e) qui se trouvait en face de lui.   

  • Une accroche très efficace. Ca se lit très facilement, on est pris dans le récit, même si j'ai trouvé juste que le moment de rentrer dans le vif du sujet venait un peu tard dans le chapitre. J'ai hâte de connaître la suite en tout cas. Mon vote à moi se serait porter vers l'homme.

    · Il y a presque 6 ans ·
    060606140011 35

    jenalo

    • Merci et bienvenue dans l'aventure ! J'espère que tu aimes le café, mon héros en boit beaucoup. Et souvent. Ca meuble bien, une pause café...

      · Il y a presque 6 ans ·
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      nat28

  • Très divertissant. Trop tard pour voter, mais je suis définitivement accrochée ;)

    · Il y a environ 6 ans ·
    Max

    Max

  • Ahah trop bien ! J'ai franchement hâte d'avoir la suite !! :D Je vais rejoindre la petite touche de féminité ;) Je vote 1 !

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    k3m-4nyx

  • Je vote 1 pour la touche de féminité^^

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    kalypso

  • Je vote : 2.
    Après enquête, j'aurais aimé voter 1, mais le coup d'épaule c'est plutôt masculin.

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Louve blanche

    Louve

  • Bonjour !
    Vous pouvez voter "1" ou "2" par SMS... dans les commentaires, ça sera plus pratique, jusqu'à vendredi.
    Bonne lecture !

    · Il y a plus de 6 ans ·
    Default user

    nat28

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