En toute insouciance

20 ans que j'habite dans le 11ème arrondissement, non loin de la rue Fontaine au Roi. En toute insouciance.

Mes enfants y ont grandi, se sont fait des amis au fil des années, une amitié qui remonte pour certains à la maternelle. Quelques parents d'élèves sont devenus, pour ma part, de véritables amis.

Le terre-plein du boulevard Richard Lenoir, non loin du Bataclan, a été le théâtre de leurs premiers exploits sportifs : vélo, roller, monocycle... Encore aujourd'hui, mon fils y retrouve ses potes pour disputer des matchs de foot. En toute insouciance.

Souvent quand je déambule dans d'autres arrondissements de Paris, je me dis que rien ne vaut mon quartier. Un quartier si vivant par ses nombreux commerçants, restaurants, terrasses de café, salles de spectacles. Des salles que connaissent bien mes enfants pour y avoir travaillé.

Un quartier qui vit encore plus intensément quand le week-end arrive. La rue Saint-Maur est à elle seule une vraie fourmilière. Jeunes et moins jeunes se retrouvent, partagent un verre, un repas, une cigarette. En toute insouciance.

Le quartier est si vivant qu'il m'arrive parfois de rouspéter quand le bruit d'une fête – sur la place de la République, ou chez des voisins - s'éternise un peu trop. Les immeubles sont une vraie caisse de résonance.

Hier, vendredi 13 novembre 2015, la caisse de résonance n'a pas vibré au son des éclats de rires, des chansons, des moments d'insouciance.

A la place, elle a vibré du chant funèbre des canons, des sirènes, des moments de souffrance. Une onde de choc encore plus grande que ce funeste 7 janvier.

Plus grande car toutes ces victimes, ces êtres trop tôt disparus, ce sont une part de toi, moi, nous, insouciants humains, tombés sous les balles de fous qui n'ont rien d'êtres humains.

Peu importe que ces fous soient français ou étrangers. La monstruosité est leur seule nationalité.