Épouvante

vionline

Ou le jour où j'ai pété un câble

C'était l'impression de subir les événements, c'était la sensation de ne plus avoir aucune prise sur rien, que tout s'écroulait de l'intérieur. L'effondrement de mon identité. J'étais la spectatrice impuissante de ma propre destruction. Tout autour de moi paraissait hostile, aucune parole n'était agréable et même de la part de mes proches, aucun mot ne m'inspirait du réconfort. J'étais sur la brèche en permanence, fatiguée et surexcitée en même temps. Je m'endormais extrêmement bien, mais pour me réveiller trois fois par nuit, la boule au ventre, persuadée d'avoir entendu un bruit étrange. Tout ce qui m'entourait, des gens aux objets, semblait m'indiquer des choses à faire ou m'obliger à penser au négatif. Le voisin, bien sûr, passait dans les escaliers de l'immeuble pour perturber mon sommeil, le manche du balai faisait exprès de tomber sur mes pieds pour me punir de ma procrastination à faire le ménage. Une paranoïa grandissante hantait mes heures, enflait chaque seconde. C'est bien cela qui me prit, du jour où je dus assumer seule une nouvelle vie.

Ma solitude, que je pensais être une alliée, s'est révélée à moi comme une ennemie, prête à tout pour me prouver que j'avais fait de mauvais choix en quittant un mariage qui avait duré quinze ans. Aujourd'hui, avec du recul, je suis prête à admettre que j'ai fondu un fusible et que si j'ai soudainement perdu pied, c'est parce que je n'ai pas su gérer ma rupture. Il fallait simplement du temps et tout était allé si vite…

C'était une histoire d'épouvante permanente. Trop grossière pour être prise au sérieux, mais lorsque la peur monte, que les poussées d'adrénaline deviennent le carburant principal de notre corps-machine qui se laisse partir en cacahuète, alors on se met à croire à des phénomènes insensés. Pourtant on est juste une personne normale. On est humain et parfois l'humanité est si effrayante de banalité qu'on aimerait se croire venu d'une autre galaxie. Quand on se sent mal, il est souvent impossible de trouver des explications à tout. Le cerveau ne préfère pas se fatiguer, alors il fait le raccourci.


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