Et elle tomba.

maelis

2014. La première dépression.

        Elle tomba sans réussir à trouver quoi que ce soit à quoi s'accrocher. La lumière s'atténua. Elle tomba plus loin que son esprit aurait pu imaginer. Tout au fond du gouffre. Là où on ne distingue plus rien. Là où l'obscurité est votre seule compagnie. Elle avait peur. Elle tournait la tête dans tous les sens que sa colonne vertébrale le lui permettait, cherchant quelconque lumière sur laquelle son regard aurait pu s'accrocher. Autre chose que cette obscurité. Rien. Elle ne voyait rien. Son cœur battant à tout rompre, elle cligna des yeux jusqu'à s'en faire mal. Comprenant que rien ne pouvait être distingué, elle se résolu à fermer les yeux, ne voulant plus se fatiguer davantage. Elle tenta de se relever mais se rendit compte que sa chute avait été plus brutale qu'elle ne l'avait cru. Ses jambes refusaient obstinément de la porter. Elle ne pouvait que rester assise, effrayée, dans cette abysse, tremblante, désemparée.
       Elle se senti seule, impuissante face au drame qui l'accablait, faible contre ses émotions si douloureuses et terriblement pitoyable. Se rendant compte qu'elle était bloquée, qu'elle ne pouvait rien faire, elle se sentit totalement incapable. Son nez commença à lui piquer, puis ses yeux. Elle ne comprenait pas cette douleur et elle ne tenta même pas d'y résister. Son visage se tordit en un rictus douloureux et ses yeux s'inondèrent lentement. Les yeux plissés, les lèvres retroussées, le menton en avant, tous les muscles de son visage étaient contractés, le déformant avec une douleur qu'elle finit par ne plus remarquer, tant la tempête dans son crâne faisait rage. Sans qu'elle ne s'en rende compte, l'eau ruissela sur ses joues, le long de son nez, jusqu'au menton ou s'arrêtant près de sa bouche, la dérangeant. Paralysée par la détresse, elle n'avait même pas le courage de lever son bras pour essuyer son visage baigné de larmes. Fatiguée par toutes ces émotions et ces douleurs, elle se laissa tomber en arrière, sa tête heurtant le sol froid et irrégulier.
        Évidemment, elle savait qu'en ce lieu, il lui serait impossible de réellement dormir. Alors, elle ouvra brièvement les yeux et cru apercevoir un point lumineux. Elle le fixa donc, les yeux grands ouverts, s'assurant qu'elle ne rêvait pas en bougeant la tête plusieurs fois. Lorsqu'elle fut sûre que ce n'était pas son imagination, elle arrêta de forcer sur ses yeux et se détendit légèrement. C'était bleu. Le ciel. Elle pouvait voir le ciel bleu, comme depuis un autre univers. Elle ne pouvait pas profiter de la lumière, ni de la chaleur du soleil présent dans le ciel. Elle ne pouvait que l'apercevoir, l'imaginer difficilement, allongée sur ce sol de pierre froid et plein de gravillons qui lui écorchaient les bras. Elle pleura à nouveau. Encore et encore, jusqu'à ce qu'elle devienne aussi froide et sèche que la pierre.
       Elle prit alors la décision de faire quelque chose. Elle en avait marre, et ce sentiment avait fait naître en elle l'espoir de sortir de cette abysse. Les larmes ne voulant plus couler, elle sentait qu'elle ne supporterait pas ce lieu plus longtemps. Ignorant la douleur dans ses jambes, sa tête, ses bras, elle se leva. Elle avança à l'aveuglette, les bras devant elle, tremblante, cherchant une paroi ou quoi que ce soit qui la mènerait à la sortie. Son cœur se mit à battre fort, ayant peur de ce qui l'attendait. Mais, rapidement, elle trouva une paroi, aussi rocailleuse que le sol. Alors, elle l'agrippa sans hésiter et se souleva. Elle chercha, tâtonna, et commença à escalader. Après quelques minutes de lutte acharnée, accompagnée de trois chutes, elle se sentie habituée à ne rien voir, à la douleur aiguë dans ses deux jambes fatiguées, à ses égratignures qui s'accumulaient et à la froideur de la pierre. Puis, lentement, elle parvînt à voir ses propres mains, glacées et boursouflées, s'accrocher fermement à la pierre. Elle leva la tête, vit la lumière de plus en plus présente, et une silhouette apparut. Elle entendit une voix lointaine, qui hurlait de toutes ses forces. Au début, elle ne l'entendait que trop peu, alors elle tenta d'aller plus vite, tout en faisant attention à ne pas faire de faux mouvement qui la ferait retomber. Alors, elle commença à distinguer ce que cette voix hurlait.

« Je t'attends ! Je t'attends ! Je t'attends ! »

  • Bonjour Maelis, ton texte me touche.
    J'ai vécu dans mon deuil cette chute au fond d'un gouffre sans lumière et sans espoir. Meurtrie, prostrée, tu as su toi aussi voir le ciel et attraper la main qu'on te tendait.
    L'adolescence est parfois cruelle.

    · Il y a plus de 6 ans ·
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    tantdebelleshistoires

    • Bonsoir, merci beaucoup de ce commentaire, ça me fait plaisir de voir que j'ai pu toucher quelqu'un avec mes mots.
      Parfois cruelle, mais souvent instructrice ! On apprend de tout, mais surtout du pire.

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      maelis

    • C'est ça et malheureusement il n'y a pas d'âge!
      Bonne soirée Maelis
      Véronique

      · Il y a plus de 6 ans ·
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      tantdebelleshistoires

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