Evolution (chap 15)
Daniel Macaud
Les cinq hommes et leur matériel avaient été largués dans la forêt à la nuit tombante. Ils s’étaient immédiatement mis en route en direction de la montagne. Les duads silencieux se frayaient un chemin entre les arbres. La nuit leur assurait une couverture parfaite. ils furent rapidement au bord de la rivière. Cachés à la lisière de la forêt, couverts par la nuit et la fureur des rapides, ils épiaient maintenant les hauteurs, à la recherche des refuges mutants. Stago, jumelles en mains, s’impatientait.
- Allez, montrez-vous ! Une bande de singe comme vous, ça laisse des traces ! Rien. pas âme qui vive dans ces rochers, ce n’était pas normal. Ils n’avaient pas pu se volatiliser comme ça. Il fallait en savoir plus.
- Vous quatre, allez faire une reconnaissance. Deux dans la montagne, deux dans les environs.
- Oui monsieur.
Les quatres hommes disparurent dans la nuit. Stago resta songeur, à scruter les environs.
- Alors, Où êtes-vous ? Pensa-t-il.
***
- Crom ! Ne fait pas l’idiot, on la retrouvera à la levée du jour !
- C’est ma meilleure laitière, je dois la retrouver ! C’est de ma faute si elle s’est enfuie de l’enclos.
- Il faut rentrer, Braid va nous tomber dessus si on désobéit aux consignes !
- J’en ai pas pour longtemps, rentre toi ! Je la retrouve, et j’arrive.
- T’es fou ! Tout seul ici ! Avec les humains dans les parages ? Et ils te trouvent ?
- Ils sont planqués dans les montagnes.
- Et si c’est des terriens qui te trouvent ? Tu sais ce qu’a dit Braid ?
- Je sais. Ce sera pas long. S’il te plait...
- … Bon sang... Braid va nous massacrer !
- Merci.
***
L’humain pesta. Foutue nuit noire ! Foutue planète ! Il était bel et bien perdu. Comment retrouver les autres maintenant ? Il ne savait même pas dans quelle direction aller pour retrouver le refuge. Super idée d’aller chercher du bois ! Il ne manquerait plus qu’il tombe sur...
- Putain ! Des mutants !
- Oh non ! Je te l’avais dit Crom !
- Oh Doucement les mutants... On se calme... Je veux pas de bagarre...
- Nous non plus ! On cherche notre...
- Plus un geste.
Les deux mutants et l’humain se pétrifièrent sur place. Ils étaient tenus en joue par deux hommes armés.
- Vous êtes humains ? Se risqua le dénommé Crom.
- Ils sont pas à nous, glissa l’humain. Ils doivent être terriens.
- Oh non ! Pitié...
- Silence les mutants ! Suivez-nous !
- Je suis pas un mutant moi !
- Ta gueule ! Avance.
Encadrés par les terriens, les trois prisonniers se mirent en marche. Ils étaient tous les trois pétrifiés de peur. Ils arrivèrent assez vite à la rivière. l’humain reconnut les environs. La montagne était en face de lui. Les terriens en avaient après eux !
- Qu’est-ce qu’on vous a fait ! Hurla l’homme. Vous avez tout détruit ! Il faut en plus que vous pourchassiez les survivants ! Pourquoi ?
Pour toute réponse, il n’eut que la crosse d’une arme dans la mâchoire. Il se retrouva au sol, sonné.
- Ta gueule le mutant. C’est nous qui posons les questions ici ! Où est-elle ?
- Où est qui ?
- La mutante à l’armure ?
- Je sais pas.
- Vraiment ?
Le terrien qui posait les questions sorti tranquillement son arme, ajusta le dénommé Crom. Son compagnon supplia.
- S’il vous plait, on sait rien nous ! On veut juste repartir...
la tête de Crom explosa dans le silence de la nuit, sous les regards choqués de l’humain et du mutant, qui ne purent faire le moindre mouvement. La déflagration, brêve, efficace, répandit le sang en une flaque noire sur les rochers, coulant jusqu’à la rivière, et sur les deux prisonniers, incapables de réagir, tant la violence qui se déchainait sous leurs yeux les terrifiait.
- Bien. maintenant, vous allez dire à votre chef que je veux cette armure. Et que je n’hésiterai pas à vous liquider jusqu’au dernier si nécessaire. Compris ? Vous pouvez y aller.
Les terriens baissèrent leurs armes. Les deux prisonniers ne bougèrent pas tout de suite.
-Cassez-vous ! Hurla Stago.
Ils fuirent, chacun de leur côâneté, immédiatement. Stago eut un petit sourire.
- Vous deux, suivez-les. Je veux savoir où se terrent ces monstres.- Oui monsieur.
***
- Merks ! Merks !
L’homme, couvert de sang, entra en coup de vent dans la grotte. Il semblait terrifié. Merks arriva aussitot.
- Qu’est-ce qui se passe ?
- Ils sont... Les terriens...
- C’est quoi tout ce sang ? … C’est qui tout ce sang ?
- Un mutant. il l’a tué devant moi. Il lui a explosé le crâne ! Ce sont des dingues ! Ils sont au pied de la montagne.
- Stago ! Espèce d’ordure ! On t’a suivi ?
- Je sais pas...
- Merde !
La situation devenait grave. Merks le savait, ils allaient les traquer. Ils ne seraient à l’abri nulle part. La colère le submergea. Il sortit.
- Stago ! Où que tu sois, hurla-t-il, je vais te trouer la peau ! T’entends salopard ?
Rien d’autre que le silence. Merks le savait, son coup de colère était inutile. inutile, dangereux et stupide. Mais ca faisait du bien. Il rentra.
- Il voulait quoi ? Pourquoi il t’a laissé partir ?
- Il m’a dit qu’il voulait “l’armure”.
- L’armure ? Androucha. Merde, il faut que je la prévienne.
- C’est une histoire de mutants, pourquoi ils nous tirent dessus alors ?
- Parce que ces cons de terriens sont persuadés qu’on est des mutants, je vous l’ai dit hier !
- Mais on est pas des mutants.
- Je sais. Mais on est quand même des proies. Ecoutez-moi tous !
Il rassembla le groupe de survivants en entier. Ils étaient quarante-six, exactement. Vingt hommes valides dix femmes valides, huit enfants, et huit blessés, deux hommes et six femmes. Au mieux, il avait trente personnes pour l’aider à la défense du réseau de grotte, et une seule arme. Les quelques pièges placés aux entrées faisaient pâle figure face aux armes des envahisseurs.
- Ils sont combien ? Demanda-t-il à l’homme.
- J’en ai vu que cinq.
- Bon. Ecoutez tous, fit-il à l’assemblée inquiète qui le regardait. Les terriens sont de retour. Ils sont au pied de la montagne. Ces tarés pensent que nous sommes des mutants, et n’hésiteront pas à faire feu si on sort. Donc, interdiction de sortir de là, on va finir de pieger les corridors, et on s’enfonce dans les galeries. Au centre du labyrinthe, il y a une grotte a ciel ouvert, qui devait être le réservoir d’un ancien volcan. Il est bien protégé...
- Sauf en haut !
- Je sais ! Mais avant qu’il nous trouve, on aura peut-etre le temps de le cacher du ciel, et surtout, on aura besoin de lumière quand même. Ce reservoir est abreuvé par une source souterraine. C’est notre seule source d’eau pour le moment. On se regroupe donc autour d’elle. Compris tout le monde ?
Les acquiescements furent silencieux. Il reprit.
- Je vais devoir vous laisser quelques heures. Je confie cette arme à Vlad, qui sera chargé de votre protection pendant mon absence.
- Mais pourquoi tu pars ? On a besoin de toi ici ! Tu fuis ?
- Non, je vais chercher de l’aide.
- Mais où ? Et en demander à qui ?
- Toutes les villes ont été rasées !
- Il n’y a plus de survivants, on est passé par trois villes avant d'arriver ici.
- Il n’y a plus personne !
- Calmez-vous, fit Merks à l’assemblée, d’une voix calme. Il reste des survivants, je dois aller les trouver, et leur demander de l’aide.
- Hein ?
- Qui ?
- Il reste des mutants, répondit Merks.
- Eux ? Mais ils sont incapables de nous aider !
- Ils ont été massacrés aussi !
- On en a vu aucun depuis l’attaque des terriens.
- Moi j’en ai vu. Et je sais qu’il y a de nombreux survivants parmi eux. Et pour une fois soyons honnêtes: sans aide, nous allons tous y rester. Mutants ou pas, cette fois, on a besoin de tout le monde !
- Mais ce sont des incapables !
- Ils vont en profiter pour nous voler !
- Ce sont des monstres !
- Ce sont des pourritures ! Pareils que les terriens !
- Des voleurs !
- Des assassins !
- Silence ! Vous tous, vous avez déjà perdu beaucoup. Eux aussi. Nous devons faire une trêve. Nous avons un ennemi commun, les terriens. Je sais ce que je fais. Le robot qui nous a sauvé la vie hier, c’était pas un robot, c’était une mutante en armure.
- C’est ça l’armure qu’ils veulent ?
- Oui.
- Alors donne-leur !
- J’y compte bien, mais je dois d’abord la retrouver. Faites-moi confiance.
Sans un mot de plus, merks attrappa son sac à dos, et quitta les survivants. Il rejoignit la sortit arrière du réseau et retrouva dehors. La nuit allait être courte.
***
Le mutant était revenu en sang, et en larmes dans les souterrains de la communauté. Il avait été très vite pris en charge et rassuré. Il lui avait fallu du temps pour se calmer. Il finit par réussir à tout raconter. Sa capture, la mort de Crom, et l’exigence de l’humain. Braid fut immédiatement prévenu. Sa fureur explosa dans tous les couloirs. Il fit appeler Androucha
- Tu te rends compte, hurla-t-il, des conséquences de tes actes irréfléchis ? Un de mes gars est mort ce soir ! Je devrais te chasser, toi et ta maudite armure !
- Braid je...
- Tu rien du tout ! Je t’avais prévenu ! Tu as refusé de m’écouter, et nous avons un mort maintenant !
- Ce n’est pas moi qui l’ai tué ! Cria Androucha.
- Si tu n’étais pas intervenu, les humains se seraient massacrés mutuellement, et rien de tout ça ne serait arrivé !
- Je ne pouvais pas faire ça ! Humains ou non, c’était des civils en danger ! Et ton sens de l’honneur Braid ? Et après ? Nous sommes toujours en sécurité non ? Ils ne savent pas où sont les entrées des souterrains.
- Et heureusement. J’espère seulement que mon gars n’a pas été suivi, auquel cas nous sommes tous en danger !
- Braid...
- Ca suffit !
- Bon... Je vais aller voir ces terriens alors.
- Ils veulent ton armure.
- Mon armure ? Je vais leur donner alors ! Et vous serez tranquille.
- Ne sois pas stupide la dauf’ ! Tu es la seule à pouvoir l’utiliser. Et si tu leur donnes, qu’en feront -ils ? Hein ?
- Alors quoi ?
- Tu dois les éliminer ! On est en guerre Androucha ! La guerre c’est...
- Je sais ce que c’est ! Cria-t-elle. On me l’a déjà dit ! Et je ne pensais pas entendre la même chose ici !
- Quel que soit le camp, la Dauf’, fit Braid en se calmant, la mort est la même. Les morts laissent des souvenirs douloureux aux survivants. On ne peut pas se permettre de faire n’importe quoi ! Ce sont nos ennemis, il faut les combattre, et toi, tu aurait dû les tuer quand tu en avais l’occasion.
Pour Androucha, la vérité était dure à encaisser. Etait-elle vraiment naïve ? Devait-elle vraiment tuer ? N’y avait-il que cette solution ? Elle ne pouvait l’admettre. Si même ici, auprès des siens, elle n’était pas comprise, si même les siens ne souhaitaient que le combat, alors elle n’avait plus sa place ici.
- Braid... Je comprends que tu sois préoccupé par la protection des tiens. Je ne vais pas rester... Et...
- Dis pas de bétises la dauf” ! Tu es ici chez toi, autant que n’importe quel autre mutant. d’après mes sources, on est sur le point de te fournir un vaisseau pour la base Titan. On est en train de récupérer des pièces où on peut pour les coller sur une carcasse. Ca prend du temps.
- Merci Braid. Je dois y aller.
- Où ?
- Les empêcher de nous trouver. Je te dois bien ça. Je vous ai mis en danger. Tu as raison.
- Bien. Prends soin de toi.
Elle allait sortir quand une remarque de Braid quelques instants plus tôt l’interpella.
- Comment sais-tu que je suis la seule à pouvoir contrôler cette armure, Braid ?
- Euh..., fit la voix caverneuse ennuyée. Disons... Que j’ai fait ma petite enquête.
- Ah ?
- Oui, bon, j’ai essayé de m’en servir quand tu dormais ! Mais elle n’a pas réagi. Autrement dit, ce truc est plus ou moins capable de décider avec qui il marche. Je sais pas si c’est de la biométrie, ou n’importe quel système d’identification biomécanique. Mais le fait est là. Tu es une sorte d’élue. Ce truc ne veut que toi.
- Braid... Tu es un con !
Elle sortit du bureau. Elle n’avait plus rien à faire ici pour le moment. Elle allait s’acquiter de sa promesse et chasser ces terriens. Ensuite, Elle quitterait la communauté en attendant que son vaisseau soit prêt.
De plus en plus mystérieuse, cette armure...
· Il y a presque 14 ans ·pointedenis