Extrait Journal Intime (13)
Ce N'est Pas Moi, Ordi Hacké
Un concentré des 40 pages que j'ai écrit lors de mes 3 mois d'hospitalisation psychiatrique en 2013. Un vrai témoignage de bipolaire/borderline. J'ai juste enlevé les passages qui parlait de mon ex ; en respect de mon partenaire actuel. Le fait que le texte soit long peut vous faire fuir ; mais soit ne partez pas et prenez tout votre temps ; soit lisez en diagonale, soit ne lisez pas ;-)
19 août 2013 – Les secondes non fécondes.
On s'ennuie tout le temps dans une vie. Ou n'est-ce-que mon ressenti ? A l'hôpital, en vacances, chez moi, au travail. Besoin de la fuite des idées et des pensées. Alcool comme envol ? Une autre idée ? Que faire contre ce terrible ennui ? Pourquoi rien ne peut-il le combler ? Pourquoi je compte les secondes, même dans les moments où je suis bien entourée relationnelle ment ?
Il faut 105 ans (de mémoire), pour qu'un être humain puisse compter jusqu'à 1 milliard de secondes (merci les jeux de l'hôpital, là aussi ennuyant...lassant mon énumération de l'ennui ?). Je crois que j'en fais l'expérience. Je compte, même si plus rien ne compte. Si l'on me dit dépressive à vie, comment pourrai-je vous parler de gaieté ? Vous apporter la joie de me lire ? La détente qui vous est insistante ? L'oisiveté que vous voulez hériter ?
Comment vous rendre heureux ? Comment vous satisfaire, vous plaire ? Dans mon besoin, et non dans mon désir, de reconnaissance (il s'agit bien évidemment d'un besoin vital, et non d'un désir narcissique), mon écriture pessimiste ne pourra pas toucher les sens de vos bonheurs.
Les malheureux me comprendront. Mais l'apaisement de quelques mots et sentiments communs sont bien trop furtifs. Encore une histoire de secondes. Une histoire à dormir debout ? Plus tard le "Il était une fois...". Plus tard le bonheur ? Ne pleure pas...
21 août 2013 – Donnez-moi la notice.
" Monsieur, un homme est au fond d'un ravin. Impossible de remonter à mains nues et il ne dispose d'aucun autre moyen. Soudain, avec la tempête, des rochets basculent du sommet qui risquent de le réduire en poussière mais peuvent, s'il y échappe, lui donner l'occasion de se tirer de là, grimpant d'une pierre à l'autre. Il lui faut se protéger de ces rocs pour s'en faire des alliés. Il est blessé à la jambe mais le genou est intact. Il lui pleut des pierres. C'est comme un puzzle, il en arrive toujours une à l'endroit où il lui faut, l'échafaudage se complète. " (M. Lindon – Les Apeurés – P.O.L) " Une définition de l'ESPOIR ?
Et je ne vous livre pas la citation entière que j'ai en tête, soucis d'humilité, ne pas dépendre de tous mes écrivains sauveurs, mais apprendre à écrire grâce à eux. Seulement cette conclusion de citation que l'on ne peut se noyer si l'on fait la planche. C'est la deuxième signification de l'ESPOIR. Il faudrait que je contacte Mathieu Lindon pour lui proposer d'échanger ces maximes avec le Petit Larousse. Je n'aime pas les définitions simples, homogènes, réglées, et qui confèrent toujours à un autre mot, conférant à son tour à un autre. L'effet boule de neige d'un dictionnaire n'est pas assez imaginaire.
Si j'aimais les définitions stables, je serai une stabilisée. Mais tout gamberge, toujours en germe. Je commence la lecture d'un nouveau roman qui débute au nimbe des commencements. Retrouverais-je ces souvenirs pour construire le fil conducteur de ma stabilité ? Où est passé mon commencement ? De ce commencement banal, parmi mille, mais pourtant non consenti. Qui veut découvrir mon histoire hormis moi qui doit la reconstruire ? Vous pouvez arrêter votre lecture ici. Je crains mon éparpillement et une logorrhée de détails peu importants ou décousus. Je suis non sens. Vous y retrouverez-vous ?
Je trouve ce texte brouillon. C'est mon bouillon d'idées non contrôlées. Non contrôlables et combien intolérables que je placebo de les coucher sur un papier pour les expier. C'est peine ratée, mais il faut au minimum un objectif de vie pour ne pas perdre cette vie imposée. C'est un doux secret, entre les amants, de mettre au monde. N'anticipent-ils pas que la naissance de tout un chacun est un cadeau empoisonné de bien plus d'efforts et peines à surmonter que de joies compensatrices ? Voici pourquoi, je ne porterai jamais un enfant.
Malheureusement, moi qui n'aime pas juger les gens, je trouve égoïste de porter un enfant au monde. Il faudra que je vous parle de T. Cela sera plus facile après sa visite. Il vient ce vendredi, je me perds dans les dates. La plupart des jours riment, hormis le sacré Saint dimanche voulant faire son intéressant et l'assouvissement du genre humain.
Mais ces journées rimantes démobilise ma chronologie. Je voudrai remettre l'horlogerie à l'heure et ne plus y voir que des leurres. Il faudra aussi que je vous parle de ma mémoire. En tout cas, c'est ce que je fais déjà. Il ne faudra pas que je perde la mémoire de vous en avoir déjà parlé. J'ai reçu un ami il y a une semaine, il y a une semaine. Nous avons passé quatre heures ensemble, je ne me rappelle que un quart d'heure de sa présence. Ma mémoire ne fait que choir, cela est prometteur pour mon mémoire étudiant. Il ne fallait pas s'amuser avec des mots. Je ne suis encore qu'une jeune femme. J'aime tellement les mots et la justesse, dans notre plus belle langue française. Ils riment forcément avec les maux. Cela n'est pas sans surprise. Mais si je n'ai plus le mémo, sans la notice je suis dans le vice.
Je pense que tu as très bien fait de ne pas canaliser tes pensées, de ne pas les ordonner, mais de les libérer au fur et à mesure qu'elles fusaient en toi. Elles ne mettent, hélas, que plus en relief ta désespérance, et l'insoutenable vitesse à laquelle fonctionnait ton cerveau, non réceptif aux médicaments.
· Il y a plus de 8 ans ·Sy Lou
Superbe ! Enfin. ..la douleur que tu exprimes est poignante Alice, mais ton écriture. ..magnifique !
· Il y a plus de 8 ans ·carouille