Fantasque noble langue française
Jean Claude Blanc
Fantasque, noble langue française
En 2020, faute d'être calés
Faut repartir sur les bons pieds
Bien sagement le conjuguer
En bon français, le verbe « aimer »
M'y suis attelé, vieil écolier
Dans le genre artiste, j'ai mué
Je fais des vers, finement ciselés
Car mon instit a fait la chasse
A mes sottes fautes d'orthographes
Gosse distrait, pris bien des baffes
J'en ai appris de ce langage
Racines latines d'un autre âge
Au subjonctif le déclamer
A l'imparfait pour se lamenter
Et au futur pour rêver
Trop bref présent, pour les pressés
Abréviation bien plus pratique
« Etre et avoir », plus que parfait
Pour se comprendre en public
L'impératif, en cas de danger
Mais là encore que de mystères
S'accordent pas de la même manière
Les participes, ces faux frères
Féminin, pluriel, se font la guerre
Pour s'avouer nos mots d'amour
Facile ça rime avec toujours
On s'apostrophe avec seul recours
De bouts de phrases pour se faire la cour
Langage de signes, et de gestes
Qu'on vocifère tels des bêtes
Sans se poser aucune question
Si on s'adresse à une nénette
Ou à un fruste bûcheron
Pourtant c'est tellement savoureux
De décliner avec le cœur
L'affirmation qu'on est heureux
Ayant acquis le sens du bonheur
Rimbaud, Verlaine, Baudelaire
Et Lamartine, Apollinaire
Sommeillent dans les dictionnaires
Que l'on ne consulte plus guère
Fini le siècle des Lumières
Nos gosses figés sur internet
N'usent que de formules incorrectes
Leurs demandez pas d'écrire des lettres
De leur verbiage n'en sont plus maitres
Griffonnent juste sans se prendre la tête
L'abrutissement gagne les esprits
De plus en plus de nos petits
Eux qui flemmardent, sont ravis
Risqueront pas d'être des génies
Sûrement moi-même dégénéré
Qui ne vit pas avec mon temps
Préfère mon sort d'éclairé
Pour ma mémoire, de croulant
Ainsi chaque soir, je m'évertue
A accorder ces vers têtus
Donnant un titre à mes chapitres
Afin garder mon libre arbitre
En héritant de nos vieux sages
Revient à nous poursuivre plus loin
Tous les secrets de leurs messages
Pour que s'en instruisent nos gamins
Malherbe, Diderot et Montesquieu
Ces philosophes, mortelles idoles
Dans ce monde d'imbéciles heureux
Qui les connait, en nos écoles
Se racornissent les cerveaux
Qui pourtant se plaisent d'élucubrer
Mais impossible d'atteindre ce « Beau »
Cherché sans cesse, qu'on ne trouve jamais
Plus prosaïquement, à se demander
Où sont passées, nos dures dictées
Avec les pleins et les déliés
Le maitre, ses règles, les respecter
Mais les temps changent, c'est normal
Venu celui de méthode globale
Enseignement de la pagaille
Piger l'ensemble sans faire de détail
Plus l'innocence de la découverte
Pour nos enfants émerveillés
Qui se dépensent en pure perte
De sensations, désenchantés
De gré de force doivent avaler
La laideur de la réalité
S'informatisent nos têtes blondes
Qui d'inspiration pourtant abondent
Mais s'amenuisent leurs connaissances
Trop de mollesse, manque de science
Sauf pour l'ivresse de leurs jouets
Savants robots qui les distraient
Pour leur esprit, pas compliqués
Où il suffit juste cliquer
A cause de nous, toutes ces faiblesses
Nous autres parents, trop extasiés
Devant nos mômes, pourris, gâtés
A qui devrions, botter les fesses
S'ils s'en offusquent quand on les gronde
Vont en pâtir en ce nouveau monde
Où pour être sûr d'être embauché
Savoir bâtir un CV
Le formuler en bon français
Moindre des choses, par faire de pâtés
Nous mènent loin ces réflexions
Sur « comment faire l'éducation »
De nos enfants qu'on veut brillants
Tout en étant jamais méchants
Faut reprendre tout par le début
Même si les élever c'est plus qu'ardu
Leur ancrer le sens de la mesure
De la lecture, de l'écriture
Pour qu'ils passent pas pour des benêts
Se faire une place en société
Les entrainer à se muscler
Meilleure preuve qu'on les aime
Même si le soir ont la haine
De rabâcher de vieux poèmes
Ne sachant pas que c'est la vie
Qu'ils l'éprouvent en poésie
Même que plus tard s'en souviendront
En plus vous en remercieront
De votre seule obsession
Les faire grandir, pleins de raison
Passés par là, nous leurs ainés
Ayant la chance d'être bien nés
Négligeons pas nos gosses futés
Ils sont pétris d'intelligence
S'ils ont horreur de potasser
Ils ont souvent idées d'avance JC Blanc mai 2020 (pour l'éducation de nos gosses)
Très juste chronique, et cela ne va pas aller en s'arrangeant car déjà les parents de 30, 40 ans sont, eux aussi, bien atteints !
· Il y a plus de 4 ans ·Louve