Farewell

Hier avant ma séance chez le psy j’ai cherché sur Internet la réponse redoutée à la question que je me pose depuis trop longtemps : ma prof de civi australienne est décédée. Je me suis gavée de Xanax et j’ai bu un demi avant d’entrer titubante dans le cabinet de mon psychiatre. Certes, et heureusement, je n’étais plus amoureuse de mon ancienne prof depuis longtemps ; mais ça m’a quand même foutu un coup. Plein de souvenirs me sont revenus comme un boomerang (métaphore peu anodine : le boomerang renvoie à la culture aborigène qu’elle enseignait, entre autres), comme la fois où je lui ai prêté un gant parce que sa main droite était gelée, j’étais toute heureuse de lui être utile, ou bien la fois où je me suis incrustée à un exam de première année alors que j’étais en troisième année et où j’ai écrit ces lignes sur la feuille : « Vous connaissez mieux les réponses que moi, je vous laisse remplir la grille », je lui ai alors tendue, elle a secoué la tête incrédule, et je suis sortie en me marrant comme une débile. Ah ça je l’ai fait chier, toujours à frapper à la porte de son bureau rien que pour passer du temps (qu’elle n’avait pas) avec elle, elle m’envoyait balader, je l’attendais dans le couloir, elle m’accusait de la « harceler ». Un jour elle s’est blessée avec une agrafe, elle s’est exclamée en anglais « Je saigne ! » ce à quoi j’ai répondu « Tant que vous n’êtes pas en train de mourir. », alors elle a dit : « Non, pas encore » ; était-elle déjà malade à l’époque, ça je ne le saurai jamais. Ouais, hier j’étais plutôt mal et aujourd’hui ça va mieux, je suis comme enveloppée dans une sorte de mélancolie douce et belle, de tristesse bienveillante, je sais pas… Je suis juste un peu plus persuadée que la vie est trop courte pour se faire chier avec des connards/asses et pour taire ses plus beaux sentiments envers les personnes qui ont une belle âme.