Fratricide

Caïn Bates

"Une des principales leçons de la vie est que nous sommes tous le Caïn d'un Abel."

         Bien avant ta naissance, les terres qu'on nous avait destinés étaient rongées par le remord, nourries par les larmes et faisaient pousser d'immenses tiges répétant inlassablement les gémissements de notre mère. Plus fertile que ce sol, elle t'a un jour donné la vie un triste matin ensoleillé. Au fil des années, tu as marché sur mes pas, vénérant la nature pour ce qu'elle voulait nous offrir, moi je récoltais ses fruits pendant qu'elle gâtait tes bêtes. Nous étions complémentaires, mon frère, et aurions pu faire de grandes choses mais, le grand Barbu t'a écarté de mon amour. Tu n'avais plus d'yeux que pour lui, tel un chien faisant le beau pour avoir son os. Jaloux, il fit tout ce qui était en son pouvoir pour t'écarter de notre droit chemin, il t'a opposé à moi. Lorsque mon père me chuchota à l'oreille, tu étais agenouillé là, juste devant moi, implorant des jours tout aussi radieux.

         Je buvais tes paroles comme la terre boit ton sang, je me nourrissais de ton sourire comme tes bêtes se nourrissent de ton corps, J'ai longtemps rêvé de ta présence puis j'ai toujours désiré ta mort. Et tandis que mon être se pare d'une marque indélébile, je te dis adieu petit frère, un autre finira par prendre ta place.

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