Grosse pétoche

Jean Claude Blanc

hommage à nos artistes satiriques qu'on assassine pour leur liberté d'opinion "on peut rire de tout, pas avec n'importe qui" (Desproges)

                                 Grosse pétoche

Les libertés sont en danger

Plus le droit de communiquer

De peur d'être écoutés

En fait, on doit tout déclarer

 

Cabu, Reiser, illustres comiques

Ont parodié la République

Pas censurés, comme satiriques

C'était le bon temps, du libre arbitre

 

La société a évolué

Même au contraire, s'est condamnée

Tombée de l'échelle, premier degré

Marche en arrière, le progrès

 

Tablette magique, et internet

Les SMS, face book, twitter

A l'univers, la porte ouverte

Gardiens du temple, veillent à tout heurt

 

Gendarmes du monde, pas l'ONU

Indiscrétion, oreilles tendues

On nous épie, même jusqu'aux chiottes

Pour consigner, la moindre crotte

 

On est tellement terrorisés

Qu'on ose plus même plaisanter

Faire du gringue, à une poupée

Sous peine d'être condamné,

Comme obsédé ou fou à lier

 

Reluque une femme, pour ses rondeurs

Les chiennes de garde, te sautent à la gorge

Du type dragueur pour une fleur

Tu dois te marrer, cher Desproges

 

Charly Hebdo, Hara-kiri

Fluide glacial, me vivifient

Me divertissent de mes manies

Et de mes vices, que je bénis

 

Façon moderne, rendre Justice

Pour compenser les préjudices

Que cause l'image traficotée

Dessinateur plein de malice

Rubis sur l'ongle, devra payer

 

A cette époque, démoniaque

D'être confrontés, à notre ego

On en devient paranoïaques

Quel mal de tête, pour petit cerveau

N'ont rien compris les procureurs

Qui passent leur temps, à préjuger

L'habile artiste, lui, fait son beurre

Anticipant, la vérité

 

Faudrait enfin apprendre à rire

Entre les rides, sans se mentir

Au fond de nous, on le sait bien

On n'est pas tous de bons chrétiens

Même on se traite de crétins

 

Les vertueux, eux, font recette

Mais sur le dos des pasticheurs

Critiques faciles, qu'on croit honnêtes

Comme les ricains, fausse pudeur

 

J'y vois pas beau pour l'avenir

Tout policé, pour adoucir

Nous injurier, façon Molière

Méthode austère, faire des vers

 

Politiciens, grosse pétoche

Pour fariboles, leurs amours moches

Mais galamment font des reproches

Aux humoristes, souvent féroces

 

On peut plus caricaturer

Les bons seigneurs, légions d'honneurs

Se sentent de suite blasphémés

Pan sur la fesse, bien mérité

Le peintre en perd son chevalet

 

Siècle ébloui par ses lumières

Mais dans son ombre, suivent ses valets

Les culs bénits, se désespèrent

D'être ainsi, trop bien croqués

 

C'est à mon tour de plaider

Pour visionnaires de nos défauts

Le bizutage autorisé

Pour prospérer, voler plus haut

 

Plus on avance, plus on recule

D'être encensés, on a assez

D'être moqués, sommes indignés

Ne pas bouger, c'est ridicule

Comment faut faire, pour la bascule

 

Grosse pétoche, pour les notables

Dans Paris-Match, jouent les martyrs

Si on leur tombe sur le râble

Sur les artistes, vont vomir          JC Blanc      février 2022  (hommage à la presse satirique)

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