Histoire Fictive

eymeric

"Il n'y a qu'une lettre qui change entre vriller et briller."

Tu en as vu de toutes les couleurs, tu sais avec qui, tu sais de qui je parle. À tel point que ta confiance envers l'autre (et ici l'autre est au masculin) s'est éprise d'un voile noir, laissant ta vie amoureuse sur un goût d'inachevé, un truc noir et blanc. Puis le jeune gars loin d'être un métisse que je suis est arrivé dans ta vie. Je t'ai reparlé de couleurs mais cette fois en palette, je t'ai juré de te laisser dessiner le tableau que tu voulais, que tu pouvais me faire confiance.

Donc insouciante tu as pris le pinceau, tu as peint le tableau, puis tu as lâché le pinceau. Tu l'as lâché parce que quoi que tu dises, tu as pris peur de l'ampleur du tableau. À la base ta vie se résumait à des petits croquis qui ne marchaient pas, là tu redoutais que ce soit l'œuvre de ta vie. Donc tu t'es amusée à dire que j'allais beaucoup trop vite, que j'avais trop d'imagination, que j'avais mis trop de couleurs trop tôt ... Mais non, c'est juste que, et sans être misogyne, j'avais beaucoup plus de couilles que toi. Le tableau on le peignait à deux, je n'étais pas seul, j'ai juste eu le cran de l'assumer. Je ne me suis pas projeté non plus sur la suite du tableau, mais j'ai au moins accepté qu'il existait.

J'écris tout ça sans aucune animosité tu sais, je te respecterai à vie. Je dis « à vie » parce qu'on sait très bien tous les deux que je t'ai plus marqué en 1 mois ainsi que ce week-end, que tous les autres petits gusses qui à un moment donné, ont eux, cherché à te servir de toi.

Je ne souhaiterai à personne le malheur sur cette terre, encore moins à toi.  Cela dit je me demande juste comment tu vas passer du peintre à un enfant qui ne sait pas dessiner. Mais vu que je te respecte au plus haut point, je vais aller au bout de ma démarche. Je vais poser mes couilles et utiliser mon cerveau, alors que bien souvent les garçons font l'inverse :

 

Tout ce dont tu as pris peur c'était là bien avant Biarritz. Ta façon de me regarder, de m'appréhender, ta façon de bien m'aimer : c'était là bien avant le week-end. Jusqu'à Biarritz tu t'imaginais le tableau, à Biarritz on a prit le pinceau. Avant tu étais comme dans la queue pour voir la Joconde : toute excitée, tu trépignais d'impatience. Puis arrivée devant, comme une touriste lambda, tu t'es dit « Ah c'est bidon. »  Mais les touristes mentent, ils viennent tous les uns après les autres, à la queue leuleu, ils s'enchaînent... Ils s'enchaînent parce que ils rêvent tous de quitter leurs chaînes pourries pendant quelques minutes devant quelque chose de grand. Parce que c'est irréfutable : la Joconde c'est grand, c'est beau. Bah aussi présomptueux que ça puisse être : pour toi j'étais la Joconde. Je suis grand et je suis beau. Et tu as eu une réaction de touriste lambda alors que tu es tout sauf lambda. Mais à croire que tu t'es laissée happer par les bruits de couloirs de la foule qui patientait.

Enfin ça je ne le pense même pas, ou alors c'est minime, tu es bien trop indépendante pour ça. Ça doit juste être de la peur, de la fainéantise. Parce que tu sais très bien que je ne t'aurais jamais berné, que jamais le bonnet d'âne tu n'aurais porté. Mais c'est ça qui effraie les humains donc ? C'est lorsque nous sommes trop honnêtes, trop bon ?

Je comprends beaucoup plus de chose maintenant, c'est plus simple de faire la guerre en fait. Pour ça qu'on parle d'effort de paix, pour ça que certaines personnes parlent d'aimer de « toute leurs forces ». Parce que pour la plupart de ces gens lambda ça demande un effort surhumain tant ils sont feignants d'habitude.

Mais moi je ne suis pas lambda. Alors certes, je ne sais pas ce que c'est que d'aimer puisque je ne t'aimais pas. Mais je t'appréciais, j'étais « attaché » forcément.

Et là je t'écris ça alors que beaucoup de gens jacassent autour de moi, ils parlent de plein de choses futiles, font semblant de s'intéresser aux uns et aux autres. J'ai les écouteurs mais je les entends et ça me fatigue.

À contrario c'était revigorant de te voir et ça n'avait rien de futile. Ou plutôt toute les actions futiles trouvaient un sens, ça c'était cool.

Je ne vis pas dans la nostalgie. Tu as choisi d'éteindre la télé, très bien elle est éteinte. Toute manière je ne regardais presque plus la télé. Il y avait beaucoup trop de programmes futiles, tout sauf futés, remplis de gens qui fuient la plupart du temps.

 

 

Et si ce texte n'a pas de transition c'est car tu n'as pas pris le temps d'en trouver une. Tu as fait volt-face d'un coup, tu es montée en pression et : boum explosion. Tu m'as tourné le dos. Et alors qu'à Biarritz j'appréciais tant que tu le fasses pour te laisser de l'avance et te contempler marcher. Là j'ai un sourire jaune et narquois au coin des lèvres. Je me dis « c'était tellement prévisible, tellement prévisible qu'elle soit complaisante, en fait je m'en doutais ». Mais je te laisse retourner à Biarritz, et du banc où tu as gravé certaines choses, jusqu'à la place en haut où on a pris la seule photo du week-end, en passant par les rochers : je te laisse y retourner et feindre que tu ne penses pas à moi.

Tu aurais très bien pu être un chapitre de mon livre tant sur le coup tu es tout ce que je dénonce. C'est toujours le même refrain avec les gens, et vous vous étonnez que tout ça n'est que du pipo ? Vous prétendez vouloir être le chef d'orchestre, mais quand la mélodie qui vous emmène en balade est trop forte, vous la mettez en sourdine. Vous êtes des sourds et muets de l'amour, faut pas s'étonner de ne pas comprendre les signes et que ceux-ci deviennent des cygnes qui s'envolent ensuite.

"Et pourquoi ce n'est pas toujours aussi facile ? ", bah parce que tu ne fais aucun effort. Ça pourrait l'être, mais tu ne veux pas. À croire que l'humain à ce côté maso où il veut que ce soit dur, pénible. Faut toujours qu'il y ait une couille, que la péniche se renverse. Mais tout ça aura beau prendre l'eau, la vérité remonte toujours à la surface. Et la vérité c'est que bientôt tu diras "j'ai des souvenirs à la peine" et non à la pelle. Parce que tu n'auras pas besoin de creuser, ça va remonter tout seul à la surface, ça va te picoter. De ce banc à Biarritz où tu as inscrit nos initiales jusqu'au moment dans l'hôtel où tu as regardé le plafond en souriant puis en serrant fort le coussin contre toi. Tout ça va remonter, picoter, te manquer. Je sais que tu t'en souviens, et aussi surprenant que ça puisse être je m'en souviens aussi. Parce que j'ai fait attention aux détails, j'ai fait attention à toi. J'ai fait attention aux macarons, j'ai fait attention aux petites fossettes que tu as lorsque tu es vraiment heureuse (alors que tu as toujours rêvé d'en avoir je sais), j'ai fait attention à tes rires nerveux et à ceux plus sincères : quand tu es sincère tu ris plus fort. J'ai fait attention aux regards que tu me jetais lorsque je conduisais, ils me plaisaient. J'ai fait attention à ton petit mordillement de lèvre qui précédait un large sourire, j'ai fait attention à ta grande déception telle une enfant lorsque ta CB ne marchait pas au mcdo alors que tu venais de la récupérer. J'ai fait attention à ton petit air agacé quand je finissais par trop relever tes fautes d'orthographe (mais tu es intelligente Ness, tu le sais tu iras loin, ne te sens pas inférieur à moi). J'ai fait attention à tes premiers mots au réveil : « Je pourrais rester ici toute ma vie : toi, un lit et dormir ». J'ai fait attention à la tournure qu'a pris la soirée lorsqu'au Funky Burger je t'ai proposé de lire mon livre et que tes yeux se sont grand ouvert là encore comme une enfant.

Parce que tout ça était bien présent bien avant Biarritz. Donc l'excuse de dire que tout s'est accéléré n'en est pas une. C'était juste la continuité des choses. Tu le disais toi même : on était beaux ! Ce n'est quand même pas notre faute si la suite des choses fut géniale. Par contre c'est ta faute si aujourd'hui l'est un peu moins. Tu as choisi d'éteindre la télé, seul toi et moi comprenons vraiment ce que cela signifie. Par contre tu sais encore plus que moi que tu t'es forcée à le faire. Et je suis sûr que depuis le fin fond de ton lit, dans cette ville que tu n'aimes pas tant que ça car tu n'es pas de là bas (là aussi je t'ai écouté), je suis sûr qu'en lisant ce texte, tu regarde la télécommande, tu hésites à rallumer. Tu te poses la question de la fierté, tu te poses tout plein de questions, tu la fixe cette télécommande et tu te dis qu'il suffirait d'appuyer sur un bouton, d'un message, d'une fois. Tu te dis que tu pourrais retrouver cette façon de m'embrasser, que je pourrai te dire où trouver les mêmes lunettes que les miennes mais en version argent (car oui j'ai fait attention à ça et durant ton absence je suis tombé dessus : elles existent), tu regrettes cette fois où tu es passé à côté de moi muette place du Parlement et où pourtant ta copine t'a dit « il est là ». C'est un peu fouilli tout ça parce que tout s'accélère dans ta tête et tu re-panique. Tu te dis que tu ne retrouveras peut-être plus jamais tout ça, et c'est vrai. Tu te dis que c'est peut-être déjà trop tard, et c'est peut-être vrai aussi.  Mais tu te dis qu'au fond la télécommande est là, juste là ... Que ça ne coûte rien d'essayer par contre que ça coûte de ne rien faire. Tu te dis qu'au final tu as quand même essayé une fois dans ta vie et que ce fut pour un connard. Ce serait dommage de te restreindre à ça. Tu fixes la bague que tu as au doigt et tu prends un peu plus conscience qu'en fait elle serre bien plus que le doigt auquel tu la porte. Elle te fait serrer parce qu'elle te bousille carrément la vie, au même titre que cette histoire passée. Mais on a toujours le choix de changer de bague, comme on a toujours le choix de rallumer la télé.

 

Et tu sais, tu as bien failli emporter le respect que j'avais pour toi. Puis bien pire, tu allais emporter toute la foi que j'ai pour les filles comme toi. Alors à défaut de me rabibocher avec la télévision et sa lumière, je livre ce texte sur cette courte histoire qui avait tout l'air d'un film. 

 

Ness, tu me disais souvent « écris sur moi, écris sur moi ». Je l'ai longtemps pas fait car je voulais que ce soit naturel. Puis pouf ça l'a été d'un coup, tu sais exactement à quel moment. Tu sais qu'il y a un autre texte qui existe, un autre texte qui est tout autre que celui-ci. Mais c'est celui-ci qui est publié car c'est celui-ci que tu as choisi. Donc le voila ton texte, il n'y a pas plus sincère que celui-ci. Enfin si peut-être l'autre avant, tu sais celui qui un moment dit « Tu imagines le nombre de regard que l'on croise une fois par jour et avec lesquels il ne se passe rien ? Contrairement à cela, avec toi chaque fois que je croise ton regard il se passe mille choses. Je pense qu'il ne faut pas lâcher ce genre de personne »

 

Mon respect éternel pour toi, mais tu as fait le mauvais choix.

  • j'espère que je pourrais lire un texte apaisé sans que cela soit forcé, juste pour me prouver que c'est possible de ne plus être secoué par le sentiment d'injustice quand cela arrive. En attendant de lire ça, merci d'avoir apaisé ma colère.

    · Il y a plus de 8 ans ·
    16117471 1285365338187236 334276238 n

    Lucie Labat

    • Qu'entendez vous par le fait que cela soit "forcé" ?

      Merci pour votre lecture et merci à vous pour la lecture

      · Il y a plus de 8 ans ·
      10403125 10206644474419303 6500541427491989208 n

      eymeric

    • je suis en train de me demander aujourd'hui plus que jamais dans ma courte existence s'il est possible d'être mature sans devenir insensible. La maturité, le calme, l'apaisement sont pour tout le monde le signe que l'on est enfin passé à être chose. Moi je sais que sachant cela, je peux vouloir faire semblant d'être apaisée, pour me prouver que tout va bien. Mais bien souvent, c'est juste que je m'empêche de ressentir. un texte apaisé car plein d'amour et de confiance, de sentiments en résumé, est ce que je cherche pour me prouver que c'est possible

      · Il y a plus de 8 ans ·
      16117471 1285365338187236 334276238 n

      Lucie Labat

    • http://welovewords.com/documents/prends-le-pour-toi :)

      Mon livre vous plaira surement alors ! :)

      · Il y a plus de 8 ans ·
      10403125 10206644474419303 6500541427491989208 n

      eymeric

    • le smiley fait-il partie de l'adresse IP ? ;)

      · Il y a plus de 8 ans ·
      16117471 1285365338187236 334276238 n

      Lucie Labat

    • non :)

      · Il y a plus de 8 ans ·
      10403125 10206644474419303 6500541427491989208 n

      eymeric

Signaler ce texte