II Le banc vert

ceriserouge

"Ne pleure pas, ce ne sera pas long..."

Dès que je recevais une de ses lettres, j'enfilai mes bottines noires à la hâte et me précipitai sur la rive du fleuve. Là, je m'asseyais sur le banc vert, repensant aux derniers instants ensemble, je décachetai l'enveloppe et je la dévorai. Le vent soufflai dans mes cheveux relevés et dans ma robe de popeline bleue dont je me parais à chaque fois, car cette couleur me faisait penser à son pourpoint de velours. La brise caressait ma joue, comme si elle voulait sécher mes larmes amères et apaiser le feu de ma tristesse.

Les lettres n'annonçaient rien de bon ni de mauvais, il me contai simplement sa vie de tous les jours, l'avancement de ses études, la somme amassée de jour en jour...

Suivait un petit poème d'amour écrit rapidement avec la plume que je lui avait offerte avant de partir, qui me prouvait sa tendresse et sa fidélité.

Les semaines s'enchaînaient, les courriers se précédaient, moi même lui en envoyais lorsque je le pouvais.

Mes pensées ne tournaient plus qu'autour de son visage, son portrait m'obsédait de plus en plus et m'empêchait de dormir. L'amour que je lui vouais semblait tellement puissant que je ne mangeais plus, interdite devant ce sentiment, sans cesse tourmentée par ses lettres et son retour non avancé...

                                        *     *     *

Un jour, je reçus encore une lettre, qui venait de la ville où il logeait, et pensant qu'elle venait de lui, je m'enfuis au devant du banc vert, mon refuge éternel, là où j'avais tant de souvenirs et de réconforts douloureux... Je l'ouvris...

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