Il est l'heure de passer à la caisse

Aurelie Blondel

Spéciale dédicace !

Les commerçants ont souvent cette générosité de permettre à des clients fidèles d'avoir une ardoise.

Le truc, c'est qu'en fin d'année, on fait la comptabilité et ces clients doivent passer à la caisse.

Logique.

2023 tirant vers sa fin, j'ai fait mon petit bilan moi aussi. Pourquoi cette année et pas avant?

Aucune idée, ce n'est de toute façon pas le propos. Non non, le sujet, c'est le harcèlement scolaire.

Alors… Comment peut-on passer de payer son addition au harcèlement scolaire?

Et bien, dans la mesure où je ne suis pas commerçante, je règle mes comptes autrement. Les années sont passées à une vitesse folle et mon «vieil» âge exige que je fasse travailler ma mémoire, je ne tiens pas à développer un Alzheimer précoce. Je peux dire sans prétention que la mienne fonctionne encore aujourd'hui très très très bien.

Petit retour en arrière et retour au collège.
Ah le collège… Ces années tellement ingrates. Peu s'en souviennent joyeusement. Ceux qui en gardent de bons souvenirs sont globalement des enfoirés. Si si, voyons, ne nous mentons pas.

Je peux dire que je suis ravie de vous donner de mes nouvelles. Je suis certaine que vous en rêviez d'ailleurs. Mais avez-vous la même mémoire que moi ou est-elle travestie?

Allez, un petit indice: à l'époque, mon nom de famille était Roumy. Ça doit un peu mieux vous parler maintenant? Et si tel n'était pas le cas, DIANTRE! Quel outrage! J'ai tout de même été votre fidèle cliente pendant quelques années et je n'avais pas à attendre la fin de l'une d'elles pour passer à la caisse. Oh bah non hein. C'était plus fun pour vous d'imposer votre règne et votre terreur tous les jours. Je suppose que vous le vivez bien encore aujourd'hui d'ailleurs, n'ayant même pas conscience d'avoir été des harceleurs.

Je sais que nombre d'entre vous ont des enfants aujourd'hui et je ne cache pas que ça m'amuserait beaucoup de voir vos yeux remplis de hargne si votre chère progéniture était victime de ce que vous faisiez subir vous même aux autres. Il va de soi que je ne leur souhaite pas.

C'est assez ironique je trouve. Et en toute honnêteté intellectuelle ou morale que vous avez, je vous le souhaite, acquise durant toutes ces années passées, nul doute que vous avez eu le courage de vous vanter des vos exploits de collégiens et collégiennes auprès d'elle afin de les éduquer à ne jamais devenir les enfoirés que vous étiez (et êtes encore aujourd'hui à mes yeux, on ne m'a jamais demandé pardon aux dernières nouvelles).

Sur votre ardoise, que je ne vous aie jamais dû, il y avait pêlemêle: Insulter et vouloir le pire quotidiennement pour moi et ma famille sur pas mal de générations (Hey, ça a marché, ma sœur est morte jeune. Je suis tellement émue de vous apprendre que vos vœux aient été exhaussés), rabaisser, marginaliser selon les classes sociales, prendre des photos intimes à l'insu des harcelés (Cela s'appelle du Revenge Porn maintenant), les contraindre à embrasser quelqu'un (Hey psst c'est une agression sexuelle), les voler (encore un délit), en rire… J'en passe des pires et des meilleures.

Je me demande combien vous en demanderiez au tribunal s'il s'agissait de vos enfants?

Ouais, c'est comme ça que vous agissiez. En toute impunité de surcroît, puisque le harcèlement scolaire n'était pas reconnu à ce moment là. Quel dommage… Sauf que ma mémoire n'a pas oublié et les gens ont le droit de savoir à qui ils ont à faire.

Je vous dédicace donc ce texte, chers camarades de 4ème et 3ème du collège Jules Ferry. Grâce à vos saloperies et votre impunité, j'ai gagné plus vite en maturité, me suis forgée un libre arbitre digne de ce nom et j'ai pu choisir mes combats.

Vous n'en faites pas partie ceci dit, vous n'en êtes pas dignes. Cet hommage que je vous envoie est totalement gratuit. Je dirais même qu'il est bienveillant. Nous avons le même âge et je suis très soucieuse de votre mémoire. Il serait dommage de ne plus se souvenir…

Quant aux autres qui ne se sentent pas concernés parce qu'ils étaient simplement des suiveurs, je suis au regret de vous dire que vous êtes tout autant coupables.

A Sandrine B, Aurélia M, Fabrice L, Alexandra P, Lætitia R, Manuel B, Agathe L, Morgane C, il est l'heure de passer à la caisse.



Je présente mes sincères condoléances à la famille, aux amie.s et aux proches de Carole N, qui en avait bien bavé aussi.


Aurélie Blondel.   

  • Excellent. Et oui, à l'époque il fallait apprendre à se défendre, dixit les profs, ou ça apprenait la vie, dixit la famille. Mais les journées étaient longues et les nuits emplies de cauchemars. Une sale époque.

    · Il y a environ un an ·
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    Kanon Gemini

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