IMPROBABLE

Combien de vies se sont-elles enchaînées l’une à l’autre au cours des siècles dans des lieux et des espaces divers ?

Combien de jours ? D’années ? De siècles a-t-il fallu?

Combien de petits événements, de tragédies ? Combien de joie et de bonheurs ? Combien de naissances et de morts ?

Combien de hasards et de rencontres ?

Combien de séparations, de départs, de retours ?

Combien de routes croisées, de chemins entremêlés ?

Combien de pas qui s’éloignent pour toujours ou d’autres qui s’approchent laissant des cœurs battants ?

Combien de paroles inutiles ou sages ?

Combien de silences ou de murmures imperceptibles ?

Combien de bruits et de pleurs ?

Combien de larmes et de rires, d’échanges ou de trahisons ?

Combien de rêves et de cauchemars ?

Combien d’hommes, de femmes, de regards et de gestes ?

Combien de maîtres ? Combien d’ennemis ?

Combien d’enfances heureuses ou difficiles ?

Et puis combien de jours et de nuits nous a-t-il fallu pour devenir ce que nous sommes avec nos héritages tricotés au travers de toutes ces autres vies ?

Combien de rires as-tu jetés au ciel et combien de larmes versées ?

Combien de voyages, de rêves ?

Combien d’autres hommes a-t-il fallu que tu rencontres au cours de toutes ces années pour être ce que tu es aujourd’hui ?

Combien de pensées et d’expériences ont-elles creusé les sillons ensoleillés de ton visage ?

Combien de beautés vécues et de laideurs subies ?

Pour moi, je sais tous les chemins de traverse que j’ai empruntés, toutes les ornières qui m’ont fait tomber… Je sais aussi les voies faciles et les petites routes agréables que j’ai parfois connues. Je sais les détours dont je ne mesurais pas l’importance, les hasards que j’ai maudits et les jours de grands désespoirs. Mais tout cela et ce que j’ai oublié, ce dont je ne veux pas me souvenir, tous ces jours, ces mois, ces années qu’il a fallu pour que je sois celle que je suis aujourd’hui… Tous ces instants je les bénis maintenant parce que fil à fil ils ont construit notre rencontre.

De tous ces hasards et ces improbables, de toutes ces joies et ces détresses je remercie le ciel, car sans eux, je ne saurais pas t’aimer tel que je t’aime.

Quelle chance y aurait-il pour que toi et moi puissions nous rencontrer ; quelle probabilité ?

Une seconde, une graine de vie, une décision sans importance tant de petites gouttes de chance pour que l’impossible se réalise…

A quoi on peut penser la nuit en attendant que vienne le chant des oiseaux et qu’une lointaine corneille tente à elle seule de réveiller le monde…

Par quels vertiges je me laisse emporter !

Et pourtant quand je suis en face de toi et que je vois ton regard si beau sur le monde, je rêve que l’improbable, que l’impossible que tout ce qui sépare devienne ce qui rapproche.

Je me dis que toutes ces chaînes de vies et de rêves qui se sont tressées au cours du temps ne sont pas des instants vains et inutiles et que si tous ces événements anodins ou importants qui se sont produits nous ont faits, toi et moi tels que nous sommes et qu’ils ont conduit à notre rencontre ce n’est pas pour laisser s’échapper la magie de ce miracle…

05.05.05